Quand les temps sont difficiles, il faut se creuser les méninges pour être (ou devenir) créatif. Déjà, quelques initiatives ont vu le jour avec le tournoi virtuel de Madrid gagné par Andy Murray et Kiki Bertens et aussi des compétitions nationales en Allemagne, en Autriche, en Grande-Bretagne et en France. Un grand homme a déjà dit qu'il ne fallait pas mépriser le jour des petits commencements. En bout de ligne, l'important c'est que la machine se mette en branle en espérant que les joueurs seront disciplinés pour continuer de suivre les consignes de base. 

Ce début de déconfinement progressif est une bonne chose pour les compétiteurs comme Félix Auger- Aliassime. Notre jeune est à Montréal depuis l'annulation du tournoi d'Indian Wells et n'avait pas accès à un court de tennis pour garder ses sensations ou même travailler certains aspects de son jeu. Pendant ce temps en Europe, la situation est tout autre pour ceux (Medvedev, Pouille) qui ont les moyens de louer une maison dans le Sud qui offre un terrain privé. La bonne nouvelle, c'est que Félix quitte pour Monaco le 10 mai puisque dès le lendemain il pourra s'entrainer au Monte Carlo Country Club et même participer à quelques matchs à l'académie de Thierry Ascione et celle de Patrick Mouratoglou. 

Le coach de Serena a toujours vu les choses en grand et cela se reflète dans la beauté de son académie. As du marketing, il est beaucoup plus qu'un coach alors qu'il partage sa science et vision du jeu aux 4 coins de la planète sur différents réseaux de télévision. Comme la crise sanitaire sera forcément suivie d'une crise économique Patrick en a profité pour mettre sur pied l'« Ultimate Tennis Showdown ». Il s'agit d'une nouvelle formule qui comprend hommes et femmes et qui se joue sur 5 week-ends pour un total de 50 matchs à huit clos. Mouratoglou veut aussi que le code de conduite soit plus léger (il s'ennuie des Connors et McEnroe) et qu'il y ait des interactions avec les entraîneurs aux changements de côté. Il semble également que selon ses dires, les télévisions internationales soient intéressées par le projet. 

J'ai aussi beaucoup aimé l'idée de nos trois cadors alors que Djokovic, Nadal et Federer ont mis sur pied un fond pour venir en aide aux compétiteurs classé entre la 250e et la 700e place. Pour certains, si les problèmes liés à la pandémie persistent, cela peut vouloir dire une fin de carrière. Donc on a établi une échelle de grandeur liée au classement. Par exemple les 5 meilleurs offriront 30 000 $ chacun à la cagnotte et ainsi de suite alors que les 50e à la 100e places donneront 5 000 $. Les joueurs de double du top-20 aussi y participeront ainsi que les 4 Grands Chelems. Il semblerait que le fond se chiffre en ce jour à 6 millions $. En passant, le seul haut classé qui s'est exprimé contre cette idée est Dominic Thiem. « Je vois comment ils se comportent et plusieurs manquent de sérieux et ne sont pas dédiés pleinement à leur carrière », nous a-t-il dit. Il faut dire que l'Autrichien est un des plus grands travaillants sur le circuit, donc je m'imagine que c'est difficile pour lui d'avoir du respect pour ceux, qui selon sa perspective, lève le pied tout en se permettant quelques soirées de douce folie.

Plus près de chez nous, Tennis Canada a procédé à des coupures de 70 % de ses cadres permanents ce qui veut dire que certains entraineurs comme Frédéric Niemeyer et Simon Larose perdent leur emploi. Auger-Aliassime doit aussi pleinement prendre en charge ses 4 coachs, soit Guillaume Marx et Frédéric Fontang pour le tennis, Nicolas Pérotte pour l'entraînement physique, sans oublier le rôle fort important du physio Andreas Vial. Joyeux trou dans le compte en banque pour un jeune homme de 19 ans. Peu importe, je vois d'un bon oeil qu'il vole de ses propres ailes. L'autonomie et la liberté ont un prix. La maman sait qu'elle doit pousser son petit hors du nid. Que de panique sur le coup mais sur le moyen et long terme, c'est pour son bien, sa survie. Je comprends aussi pourquoi Félix a des fourmis dans les jambes et a tellement hâte de retrouver ses repères sur le terrain. 

Pendant ce temps les organisateurs de Roland-Garros font savoir qu'ils repoussaient d'une semaine leur tournoi qui sera, on l'espère, disputé à compter du 27 septembre 2020. Apparemment, 82 % des revenus de la Fédération française de tennis provient des recettes de leur Grand Chelem. On parle ici d'un profit de 250 millions d'euros par tournoi. Si jamais il n'a pas lieu cette saison, la FFT a des réserves sous la forme de deux exercices comptables. Plus près de chez nous à New York, les dirigeants de l'US Open ont beau nous dire que pour l'instant le tournoi est toujours prévu du 24 août au 13 septembre, mais je crois qu'il s'agit plutôt d'un voeu pieux.

Comment peut-on jouer au tennis alors que le gouverneur de l'État Andrew Cuomo nous annonce que 299 personnes ont perdu la vie hier et qu'à chaque jour 1 000 nouveaux cas sont comptabilisés? Certes, c'est bien mieux que les 6 000 cas par jour au début du mois d'avril, mais c'est encore beaucoup de malades et de morts. Oui, M. Cuomo veut réouvrir New York puisque d'autres statistiques sont alarmantes soit celles de maladies mentales et de violences conjugales liées au manque d'argent mais il se doit d'être prudent...

Je vous offre maintenant deux dernières pensées concernant deux fleurons canadiens. Allons-y d'abord avec Grant Connell, qui est âgé aujourd'hui de 54 ans et qui vend de l'immobilier à Vancouver depuis une dizaine d'années. Je vous rappelle qu'il s'est hissé jusqu'à la 1re place mondiale en double en 1993 et qu'il a remporté 20 titres en plus de faire trois finales à Wimbledon et une à Melbourne. Marié et père de cinq enfants, il faisait son jogging habituel le 19 février dernier alors qu'il a souffert d'un accident vasculaire cérébral. Grant va mieux alors qu'il a retrouvé presqu'entièrement la vue mais il demeure en chaise roulante puisqu'il est toujours paralysé du côté gauche. Je suis allée aux nouvelles et l'ancien joueur Robert Bettauer me confirme que les pronostics sont bons et qu'il devrait retrouver pleinement la santé. Ouf, est-ce que l'on se plaint pour rien nous?

L'autre nouvelle concerne notre jeune championne de Roland-Garros junior qui est sur une lancée incroyable depuis le début de l'année. Leylah Fernandez est mise en nomination pour recevoir le « Heart Award » pour avoir si bien représenté son pays en Fed Cup. Je vous rappelle qu'elle a battu la 5e mondiale Belinda Bencic. Cet honneur met en valeur son courage, son excellence, son esprit d'équipe et aussi la formidable qualité de son jeu. Vous voulez qu'elle gagne? Allez voter en cliquant ici; vous avez jusqu'au 8 mai pour le faire. Il faudra aussi voter dans d'autres catégories mais peu importe, ce qui compte c'est que Fernandez soit appuyée, elle le mérite.  

En terminant voici : apprenons à apprécier ce que nous avons, avant que le temps ou les circonstances nous obligent à apprécier ce que nous avions... Allez, on reste motivé, on ne lâche pas!