Montréal – La nouvelle est tombée jeudi matin. La longue carrière internationale du capitaine de l’équipe masculine canadienne de basketball en fauteuil roulant David Eng a abruptement pris fin.

Le Montréalais est en quelque sorte une victime collatérale du bras de fer qui oppose la Fédération internationale de basketball en fauteuil roulant (IWBF) et le Comité international paralympique (IPC).

L’IPC a exigé la révision des athlètes classés 4.5 et 4.0, mais face au manque de collaboration de l’IWBF, il y a quelques mois, elle a menacé d’exclure le basketball en fauteuil roulant des Jeux de Tokyo. L’IWBF a donc resserré ses règles de classification à propos des athlètes qui ont des handicaps plus légers et David Eng n’est plus admissible dans la catégorie des 4.5.

Deux autres athlètes de l’équipe canadienne masculine sont en attente d’une décision au terme de cette première phase de révision, tandis qu’elles sont cinq joueuses dans la même situation du côté de la formation canadienne féminine.

Eng a remporté deux médailles d’or paralympiques (2004 et 2012), une médaille d’argent (2008) et un titre de champion du monde (2006) en plus d’avoir été porte-drapeau de l’équipe canadienne à la cérémonie d’ouverture des Jeux paralympiques de Rio.

Une lourde perte

« Ce n’est évidemment pas la façon dont j’avais l’intention de mettre fin à ma carrière internationale et je suis déçu de ne pas pouvoir terminer ce que j’ai commencé avec mes coéquipiers, l’an prochain à Tokyo », a commenté Eng dans un communiqué de sa fédération nationale.

« Toutefois, ce sport m’a beaucoup apporté, tant à moi-même qu’à ma famille, et ce sont tous des éléments positifs dont je vais me souvenir. […] C’est une période très difficile, avec tout ce qui se passe dans le monde et notre sport. Je ne veux pas être une distraction pour mes coéquipiers. Sachez que ce fut pour moi merveilleux et je serai avec vous, en pensée, à chaque étape de votre parcours. Taillez votre place sur ce podium. »

Jonathan Vermette se désole du départ du capitaine de sa formation, même si cette nouvelle ne le surprend pas complètement.

« C’est sûr qu’on s’y attendait un peu, car ça fait quelques mois que les démarches sont en cours. Là, d’avoir la réponse officielle ce matin (jeudi), nous sommes tous un peu déçus. On espérait que ça n’arrive pas, mais c’est difficile à accepter, surtout que ça fait longtemps que David est là. Et il était capitaine et un excellent leader. Ça doit faire 20 ans qu’il est dans le programme national. Il a poussé autant pour le développement du sport que pour plus de joueurs de l’équipe du Québec se rendent sur la scène internationale. C’est une lourde perte ! »

Même si Eng n’est plus admissible pour être sur le terrain dans des matchs internationaux – il le sera toutefois pour les matchs de niveau canadien et québécois – Vermette souhaite qu’il demeure dans l’entourage de l’équipe.

« La fédération nationale serait gagnante de le garder dans le personnel de l’équipe. Je peux parler pour l’équipe et dire qu’il va nous manquer. Personnellement, je lui souhaite le meilleur pour la suite des choses. »

Incertitude dans l’équipe canadienne féminine

L’entraîneur de l’équipe canadienne féminine, Marc Antoine Ducharme, est encore dans l’attente de l’évaluation de cinq de ses joueuses. Leur sort à savoir si elles pourront ou non continuer sur la scène internationale n’est pas encore décidé, mais il se dit positif qu’elles conserveront leur admissibilité.

« On leur a demandé des documents d’information complémentaire », a-t-il précisé.

Déjà que le confinement a repoussé les Jeux d’un an et empêché la tenue d’entraînement de groupe, Ducharme voit cette nouvelle incertitude s’ajouter à sa liste de défis à surmonter.

« Ce n’est pas l’esprit d’équipe qui est dur à maintenir, mais plus la motivation. C’est beaucoup de stress et ce n’est pas super pour les athlètes. Même celles qui ne sont pas concernées sont stressées. (Ce qui est le plus dur), c’est que cette décision arrive en fin du cycle paralympique. C’est déplorable, mais on ne contrôle pas ça », ajoute-t-il, en restant calme devant cette situation.

Le pilote canadien croit qu’il faut revenir plusieurs années en arrière afin de comprendre pourquoi cette décision tombe à ce moment-ci.

« Le règlement a été changé en 2014, donc, en théorie, il (Eng) ne respectait plus le règlement. Par contre, il y avait une clause grand-père (pour les joueurs déjà actifs.) Là, le règlement a été changé. L’IPC a demandé à la IWBF de corriger la situation et elle n’avait rien fait, alors le retrait du basket à Tokyo était une pression supplémentaire. Il y a aussi qu’avant, le président de l’IPC était un joueur de basketball et c’était correct pour lui. Mais depuis qu’il n’est plus président, c’est là que les choses ont commencé à bouger. »

Ducharme, qui a souvent joué avec David Eng sur les scènes québécoise et canadienne, souhaite lui aussi que celui-ci continue à être présent dans son sport.