Comme à peu près toutes les personnes qui suivent avec passion et honnêteté dans leurs jugements les efforts de nos Canadiens sur la scène internationale du tennis, ce que les dénouements d'entrée aux Internationaux d'Australie sont difficiles à accepter.

Des cinq Canadiens en lice, un seul réussit à s'extirper du premier tour. Milos Raonic qui grappille in extremis la place de 32e favori, profite du forfait du petit mais coriace modalve Radu Albot (incapable de servir) pour plutôt affronter le joueur repêché des qualifications Lorenzo Giustino. L'italien qui s'est incliné au super bris d'égalité de son dernier match des qualifications méritait certainement une autre chance de se faire valoir dans le grand tableau d'un Grand Chelem. Imaginez : à 28 ans c'est la 1re fois qu'il a la chance de vivre une expérience comme celle-là.

Malheureusement pour lui, Milos lui passe sur le corps comme un rouleau compresseur. D'abord la bonne nouvelle c'est que Raonic a pu s'entrainer à l'inter saison convenablement pendant près de 8 semaines sans pépins physiques majeurs. Malgré la défaite devant le français Corentin Moutet à Doha, bien des choses dans son jeu se placent petit à petit : surtout son service et également son coup droit dominant dans l'échange.

Une victoire convaincante du grand Canadien 6-2, 6-1, 6-3 en 1:27, une balade de deux jours en raison de la pluie, mais une balade tout de même. Au prochain tour, ce soir tard, Milos affrontera le Chilien Cristian Garin, 36e mondial, qu'il respecte énormément. Milos ne voit plus les choses à moyen ou long terme, mais bien au jour le jour, au gré des humeurs de son corps...

Il est cependant déterminé à améliorer son classement cette année pour se faire une place sur l'équipe qui nous représentera aux Olympiques.

Justement, parlons de nos deux jeunes qui le devancent au classement soit Denis Shapovalov et Félix Auger-Aliassime. Ils ont tous les deux connus de très bons moments, mais aussi des difficiles face à des adversaires moins bien classés, mais dangereux quand même. Tiens, commençons par Ernests Gulbis, une force de la nature qui a peut-être dilué son talent en discothèque (!), mais qui a aussi connu des moments de gloire sur le circuit.

En 2014, il bat deux top-10 à Roland Garros, soit Roger Federer et Tomas Berdych pour atteindre les demies et passer trois semaines dans le top-10! Respect! Mais aussi beaucoup de désillusions avec des baisses de motivation, des comportements d'enfant roi (son père est milliardaire) et un classement yoyo. À 31 ans, il y est toujours, plus stable, plus heureux (marié et père de famille) et incroyablement plus calme sur un terrain de tennis.

Ce que j'ai remarqué dans cette victoire sur Félix 7-5, 4-6, 7-6 et 6-4, c'est qu'il est resté égal émotivement pendant 3 h 35 de jeu intense, malgré les durs labeurs, les moments de tension, les frustrations, la fatigue et l'excellence du 20e favori. Vous vous imaginez jusqu'à quel point cela est difficile à faire, surtout pour un joueur avec un passé comme le sien?

Dommage quand même pour FAA qui a eu ses chances, mais n'a pas été en mesure de se dégager de la nervosité pour bien se battre. J'ai aussi noté que par moments ses schémas d'attaque manquaient un peu de flair, diversité ou imagination. Gulbis a tout vu cela et s'est superbement battu au fil de la rencontre, se basant toujours sur sa première balle supersonique et son revers appuyé en croisé.

Avec un peu plus d'expérience, Auger Aliassime réussira éventuellement à trouver des solutions lorsque ça compte, en fin de sets notamment. Mais bravo d'avoir sauvé 3 parties de 0-40 au service et d'avoir été pro du début à la fin. 

Denis la Menace a quant à lui eu beaucoup de difficulté à bien commencer sa rencontre devant Marton Fucsovics. Bizarrement il ne sera jamais vraiment libre pour s'exprimer avec le panache qu'on lui connait depuis la fin de l'année dernière. Pourtant au meilleur des 5 manches, c'est bien l'avantage de ce format : tu as du temps et oublier un mauvais set devrait être facile à faire. Ce que je remarque aussi c'est qu'il est moins explosif en jambes ce qui est une condition sine qua non quand on veut accélérer comme il sait le faire dans la balle.

En écoutant Shapo en conférence de presse après sa défaite, c'est évident qu'il a souffert d'une grippe, sa voix est un peu rauque et il tousse. Comme coupe-pattes, en voilà un. Au-delà de tout cependant, lorsque Denis ne joue pas à son goût et que l'adversaire est vraiment bien dans l'truc, il a tendance à se frustrer et perdre les pédales ce qui lui bouffe une énergie folle et ne l'amènera pas vers le haut.

Shapovalov possède un talent fou, mais il faut grandir encore émotionnellement pour jouer à la hauteur de son classement sur une base plus régulière. Ça viendra...

Pospisil perd patience... et le match

Pas de veine pour Vasek Pospisil face à l'immense serveur Ivo Karlovic alors qu'il s'incline en 3 manches consécutives dont un bris d'égalité au 1er set. Pas évident de s'offrir qu'une maigre petite balle de bris pendant 2:01 de jeu, un vrai calvaire quoi! Je croyais vraiment aux chances de notre Canadien puisqu'il l'avait battu lors des 4 derniers affrontements parce qu'il est un grand athlète, ce qu'il faut être, pour remettre les bombes du docteur Ivo en jeu! Pas facile, car ce genre de rencontre se joue à quelques petits riens.

Un bouquet de fleurs pour la seule Canadienne dans le tableau des dames Leylah Fernandez qui se qualifie pour une première fois en simple en Grand Chelem. À 17 ans ce n'est pas banal puisque cela lui permet de franchir une autre belle étape: de 207e, la voilà 185e!

Fernandez plie devant l'expérience de Davis

Au premier tour, elle affronte Lauren Davis, une cogneuse au petit gabarit, mais qui maximise sa force de frappe de façon remarquable en raison de sa grande rapidité. Leylah commence bien, car elle la connait puisqu'elle s'est entrainée dans le passé avec elle en Floride. L'ancienne 26e mondiale qui se retrouve au 62e rang aujourd'hui, réussit à retrouver son excellent jeu de jambes après un petit malaise à un pied en début de rencontre pour forcer la note sur une base régulière et l'emporter 6-4, 6-2.

Peu importe, à chaque fois que je la vois jouer, Leylah s'améliore. Elle mérite le respect. 

Un dernier petit mot sur la grande championne qu'elle aura été. Maria Sharapova s'est bien battue face à Dona Vekic, mais s'incline 6-3, 6-4 en 1 h 21. En scrutant son regard en conférence de presse j'ai l'impression que Maria ne va pas s'éterniser sur le circuit si les résultats ne viennent pas.

À la question : « as-tu disputé ton dernier Aussie Open? » Maria reste évasive, regardant au sol pendant une seconde avant de répondre. La fin est proche pour celle qui a ébloui la planète tennis en gagnant les quatre Grands Chelems, dont le premier à Wimbledon à 17 ans seulement...

« [Une défaite] difficile à avaler »
« Ç’a été une très belle semaine »