MONTRÉAL – Il est très rare que vous entendiez parler de Louis-Philippe Bourassa et Nicholas Narbonne Bourque des Carabins. C’est toutefois une excellente nouvelle pour eux.

Ces deux joueurs n’ont pas le droit à l’erreur. Pourquoi? Parce qu’ils ont des rôles extrêmement importants sur les unités spéciales.

Bourassa, qui en est à sa troisième et dernière saison à l’Université de Montréal, est le spécialiste des longues remises tant sur les bottés de dégagement que sur les placements. En 32 matchs en carrière, il n’a pas raté une seule remise, information corroborée par son entraîneur-chef, Danny Maciocia.

« Je vais cogner du bois et je compte que ça reste comme ça d’ici à la fin de l’année », a souhaité l’étudiant-athlète de 24 ans en donnant un petit coup avec ses jointures sur la table de la cafétéria du CEPSUM où l’entretien avec le RDS.ca s’est déroulé la semaine dernière.

« C’est un peu ironique, mais le moins on entend parler de moi, le plus content je suis. Cela veut dire que je fais bien mon travail », a indiqué Bourassa qui s’est développé en joueur de football sur le tard au Cégep de Trois-Rivières.

Narbonne Bourque est pour sa part celui qu’on appelle le « quart-arrière » sur les dégagements. Celui qui est aussi le centre-arrière partant en attaque s’occupe de diriger la protection selon ce que l’équipe adverse montre en plus de gérer l’horloge.

« On essaie d’en faire le moins possible, a mentionné Narbonne Bourque en parlant des erreurs. Le foot, c’est un peu ça. C’est un sport d’erreurs et c’est lorsque tu en commets que tu te fais remarquer. Notre marge d’erreur aux positions où l’on évolue est mince. Si tu fais une erreur sur un dégagement, c’est un jeu qui peut te coûter un match. »

Le travail des deux hommes est donc directement lié sur les dégagements pour faire en sorte que Félix Ménard-Brière soit dans les meilleures conditions pour effectuer ses bottés.

« C’est un gars qui doit communiquer ses directives, a décrit Bourassa en parlant de celui qui l’avait pris sous son aile à son arrivée avec les Bleus. C’est un job important. Il n’est pas stressé. Il est vraiment calme et il évalue bien les situations. C’est le bon gars pour l’emploi. »

À son tour, Narbonne Bourque n’a pas tari d’éloges envers son coéquipier.

« LP est patient et il me permet de prendre mon temps. Je ne suis pas inquiet et je peux parler pour donner mes directives sans penser au fait qu’il va peut-être remettre le ballon en jeu parce qu’il est stressé. On se fait confiance et on sait que l’autre va bien faire le travail », a fait savoir le finissant de cinquième année qui n'a jamais raté une rencontre avec les Carabins.

Puisque le football est un sport d’équipe, les deux jeunes hommes prennent aussi la peine de rappeler qu’il s’agit d’un travail en unité de 12... et qu’il bénéficie d’un excellent botteur. D’ailleurs, Ménard-Brière a maintenu la meilleure moyenne au Canada sur les dégagements avec 42,4 verges par botté ce qui est attribuable à sa puissante jambe, mais aussi à l’unité de couverture.

Un talent découvert grâce à une blessure

Nicholas Narbonne Bourque a commencé à jouer au football à l’âge de 7 ans et il a souvent eu un rôle très important sur les unités spéciales. Après son passage avec les Spartiates du Vieux Montréal, Danny Maciocia lui a confié les mêmes responsabilités avec les Carabins et le diplômé en communication politique n’a pas déçu.

Bourassa, qui était un ailier rapproché au niveau collégial, a pour sa part découvert sa vocation comme spécialiste des longues remises un peu par erreur lors de sa première saison avec les Diablos.

« C’est bête, mais je me suis fait une entorse à un match contre John Abbott et la semaine suivante, je devais porter une botte Samson. Pendant l’échauffement, je niaisais avec d’autres gars blessés et j’ai juste commencé à faire des longues remises. Les gars me disaient que j’étais quasiment meilleur que le gars qui s’en occupait. La semaine suivante, quand je suis revenu au jeu, j’ai commencé à les faire et c’est parti de là », a raconté celui qui n’avait pas d’attente après sa carrière collégiale.

C’est principalement pour ses qualités comme ailier rapproché qu’il a été recruté par les Bleus qui utilisent beaucoup de formations de course avec un joueur à cette position. Avec le temps, il s’est également converti en centre-arrière devenant ainsi le remplaçant de celui qui lui dicte le compte lorsqu’il doit effectuer une remise sur les dégagements.

Lorsqu’il est débarqué à l’UdeM en 2014, on lui a alors demandé s’il savait comment faire des longues remises. Bourassa a évidemment répondu à l’affirmative et il est ainsi devenu le réserviste à ce poste névralgique sur les unités spéciales, ce qui lui a permis d’être en uniforme dès le premier match de la saison.

L’Université de Montréal comptait déjà sur un excellent joueur à cette position qui, en plus, avait été repêché dans la LCF le printemps précédent en raison de cela : Mathieu Girard. Si sa position de spécialiste des longues remises lui a été révélée par une blessure, c’est celle à Girard qui lui a permis de voir du terrain dès la deuxième rencontre du calendrier régulier.

Lors du revers de 40-13 face au Rouge et Or en septembre 2014, celui qui évolue maintenant avec les Tiger-Cats de Hamilton s’est blessé à un pouce, si bien qu’il ne pouvait plus s’occuper des longues remises.

Bourassa l’a donc remplacé et c’est lui qui a remis le ballon au botteur ou au teneur depuis ce temps.

« Quand il a pris la place de Mathieu (Girard), on a remarqué tout de suite que c’était un bon spécialiste des longues remises, s’est souvenu Narbonne Bourque. Au fur et à mesure que l’année avançait, il s’entraînait avec Mathieu qui lui donnait des trucs. On voyait qu’il était bon. On ne s’est jamais vraiment posé de question. »

Dès sa saison recrue, Bourassa a été mis à l’épreuve avec plusieurs moments importants dans le parcours des Carabins jusqu’à la Coupe Vanier. Sa remise pour le placement qui allait éventuellement donner la victoire aux Bleus en fin de quatrième quart de la finale canadienne face aux Marauders est évidemment gravée dans sa mémoire.

« La semaine suivante, quand j’ai regardé le match, je me demandais comment j’ai fait pour ne pas être stressé. C’était un botté important avec plus de 20 000 personnes dans le stade. Mais en général, ce dont je suis le plus fier, c’est de ne pas avoir manqué une remise dans ma carrière », a convenu Bourassa qui est originaire de Shawinigan.

« À sa saison recrue, nous avons eu besoin d’aller chercher des placements importants, que ce soit en prolongation à Québec lors de la Coupe Dunsmore ou à la Coupe Vanier. Il avait une tonne de responsabilités sur ses épaules et il a produit », s’est remémoré Maciocia.

De l’avenir chez les pros?

Les unités spéciales sont la porte d’entrée de la LCF pour les joueurs canadiens.

Bourassa tentera de suivre les traces de Pierre-Luc Caron. Ce dernier, qui occupait le poste de spécialiste des longues remises avec le Rouge et Or, a été repêché au printemps dernier et est maintenant partant avec les Stampeders de Calgary.

« Rien n’est impossible. Je me suis rendu compte au fil des années que j’étais bon à cette position. Je ne dirai jamais non (si on m’offre) de continuer ma carrière de football, surtout si en plus c’est au niveau professionnel. Comme n’importe quel enfant (qui commence ce sport), j’y rêve », a exprimé celui qui a réussi 5,5 plaqués depuis le début de la saison.

Narbonne Bourque, qui excelle aussi à la position de centre-arrière, entretient aussi l’espoir d’avoir sa chance dans la LCF après son stage universitaire.

« Tu travailles toute ta vie pour jouer au foot et exceller. Toucher les pros, c’est arrivé au but ultime, un peu comme une coupe Vanier. Si ça ne m’allumait pas, ce ne serait pas normal. Si j’ai une chance d’y aller après mes cinq années universitaires, c’est sûr que j’y vais. Je vais aller voir ce que c'est et je vais tout donner comme je l’ai fait à chaque niveau », a affirmé celui qui est un leader chez les Carabins.

« Les dépisteurs qui voient nos matchs, ici ou en vidéo, savent qui sont ces deux joueurs. Ça va dépendre de leurs besoins. S’il y a de la place, je crois que ce sont des noms qu’ils doivent considérer fortement », a suggéré Maciocia qui a déjà été entraîneur-chef et directeur général avec les Eskimos d’Edmonton.

Avant de penser à leur avenir, le travail de Louis-Philippe Bourassa et Nicholas Narbonne Bourque sera d’autant plus important sur les unités spéciales maintenant que les Bleus sont en éliminatoires. Ils vont tout faire pour qu’on ne mentionne pas leur nom au cours du mois de novembre, le signe le plus probant de leur efficacité.