MONTRÉAL – Tennis Canada a annoncé jeudi son intention d'appuyer la WTA dans ses démarches afin de retrouver la joueuse de tennis chinoise Peng Shuai, portée disparue depuis deux semaines.

« À l'instar de tous les acteurs du monde du tennis, Tennis Canada est profondément préoccupée par la santé, la sécurité et le bien-être de Peng Shuai, pouvait-on lire dans un communiqué transmis sur le compte Twitter de l'organisation. Il est prioritaire d'obtenir une preuve indépendante et indiscutable qu'elle est en sécurité. »

Cette déclaration a été diffusée quelques heures après qu'un courriel attribué à Peng et qui aurait été reçu par une chaîne d'État chinoise avant d'être retransmis sur le réseau social Twitter a fait grimper l'inquiétude d'un cran au sujet de sa sécurité, tandis que plusieurs joueurs et dirigeants influents du sport veulent être rassurés quant à sa santé et sa localisation.

Et jusqu'ici, c'est le silence radio.

Les hauts dirigeants chinois n'ont toujours rien dit publiquement depuis que des accusations ont été lancées il y a deux semaines par la détentrice de deux titres du Grand Chelem en double, qui a allégué avoir été agressée sexuellement par un ex-haut dirigeant du Parti communiste chinois.

Le premier cas dans la lignée #MeToo à éclabousser le gouvernement chinois n'a pas été rapporté dans les médias du pays, et les discussions portant sur ce sujet sur internet ont été essentiellement censurées.

Steve Simon, le président et directeur des opérations de la WTA, a remis en doute l'authenticité du courriel qui lui était destiné, dans lequel Peng réfute ses propres allégations et assure être en sécurité. Le message a été publié jeudi par CGTV, l'antenne internationale de la chaîne d'État chinoise CCTV.

« J'ai beaucoup de difficulté à croire que Peng Shuai ait écrit le courriel que nous avons reçu, et à croire les propos qu'on lui attribue », a écrit Simon.

Le message, a-t-il ajouté, « fait seulement grimper mon inquiétude au sujet de sa santé et de sa sécurité ».

Simon a donc demandé qu'une enquête soit déclenchée, et la WTA a souligné qu'elle était prête à annuler tous ses tournois en Chine si le pays ne prend pas les mesures nécessaires pour le rassurer.

« Tennis Canada offre tout son soutien à Steve Simon et à la WTA. (...) Il est impératif que Peng Shuai puisse s'exprimer librement, sans censure, et que son allégation fasse l'objet d'une enquête approfondie et transparente », a ajouté Tennis Canada.

La veille, la joueuse de tennis étoile Naomi Osaka a déclaré qu'elle est abasourdie d'apprendre qu'une collègue est silencieuse depuis qu'elle a formulé des allégations d'agression sexuelle contre un ex-haut dirigeant communiste chinois.

L'ex-no 1 mondiale, détentrice de quatre titres du Grand Chelem, a publié un message sur les réseaux sociaux mercredi pour relancer la recherche : où est Peng Shuai?

Dans sa publication sur Twitter mercredi – sous le mot-clic « WhereIsPengShuai » – Osaka a écrit : « J'ignore si vous avez suivi les nouvelles dernièrement, mais j'ai récemment été informée qu'une joueuse de tennis a disparu peu de temps après avoir révélé qu'elle avait été agressée sexuellement. La censure n'est jamais acceptable, peu importe les circonstances. »

La Japonaise âgée de 24 ans, qui n'a pas disputé de rencontre sur le circuit de la WTA depuis sa défaite contre la Québécoise Leylah Annie Fernandez aux Internationaux des États-Unis en septembre, a dit qu'elle espère que Peng et sa famille « sont en sécurité ».

« Je suis abasourdie par la situation actuelle, a-t-elle mentionné, et je suis de tout coeur avec elle. »

D'autres joueurs étoiles se sont aussi exprimés, dont le no 1 mondial Novak Djokovic, et les dirigeants des circuits professionnels masculin et féminin ont déjà exigé une enquête portant sur les allégations formulées par la détentrice de deux titres du Grand Chelem en double.

Dans un long message publié sur les réseaux sociaux qui est rapidement disparu, Peng a écrit que Zhang Gaoli, un ex-vice-premier ministre et membre du puissant bureau politique du Parti communiste, l'avait forcée à avoir une relation sexuelle avec lui malgré ses nombreux refus, à la suite d'un match de tennis tenu il y a trois ans. Elle a ajouté qu'ils avaient également eu une relation sexuelle il y a sept ans, et qu'elle avait ensuite développé des sentiments pour lui.

Peng est une ex-no 1 mondiale de double – elle a décroché 23 titres de double sur le circuit de la WTA, dont ceux à Wimbledon en 2013 et aux Internationaux de France en 2014.

L'Associated Press n'a pas pu vérifier l'authenticité du message, qui a été publié en soirée mardi de son compte officiel Weibo, une plateforme de réseau social phare en Chine. La publication a rapidement été effacée, et une recherche du compte de Peng sur Weibo n'a ensuite donné aucun résultat. Ni elle, ni Zhang n'ont pu être rejoints afin d'obtenir des commentaires.

Il s'agit des premières allégations contre un influent politicien chinois depuis le début de la vague #MeToo en Chine en 2018, un mouvement qui a rapidement été muselé par les autorités au cours de la même année.

Zhang a pris sa retraite en 2018 et est disparu de la scène publique, comme bien des politiciens chinois après la fin de leur carrière.

Peng n'a pas joué sur le circuit de la WTA depuis l'Omnium du Qatar en février 2020. En simple, elle a atteint le carré d'as des Internationaux des États-Unis en 2014 et les huitièmes de finale aux Internationaux d'Australie en 2015. Elle n'a jamais franchi le troisième tour d'un tournoi majeur depuis Wimbledon en 2017.