MONTRÉAL – En dépit de ses records sur le terrain, Anthony Calvillo ne s’est pas encore imposé dans un rôle d’entraîneur. Avec les Alouettes de Montréal, il a dû effectuer un atterrissage de force dans cette fonction et ce n’est pas pour rien qu’il avait souhaité rejoindre Marc Trestman, à Toronto, la saison dernière.

 

« Je l’ai toujours vu comme ce génie du football, mais j’ai aimé voir qu’il obtenait beaucoup d’informations autant des joueurs que des entraîneurs que ce soit pour avoir le pouls de l’équipe ou pour préparer ses plans de match. Chose certaine, je devrai m’améliorer avec les messages texte, je suis le pire pour ça! », a commenté Calvillo à propos du mentor qui a donné un autre souffle à sa carrière.

 

Peu de temps avant de quitter les Alouettes, Calvillo ressentait une certaine amertume envers ce métier sur les lignes de côté. Il ne parvenait pas à obtenir ce qu’il désirait des athlètes à sa disposition et il était en quête de solutions.

 

Lorsqu’on le questionne sur la déception qu’il aurait vécue dans l’univers professionnel du coaching, Calvillo ne cherche pas une porte de sortie. 

 

« Voilà ce que j’ai appris de Jacques Chapdelaine (qui a été son patron avec les Alouettes). Je dois être capable de voir les jeux via les yeux de mes joueurs. Quand j’ai commencé ma carrière, je voyais le jeu d’une façon et j’ai évolué ce qui a rendu les choses nettement plus faciles, mais ça ne s’est pas produit en une journée.

 

« Quand tu travailles avec de jeunes quarts, tu dois être en mesure de comprendre ce qu’ils voient pour ne pas leur en demander trop. Ça pouvait m’arriver de mal expliquer ou d’en demander trop. Je dois être plus patient et bien saisir ce qu’ils peuvent voir. Ça permet de modifier l’approche et de ne pas simplement utiliser les mêmes stratégies qui ont fonctionné dans le passé. La même approche ne convient pas à tout le monde et c’était un gros apprentissage pour moi », a-t-il reconnu.

 

Calvillo ne peut surtout pas être blâmé pour tout ce qui s’est produit avec les Alouettes. Il a été placé dans des situations inconfortables pour un entraîneur avec une expérience minime.

 

« J’ai commencé en dirigeant les receveurs et, dans la même année, j’ai hérité des quarts et d’une implication comme coordonnateur offensif. L’équipe avait une grande confiance en moi en raison de ma grande expérience. J’ai toujours été reconnaissant même pour cette deuxième année comme coordonnateur offensif. Mais, peu importe ta longévité sur le terrain, ça ne te prépare pas pour le poste d’entraîneur. Il y a tellement de détails dans la protection, je n’en savais pas assez. Maintenant, j’ai quatre ans d’expérience, je suis plus à l’aise avec les petits détails de la course et la protection », a détaillé Calvillo qui n’essuie plus de critiques pour sa carrière de joueur depuis que les déboires des Alouettes persistent.

 

Calvillo a choisi de ne pas en vouloir aux Alouettes qui n’ont pas facilité sa transition vers ce milieu très exigeant.

 

Anthony Calvillo« Ils étaient confiants que je puisse y arriver et c’était la même chose de mon côté. En fin de compte, il y avait plusieurs choses que je ne connaissais pas. Je remercie encore Jim Popp pour cette chance et pour avoir cru en moi, mais je n’ai pas réussi à accomplir le travail. J’ai quand même appris énormément et je vais continuer de le faire. C’est à l’image de ma carrière, j’ai eu besoin de temps pour trouver mon élan », a-t-il poursuivi.

 

Danny Maciocia, son nouveau patron, aurait eu le goût d’en dire davantage sur la gestion accomplie par les Alouettes, mais il a préféré se tourner la langue.

 

« J’ai une opinion là-dessus et je vais la garder pour moi. Pour avoir du succès, il faut de la stabilité et partager la même vision », s’est-il limité à dire.

 

Dans un monde idéal, Calvillo aurait rebondi en force avec les Argonauts, mais la perte de Ricky Ray a bousillé les plans. Ses successeurs, James Franklin et McLeod Bethel-Thompson, ont confronté Calvillo à la réalité du football.

 

« Les entraîneurs disent toujours que ça prend un bon quart-arrière pour avoir une chance », a noté Calvillo qui se concentre sur l’apprentissage obtenu à Toronto.

 

Un peu stressant de jouer sous le regard de Calvillo

 

Le niveau de nervosité risque de grimper bien haut lorsque les quarts-arrières des Carabins de l’Université de Montréal devront lancer leurs premiers ballons sous le regard attentif d’Anthony Calvillo.

 

La question fait sourire Danny Maciocia, l’entraîneur des Carabins, qui est parvenu à attirer Calvillo dans son giron.

 

« Probablement! Et je dirais que ce sera le cas pour quelques entraîneurs aussi. De mon côté, j’ai l’avantage de le connaître depuis 1998. J’aime beaucoup la personne et quand les gens vont le connaître un peu plus, je peux vous dire qu’ils vont l’apprécier énormément. Il arrive bien sûr avec son bagage de football, mais ils vont découvrir la personne », a répondu Maciocia.

 

Comme il le fait si souvent, Calvillo a plutôt choisi de répondre avec humilité.

 

« Je ne sais pas (s’ils vont être nerveux), mais avec le temps, ils vont comprendre que je suis là pour les aider et que je suis bien normal, tout comme eux. Je vais passer énormément de temps avec eux, tu es un entraîneur et ce que tu as fait avant n’importe pas. »

 

Fait intéressant, Maciocia ne prévoit pas uniquement un impact sur ses joueurs. Il est persuadé que Calvillo influencera aussi ses collègues.

 

« Oui, il s’en vient s’occuper des quarts, mais il sera également un mentor pour tous nos entraîneurs et en particulier Gab (Gabriel Cousineau, le coordonnateur offensif). C’est important, je me rappelle quand j’ai commencé avec les Alouettes en côtoyant les Rod Rust, Jacques Dussault et Charlie Taaffe. Ce sont des personnes qui ont eu un grand impact sur ma vie professionnelle et personnelle. AC pourra avoir le même genre d’impact sur nos entraîneurs, on est tous gagnants dans ça », a soulevé Maciocia qui tient à être défié par Calvillo afin de trouver les meilleures approches.

 

Ses connaissances sont immenses, mais Calvillo n’arrive pas sur ce côté de la colline montréalaise avec la grosse tête. Il reconnaît qu’il devra s’accoutumer au football universitaire canadien qu’il suit un peu plus depuis quelques années.

 

Avant de parfaire son apprentissage de ce milieu, Calvillo peut savourer l’élément de fierté rattaché à cette annonce. L’exploit n’est pas banal. L’ancien numéro 13 est devenu entraîneur au niveau universitaire alors qu’il a grandi dans un milieu défavorisé qui a même mené son frère en prison.Anthony Calvillo et Danny Maciocia

 

« Tous les entraîneurs qui nous aidaient dans ma jeunesse le faisaient bénévolement. Ils investissaient du temps avec nous malgré leurs responsabilités avec leur famille et leur travail. Ils le faisaient pour nous enseigner des choses et ça m’a toujours frappé. Quand j’y ai repensé plus tard, j’ai réalisé à quel point ce fut immense pour moi. Voilà pourquoi je souhaite faire la même chose. Les Carabins me procurent cette chance », a convenu Calvillo.

 

Maciocia se dit persuadé que ses joueurs vont bénéficier des expériences personnelles – et professionnelles évidemment – de Calvillo. En tant que bon gestionnaire, le pilote des Carabins a tout de même sondé quelques sources fiables pour connaître leur avis sur son potentiel comme entraîneur.

 

« Anthony ne le sait pas, mais j’ai appelé Noel Thorpe, Ricky Ray et Kevin Glenn qui ont tous vu Calvillo agir comme entraîneur. Je n’ai pas coaché avec lui, mais Noel oui. Je n’ai jamais vu Calvillo diriger des quarts, mais Ray l’a vécu et Glenn aussi. Ça me donnait trois perspectives différentes avec une réponse unanime : si tu as la chance d’aller le chercher, je te suggère fortement de le faire », a précisé Maciocia.

 

Quant à ceux qui croient que Calvillo effectue un pas de recul en choisissant l’avenue universitaire, Maciocia répond ainsi.

 

« Je ne vois pas ça de cette façon, au contraire. Quand tu regardes les succès de Dave Dickenson, il a passé plusieurs années sous John Hufnagel. Jason Maas a fait la même chose avec Scott Milanovich. Quant à Milanovich, c’était avec Marc Trestman. En trois ans à Montréal, Calvillo a travaillé pour quatre entraîneurs, c’est difficile. Il va vivre quelque chose de bien différent, il pourra s’établir et avoir un mot à dire dans nos succès. S’il veut retourner au niveau professionnel, il va se placer dans une situation dans laquelle il pourra avoir du succès en étant entouré de gens qui peuvent l’aider », a témoigné Maciocia qui donne le goût de lire entre les lignes.

 

L’effet de Calvillo devrait se produire à court, moyen et long termes. Sans surprise, les Carabins souhaitent que ça devienne le petit plus recherché pour dominer la scène canadienne.

 

« Ça peut nous aider, ça ne peut pas nuire. Mais ça prend un effort complet de tout le monde. On ajoute une personne avec un bagage très intéressant qui peut avoir un impact sur le recrutement, sur les quarts et sur les entraîneurs. On espère que ça nous aidera à savourer les grands honneurs », a conclu Maciocia.