À la surprise générale samedi, la demie entre Rafael Nadal et Denis Shapovalov est annulée car l'Espagnol se blesse aux abdominaux juste avant le match. Chance inouïe pour Novak Djokovic qui tente donc dès aujourd'hui d'aller chercher le plus de points possible afin de récupérer sa place de « roi de la jungle », soit le dossard de numéro 1 mondial, en ajoutant 400 points de plus à sa fiche à Paris-Bercy avant de tout faire aussi pour gagner Londres qui commence dans une semaine. On s'entend que la carotte est belle et le Serbe sera d'attaque en finale aujourd'hui, prêt à dévorer l'adversaire s'il le faut, enfin presque...

 

Déjà que l'on sait que c'est tout un défi pour un jeune joueur comme Denis Shapovalov d'affronter un compétiteur de la trempe de Novak Djokovic qui impose son jeu et qui prend, règle générale, beaucoup de place sur un terrain de tennis. En plus, lors des trois premiers matchs face au Serbe, on a bien senti que Denis était intimidé par Djokovic, parce qu'il a tellement de difficultés à le déloger de sa zone de confort. Ce fut tout de même un peu plus encourageant alors que les sept premières parties à Shanghai il y a quelques semaines étaient très serrées. On s'entend qu'il faut cependant jouer un match plein face aux meilleurs, pas juste quelques parties.

 

Comme si faire abstraction de l'omniprésence du Serbe n'était pas assez, on réalise rapidement qu'il met la barre si haut dès le premier point du match au service. Il est d'une telle précision, ce qui place encore plus de pression sur les épaules de notre jeune Canadien. Quand on est nerveux, cela paraît quelquefois sur le lancer de balle au service. Denis a beau avoir un bras gauche en or mais s'il est forcé de quasiment courir après la balle qui est trop dans son dos au service, il ne sera pas percutant. Sa première partie au service est bourrée de fautes de tout acabit et Novak en profite pour le malmener violemment en échange. En moins de 30 minutes, le set est en poche (6-3) pour le Serbe qui n'a offert aucune balle de bris. 

 

La bonne nouvelle cependant, c'est que Shapo sert mieux après avoir été brisé d'entrée. J'espère qu'il pourra amener ces belles sensations retrouvées au service pour aussi grimper son énergie en retours parce que dans cet aspect du jeu, Novak lui fait extrêmement mal. Denis tient jusqu'à 3-3 au deuxième set parce qu'il sert superbement et enchaîne mieux sur le deuxième coup de raquette. Bien servir vous achète du temps mais à la septième partie, Denis donne trop et il est brisé. Je sens vraiment que c'est difficile d'y croire aujourd'hui parce que ses jambes ne le portent pas bien dans l'échange. De plus, l'explosivité pour bondir rapidement à gauche ou à droite en réception de service n'est pas là ou si peu. Dans ce temps-là, face à un joueur de la trempe de Novak, c'est très difficile de s'en sortir parce que l'autre devant a trop d'expérience et il voit bien que le jeune n'a pas sa rapidité habituelle.  Preuve à l'appui, Denis ne grappille que 3 points sur 17 au service en deuxième balle, ouch! Malgré cela, Denis se donne une balle de bris à 3-4 mais ne vient pas proche de la convertir.

 

C’est alors que 65 minutes plus tard, Novak l'emporte 6-3, 6-4. Il tient à bout de bras le trophée de Paris-Bercy pour une cinquième fois en faisant la leçon à deux belles pousses remplies de talent et de potentiel durant la semaine : Stefanos Tsitsipas et Shapo.

 

Notre jeune est fatigué aujourd'hui mais cela n'enlève en rien à ses beaux efforts durant la semaine. Il a perdu le premier set face à Fabio Fognini mais s'est accroché pour le battre pour une deuxième fois en deux matchs. Je vous rappelle que l'Italien était 9e au monde cet été. Denis a aussi battu Alexander Zverev, qui occupe le 6e rang mondial, pour une première fois en carrière après trois défaites alors qu'il n'avait pas réussi à lui prendre une seule petite manche. Puis, que dire de la mornifle qu'il a infligée à Gaël Monfils pour prendre sa revanche sur celui qui lui avait fait l'affront d'une si belle remontée au US Open cet été. Demain la Monf retrouvera le top-10. Wow, quelle belle semaine pour Shapo qui grandit à vue d'oeil maintenant qu'il détient un tout nouveau statut avec un premier titre ATP à Stockholm et une finale Masters 1000. Il termine l'année à la 15e place mondiale, la plus belle de tous nos Canadiens.

 

Ce que je trouve formidable aussi c'est que, règle générale, donc à part aujourd'hui pour les raisons que l'on connaît, son nouveau coach, l'ancien joueur Mikhail Youzhny, a réussi à lui faire comprendre et puis adopter une méthode basée sur la sagesse et la justesse en réception de service en bloquant ou coupant la balle sur premier service. Le kid place beaucoup plus de retours en jeu, ce qui lui donne au moins 30 % de chances de plus de gagner des points et de se faire valoir en échanges. Forcément, cela veut aussi dire qu'il ressent moins de stress au service, puisqu'il gagne beaucoup plus de points en retours. C'est franchement gagnant sur toute la ligne cette façon de faire qu'il faudra continuer de revisiter et travailler.

 

Denis Shapovalov et Félix Auger-Aliassime ainsi que Bianca Andreescu m'ont épaté au-delà de mes espérances les plus folles cette année. Bravo à tous ceux et celles qui gravitent autour de ces jeunes champions et qui se dévouent corps et âmes pour assurer leur développement et bien-être. J'ai déjà hâte à l'an prochain car il y a encore beaucoup de place pour l'amélioration dans certains domaines. N'est-ce-pas merveilleux?