La nouvelle star du tennis au pays Bianca Andreescu est bien consciente qu'elle se doit de montrer la voie cette fin de semaine, alors que nos compatriotes sont à Bois-le-Duc pour une rencontre du Groupe mondial II de la Coupe Fed face aux Pays-Bas. Elle est d'ailleurs la première à fouler le terrain face à une joueuse qu'elle connaît bien puisqu'elle l'a affrontée deux fois l'an passé. Richel Hogenkamp lui a même fait l'affront de la battre au troisième et dernier tour des qualifications à Roland-Garros. La Néerlandaise aurait même pu continuer d'épater à la Porte d'Auteuil puisqu'au premier tour dans le grand tableau elle mène 3-0 au 3e set face à Maria Sharapova. Donc, tout cela pour vous dire que sur terre battue, elle est dangereuse et il faut respecter sa qualité de glisse et de frappe.

Ce que j'aime chez « BBB », le nouveau surnom que je viens de coller à notre Canadienne tout-étoile (Boum Boum Bianca), c'est l'intelligence de son jeu. Aucun problème lorsqu'elle est bien concentrée pour imposer le rythme dans l'échange, ouvrir le terrain pour mieux enchaîner puissamment dans l'ouverture ou déposer l'amortie. C'est certain que lors du premier set, Andreescu est un peu nerveuse et cela occasionne quelques trous de concentration. Normal, parce que ce tout nouveau statut, il faut savoir l'endosser. Il ne faut pas oublier qu'elle n'a que 18 ans et que ses immenses succès l'ont propulsé si rapidement à l'avant de la scène mondiale. Au-delà de tout, le plus difficile dans ce genre de format, c'est qu'elle n'a pas le droit de perdre... Pour que le Canada gagne cette fin de semaine, il faut absolument la no 1 aille chercher deux points en simple.

Après avoir perdu son avance de 5-2 et être passée à côté du moment en servant pour la manche à 5-3, « BBB » se rassure en brisant à nouveau pour gagner le set 6-4. Après cela, c'est comme si la pression n'existait plus, car il n'y a qu'une étoile qui brille au firmament. Une heure six minutes plus tard, le premier point est dans la poche. Comme elle grandit vite la petite...

Puis, c'est au tour de Françoise Abanda de s'exécuter. Malgré une année 2018 de misère, il faut quand même se souvenir que la Québécoise a souvent excellé en simple en battant des joueuses bien mieux classées qu'elle. Je vous donne trois noms : Yaroslava Shvedova, Yulia Putinseva et Irina Begu. Trois filles qui ont été classées dans le top-30 et qu'Abanda a défiées avec succès en Coupe Fed.

Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle bataille comme si sa vie en dépendait devant la no 1 des Pays Bas Arantxa Rus. Jamais Françoise n'a baissé les bras, pas même un seul instant. Les échanges sont intenses et exigeants, les revirements et bris de services sont nombreux, mais une seule chose demeure : Françoise accepte le combat tel qu'il est et lutte au meilleur de ses capacités pour aller chercher une victoire après 2 heures 37 minutes de très durs labeurs. Comme ce triomphe lui fera un immense bien, et ce, à tout point de vue. Seul petit point pour la suite des choses cependant : j'aimerais tellement qu'elle varie un peu plus en fond de terrain avec une combinaison de frappes longues ET en angle pour sortir l'adversaire du terrain. Il faut aussi que Françoise se fasse confiance avec la volée brossée pour finir le point sinon elle s'embarque dans des échanges interminables. Fatiguant de devoir gagner le même point deux ou trois fois parce que tu n'arrives pas à trancher lorsque la situation se présente.

Fort d'une avance de 2-0, le Canada n'a qu'un point à aller chercher pour assurer la victoire et comme le veut le règlement les deux meilleures de chaque pays ouvrent le bal lors du dernier jour. Petite note en passant, si vous avez des billets pour un match mettant en vedette Bianca Andreescu, n'arrivez pas en retard, car cette jeune dame est très pressée d'en finir. Comme on dit en bon québécois : pas de niaisage avec Bianca. En 8 minutes elle mène déjà 3-0 avec deux bris devant Arantxa Rus qui ne sait pas par quel bout commencer pour faire sa place sur le terrain.

Comme cela lui arrive lorsque sa domination est extravagante, « BBB » surjoue et éparpille un tantinet soit peu. À 3-1, elle s'offre 3 balles de bris, mais n'en profite pas. Rus récolte donc sans avoir semé pour recoller à 3-3. Bianca se fait une petite frousse, mais la bonne nouvelle c'est qu'elle délaisse ses airs d'ado et retrouve plutôt la concentration d'une guerrière au sang chaud. La Canadienne reconnecte avec la constance et nous prouve qu'elle n'est pas seulement une grosse cogneuse. Elle peut varier en déposant des touches, y aller de balles coupées, de balles bombées, tout en nous démontrant qu'elle comprend si bien la géométrie du court. Comme elle bouge si bien et sait aussi se défendre, cela fait d'elle une joueuse complète. Quand on écoute les spécialistes parler pour définir le tennis moderne d'aujourd'hui on revient toujours sur le fait qu'il faut savoir gagner du temps avec des prises de balles en avant du corps et posséder des ancrages, des appuis plus rapides et plus vifs. C'est exactement ce que « BBB » fait pour étourdir la compétition et c'est aussi pour cela qu'elle ira loin.

Après le gain du premier set 6-4, l'adversaire flotte dans le néant. La seule chose que Rus essaie de faire pour rester vivante, c'est frapper encore plus fort. Non, mais, pas tellement brillant comme choix. Je suis certaine que ce n'est pas ce que le capitaine Paul Haarhuis lui dit de faire. Vous voyez, Miss Andreescu est tellement forte qu'elle amène aussi son adversaire à la déprime. Une heure 9 minutes plus tard, le Canada mène 3-0 et s'assure donc du triomphe. J'ai bien aimé les commentaires de Bianca lorsqu'à chaud on lui demande jusqu'où le Canada peut aller. Du tac au tac elle répond  : « Mais jusqu'au bout voyons! » Tout comme elle avait mentionné aux journalistes qui l'attendaient à l'aéroport Pearson de Toronto en revenant de l'Australie fin janvier quels étaient ses objectifs. Sans perdre une seconde pour y penser, elle souligne qu'elle rêve depuis toujours d'être no 1 au monde. Je trouve cela formidable qu'elle ne place aucune limite sur son talent. Quand tu vises aussi haut, cela est possible que tu te trompes un petit peu, mais fort probablement que tu iras où très peu de gens sont allés, là où l'air est rare, au sommet de la pyramide.
 
Après cette fin de semaine de rêve, le Canada disputera maintenant un match de barrage en vue de faire partie du Groupe mondial I en 2020. Nos ados ont donné le ton en Coupe Davis et voilà Bianca et compagnie qui surfent la vague à leur tour. Excitant tout cela...Que de belles et grandes choses se profilent à l'horizon surtout si nos leaders restent en santé... Oh yeah!