Décidément, elle n'a pas froid aux yeux Sofia Kenin, alors qu'elle a surmonté avec bravoure tous les obstacles sur sa route pour remporter, à 21 ans, un premier titre Grand Chelem en carrière à Melbourne. Ce qui m'épate le plus, c'est l'assurance que l'Américaine déploie en début de 2e set face à Garbine Muguruza samedi en ronde ultime pour renverser une situation mal embarquée. C'est un peu normal que l'Américaine soit nerveuse et fébrile puisque l'Espagnole possède beaucoup plus d'expérience des grands moments alors qu'elle dispute une quatrième finale Grand Chelem et qu'à deux reprises elle a triomphé: à Roland Garros en 2016 face à Serena et Wimbledon l'année d'après en dominant Venus.

Logiquement, Muguruza est souvent la première à prendre l'initiative du jeu au premier set. Plus dominante au service, elle attaque sur le deuxième coup de raquette sur une base régulière. Bien affutée en retours, Garbine va aussi chercher deux bris de service pour conclure 6-4. Les deux manches suivantes seront cependant différentes pour deux raisons : d'abord parce que Muguruza commence à souffrir physiquement et aussi parce que Kenin change sa stratégie pour jouer de façon beaucoup plus offensive. Pendant que l'Espagnole connait bien des ennuis à éviter les bourdes au service, Kenin refuse de jouer les seconds rôles et accumule plutôt les bris de service. Je me souviens d'ailleurs des commentaires de son premier coach Rick Macci, qui a aussi formé Jennifer Capriati et les soeurs Williams, qui disait que Kenin n'est peut-être pas la plus puissante, mais que JAMAIS elle n'abandonne. Ce que je remarque aussi c'est que Kenin dispute tous les moments comme si sa vie en dépendait. Pour éviter de se faire brasser la cage, elle attaque de toutes les positions, et ce avec une telle justesse! Cela lui fait également prendre une autre dimension! Je ne suis donc pas étonnée que Kenin remporte ce premier grand titre et qu'en même temps se fasse une place jusqu'au 7e rang. Sa combativité et facilité à résoudre les problèmes au coeur de la compétition font d'elle une joueuse de grand calibre qui va continuer de s'améliorer et de grimper au classement.

Pour ce qui est de la finaliste, ces deux dernières années et demie ont été plus difficiles puisqu'elle passe de la première place mondiale à la 36e. Son périple tout en haut de la pyramide laisse des marques alors que la pression l'empêche de jouer libérée et carrément d'apprécier sa vie sur le circuit. Mais depuis le début de l'année, Garbine recommence à gagner alors que l'ancienne championne et bonne amie Conchita Martinez est de retour à ses côtés. Les résultats sont probants puisque Conchita lui offre une perspective très positive de son jeu tout en gardant les plans de matches simples. Pour avoir du succès, Garbine se doit d'attaquer, de provoquer l'adversaire et d'utiliser sa première balle de service pour déstabiliser et garder la fille devant sur le qui-vive. 

C'est donc avec de bonnes intentions que Garbine entame le tournoi et ce malgré un virus qui lui bouffe beaucoup d'énergie. Elle se bat au meilleur de ses compétences lors de ses deux premiers matchs, mais sans convaincre. Muguruza s'extirpe de ses deux premiers matchs en perdant à chaque fois un set soit face à Shelby Rogers et puis Ajla Tomljanovic. Mais à partir du troisième tour son jeu d'attaque se pose alors qu'elle survole ses rencontres face à la combative 5e favorite Elina Svitolina, la 9e Kiki Bertens, la coriace Russe Anastasia Pavlyuchenkova et la grande combattante Simona Halep. Tout ce beau monde se voit indiquer la porte de sortie en deux manches consécutives. L'ancienne numéro 1 mondiale est de retour et se bat farouchement à chaque point tout en gardant sous contrôle ses émotions. Supportée par une championne, elle redevient championne jusqu'à temps qu'elle soit emportée par le brio de Kenin.

Je vous avoue que je trouve aussi remarquable que durant la quinzaine, Kenin sorte en demie la numéro 1 mondiale Ashley Barty malgré deux balles de manche dans chacun des sets contre elle et qu'elle dispose aussi de la pétaradante Coco Gauff qui avait triomphé de Venus et Naomi Osaka, championne en titre. Pas banal du tout... Oui preuve est faite, après Bianca Andreescu à New York, une autre étoile est née...