Par Éric Leblanc - Éric Gagné a pris le monde du sport par surprise en optant pour les Capitales de Québec afin d'effectuer sa route de retour vers le baseball majeur, mais il affiche une belle confiance et une ouverture d'esprit intéressante face à ce nouveau défi.

Les dernières années ont été éprouvantes pour le lanceur québécois qui a été ennuyé par de nombreuses blessures. Gagné a donc décidé de renoncer à son rôle de releveur pour revenir dans les majeures en tant que partant ce qui lui permettra d'épargner son corps et surtout son épaule droite.

«Mon épaule se porte bien et je suis environ entre 80% et 90% de ma forme», raconte Gagné avec plaisir. «Je lance depuis deux mois et tout se passe bien.»

L'athlète de 33 ans est convaincu qu'il pourra retourner au niveau supérieur dans cette nouvelle fonction.

«J'ai le goût d'être partant et mon corps me dit que c'est peut-être le temps. Ça devient difficile de lancer quand tu as toujours mal partout, tu te lèves le matin et tu as de la difficulté à marcher ou même ouvrir une porte parce que ton épaule ou ton coude te font mal. En tant que partant, je vais avoir la chance de me reposer entre les départs et c'est ce dont mon corps a besoin», détaille-t-il.

Gagné aurait pu choisir de relancer sa carrière de façon traditionnelle en joignant une équipe de niveau AA ou AAA, mais il a été séduit par l'aspect québécois.

«C'était une belle occasion et la porte était ouverte. Je me suis dit que j'aurais moins de stress tout en jouant du baseball d'un bon calibre dans une belle ville comme Québec et mes enfants vont adorer ça», souligne celui qui a gagné le trophée Cy Young en 2003.

Ce n'est pas une blague

La surprise a été grande pour la plupart des amateurs de baseball, mais elle le fut encore davantage pour ses amis du baseball professionnel.

«J'en ai parlé avec Geoff Jenkins et Troy Glaus qui s'entraînent avec moi en Arizona et ils ne me croyaient pas! Ils pensent encore que c'est une blague parce qu'on rigole souvent ensemble», avoue-t-il en riant. «Mais je n'ai jamais fait les choses comme les autres dans la vie.»

Même si le choix des Capitales soulève quelques doutes, Gagné est persuadé qu'il pourra attirer l'attention.

«Si les choses se déroulent bien, tant mieux. Je me ferai peut-être voir par les recruteurs sinon je vais m'amuser à Québec. Peut-être que ç'aurait été plus facile de faire mon chemin en joignant une équipe AA ou AAA, mais quand tu lances bien les dépisteurs te trouveront n'importe où; que tu sois à Québec ou en Italie…»

Avant de faire le saut avec les Capitales, l'artilleur droitier a discuté avec quelques personnes afin de savoir s'il s'agissait de la bonne option pour lui. En plus de converser avec le gérant des Capitales Michel Laplante, Gagné a posé quelques questions à Pierre-Luc Laforest qui a évolué au baseball majeur.

«Pierre-Luc (Laforest) m'a dit qu'il aimait beaucoup ça. Il m'a dit que nous allions avoir du fun et ca fait longtemps que je ne me suis pas amusé alors j'ai hâte», conte Gagné avec le sourire dans la voix.

Pour le moment, Gagné ne veut pas précipiter les choses quant à sa première présence dans l'uniforme des Capitals. Le vétéran de 12 saisons dans le baseball majeur devrait arriver à Québec dès la semaine prochaine, mais il ignore la date de ses débuts au Stade municipal.

Renoncer aux majeures, jamais!

À quelques jours de son retour au Québec, Gagné a eu à répondre à une question fort intéressante. Est-il prêt à renoncer au baseball majeur avec ce passage avec les Capitales et sa réponse fut éloquente.

«Jamais, sinon j'arrêterais de jouer au baseball», a-t-il lancé avec conviction. «Le but ultime c'est d'être le meilleur dans ton sport et ce l'est encore même si je joue à un niveau inférieur. Je vais toujours avoir espoir de revenir dans les majeures même si je ne m'attends pas à ce que ce soit facile. Je regarde les matchs à la télévision et je sais que je suis capable de faire ce qu'ils font.»

Présentement, Gagné approche ce nouveau défi une étape à la fois et il est prêt à prendre le temps nécessaire pour dire mission accomplie.

«Je vais me dédier à l'équipe pour me concentrer à me remettre en forme pour l'an prochain. Plusieurs équipes du baseball majeur sont à la recherche de lanceurs en raison des nombreuses blessures et si je reçois un appel d'une équipe professionnelle, je verrai en temps et lieu.»

L'ombre du rapport Mitchell

Nommé dans le rapport Mitchell qui a fait enquête sur les stéroïdes au baseball majeur, Gagné a toujours refusé d'expliquer pourquoi son nom s'y est retrouvé.

«Je suis ici pour jouer au baseball et non pour parler du passé. Je ne peux pas changer l'opinion de certaines personnes, mais ce que je peux faire c'est jouer au baseball», a-t-il commenté en fermant ce dossier rapidement.

Gagné désire transmettre ses connaissances

Au fil des années, Gagné a développé le désir de partager ses connaissances avec ses coéquipiers moins expérimentés et il entend jouer un rôle semblable avec les Capitales.

«Michel (Laplante) m'a dit qu'il espérait que je les aide. J'adore parler de baseball et je vais m'asseoir dans l'enclos des releveurs ou sur le banc pour discuter. Ça me manque, je m'ennuie de ces moments. La vie de famille c'est plaisant, mais j'ai le baseball dans le sang. J'adore montrer aux jeunes comment lancer. J'ai entraîné mon garçon et j'ai aidé les jeunes des Rangers du Texas et des Brewers de Milwaukee lors des deux dernières années.»

Gagné a touché des salaires faramineux allant jusqu'à 10 millions au cours des dernières saisons, un univers de différence avec ses nouveaux coéquipiers des Capitales. Cependant, le lanceur originaire de Mascouche s'amène à Québec sans prétention.

«J'ai expliqué à Michel que je ne voulais pas rendre personne inconfortable et je vais être bien accueilli. Tous les joueurs veulent se rendre où je me suis rendu et ils me poseront des questions. Ce sera amusant, nous aurons de bonnes histoires à se raconter et on se comprend toujours entre joueurs de baseball.»

Gagné ne s'en cache pas, pour lui le bonheur se trouve à un endroit. «C'est sur le monticule! J'ai été au sommet, mais j'ai subi plusieurs blessures et ce ne fut pas facile. J'adore tellement le baseball; le fait de sentir le gazon frais coupé et les hot-dog dans les estrades, ça me manque.»

Et les longs voyages en autobus?

Au cours de sa carrière avec les Dodgers, les Rangers, les Red Sox et les Brewers, Gagné a vécu le luxe des grands hôtels et des avions nolisés. Gagné vivra une réalité complètement différente dans la Ligue Can-Am. Il passera de nombreuses heures à voyager en autobus et à dormir dans des hôtels peu dispendieux.

«J'ai déjà vécu ces expériences pendant six ans dans les ligues mineures», indique Gagné sans être effrayé. «Je m'attends seulement à avoir du plaisir avec mes coéquipiers et ce sera amusant de réaliser à quel point nous étions privilégiés dans les majeures», conclut-il avec humour.