William Archambault et Max Paulhus-Gosselin suivent de près les exploits de Stephen Curry
NBA mardi, 1 déc. 2015. 09:49 samedi, 14 déc. 2024. 23:43MONTRÉAL – Harrison Barnes pourrait en parler. C’est à lui qu’était destinée cette passe qui lui a été livrée comme un cadeau du ciel, sans même qu’il daigne regarder en sa direction, dans un récent match contre les Pelicans de La Nouvelle-Orléans.
Russ Smith, des Grizzlies de Memphis, pourrait en parler. C’est lui qui courait comme un pauvre diable pour lui soutirer la balle quand il l’a vu, hors d’équilibre, s’écrouler au sol pendant que son tir d’une distance d’une quinzaine de mètres allait traverser les cordages.
Eric Bledsoe pourrait en parler. C’est principalement lui qui devait le couvrir ce soir de novembre où il a enfoncé neuf tirs de trois points dans la gorge des Suns de Phoenix.
Tout le monde semble avoir un jeu favori, des torts à confesser ou une histoire à raconter au sujet de Stephen Curry. La vedette des Warriors de Golden State règne présentement sans opposition sur son royaume. Il est le meilleur joueur de l’équipe qui connaît le meilleur début de saison de l’histoire de la NBA. Si le Bleu et Or californien a gagné ses 19 premiers matchs, c’est principalement en raison de la dominance de son meneur de jeu.
Bien avant que Curry n’atteigne le statut de baron du basket, William Archambault et Max Paulhus-Gosselin ont eu le privilège d’assister à la genèse du phénomène. De 2006 à 2009, les deux Québécois ont observé la spectaculaire éclosion de leur ami alors qu’ils défendaient avec lui les couleurs des Wildcats de l’Université Davidson. Sous leurs yeux, le chétif arrière est sorti de l’anonymat pour s’établir comme l’une des plus dangereuses menaces des rangs collégiaux américains.
De près et de loin, ils ont vu Curry mener une institution relativement inconnue à deux doigts d’une participation au Final Four du March Madness, être sélectionné au septième rang du repêchage de la NBA, se qualifier sur l’équipe d’étoiles des recrues, remporter le titre de joueur par excellence du circuit et procurer aux Warriors un premier championnat en 40 ans.
Archambault et Paulhus-Gosselin n’avaient pas besoin que Curry amorce la présente saison en battant des records pour suivre sa carrière et s’émerveiller devant ses qualités athlétiques et son sang-froid exceptionnels. Mais même sans l’effet de surprise, les deux complices ne peuvent s’empêcher d’être émerveillés devant les exploits de leur ancien coéquipier.
« C’est rendu tellement ridicule », résumait Archambault au lendemain de la victoire qui permettait aux Warriors d’établir une nouvelle marque de la NBA en amorçant leur saison avec 16 succès en rang, la semaine dernière.
Quand Curry s’est déclaré prêt à passer chez les professionnels après sa troisième saison universitaire, Archambault savait qu’il était destiné à une grande carrière. Mais il n’aurait pas osé une telle prédiction la première fois qu’il l’a vu entrer dans le gymnase.
« Je vais être franc avec toi, il n’y avait pas grand-monde qui savait qui il était. On avait déjà entendu parler de [son père] Dell vu qu’il avait joué avec les Hornets de Charlotte, mais beaucoup de jeunes qui étudient à Davidson ne viennent pas de la Caroline du Nord. Steph était un petit bonhomme d’environ 160 livres, pas très grand, pas assez imposant. Le monde se disait ‘Bah, c’est une recrue parmi tant d’autres. Il ne jouera pas beaucoup cette année, mais il aura sûrement une bonne carrière dans la NCAA...’ Puis, à son premier match, il a fait 30 points et on a tout de suite su qu’il allait être spécial. »
Un spécimen à l’entraînement
Paulhus-Gosselin, lui, a rapidement appris à ses dépens que les Wildcats avaient déniché un talent hors de l’ordinaire. Lors de mini-matchs simulés entre coéquipiers, c’est souvent à lui que revenait la tâche de couvrir Stephen Curry.
« Les premières fois que j’ai eu la chance d’être vraiment impressionné, ce sont les premières fois où on a pratiqué ensemble. Le kid n’était même pas encore un freshman et il avait la confiance pour tirer de n’importe où sur le terrain quand le match était en jeu. Au début, ça marchait moins souvent, mais à la fin de sa carrière à l’Université, il était rendu extrêmement efficace. J’étais souvent de l’autre côté et je peux dire que c’était particulièrement désagréable! Mais j’avais parfois l’impression de jouer au ralenti dans les vrais matchs parce que les adversaires n’étaient pas au niveau de ce que je voyais en pratique. »
Les méthodes d’entraînement de Curry n’ont jamais cessé d’obséder Paulhus-Gosselin, qui se propose volontiers comme témoin pour assurer que les succès de son ancien bourreau sur le parquet ne sont pas le fruit du hasard. Pour appuyer ses dires, le jeune homme d’affaires partage les points saillants d’un article qui lui est récemment tombé sous la main et dans lequel étaient énumérées les quatre règles d’or qui font de Curry un leader exemplaire.
La deuxième : « Souvenez-vous que le travail n’arrête jamais ».
« Il pratique des affaires qui n’ont pas de bon sens. Les jeunes de secondaire 1 font ça en gymnase et je leur dis : ‘Les gars, il faudrait se concentrer sur des exercices réalistes’. Mais Steph les maîtrise tous, les exercices réalistes, et il est rendu à un point où il pratique les tirs où il touche presqu’au plafond avec sa main gauche en passant sous le panier. Je suis impressionné en tout temps quand je regarde un de ses matchs. Pas juste de temps en temps quand il fait un move débile. Tout le temps! »
Archambault, lui, revient à cette assurance qui demeure selon lui l’un des traits de caractère dominants de Curry, qui domine la NBA avec 211 tentatives de tirs de trois points pour un pourcentage d’efficacité hallucinant de 44,5%.
« Peu importe ce qu’il va faire sur le terrain, sa priorité sera de rendre ses coéquipiers meilleurs. Par contre, s’il voit qu’on lui laisse une ouverture pour prendre un tir, ne serait-ce que pendant une milliseconde, il va le prendre. »
« Moi, la chose qui m’impressionne le plus, ce sont ses passes, renchérit Paulhus-Gosselin. C’est vrai, il peut tirer de partout en périphérie et est devenu plus efficace à l’intérieur que les gros gars qui font des dunks à toutes les deux secondes. Mais en plus de ça, il a une capacité à voir le jeu et un QI de basket qui lui permettent d’aider son équipe à tellement de niveaux. Son taux de réussite sur les tirs de trois points attire l’attention, mais dans le match, combien réussira-t-il de passes parfaites à des coéquipiers qui ne savaient même pas eux-mêmes qu’ils étaient libres? »
L’humilité des premiers jours
Les deux anciens du Collège Champlain de Saint-Lambert sont restés en contact avec le plus célèbre de leurs anciens coéquipiers. Ils l’ont revu pour la dernière fois l’année dernière alors qu’ils ont profité du passage des Warriors à Toronto pour lui rendre visite. Paulhus-Gosselin se souvient que Curry avait signé des autographes pendant deux heures et demie avant que le petit groupe dont il était à la tête ne puisse finalement prendre la direction d’un bar de la Ville Reine.
« On a joué au ping pong toute la nuit, c’était du plaisir pur et dur. Rien d’exubérant, mais simple et agréable. Et comme on est tous des gars légèrement compétitifs, on avait eu pas mal chaud! Quand on a fini par quitter, il devait y avoir 200 personnes qui attendaient Steph dehors. C’était la première fois que je voyais quelque chose de semblable. »
L’expérience a marqué les deux Québécois, qui ont alors eu l’agréable confirmation que Curry n’avait pas laissé la gloire boursoufler son égo.
« Il pourrait se dire qu’il a atteint le summum de la popularité et qu’il n’a plus à porter attention aux gens qui ne font pas partie de mon cercle rapproché, mais non. Il prend le temps pour tout le monde. Il serre des mains, il signe des autographes, il jase de tout et de rien. J’ai été vraiment impressionné de constater à quel point il n’avait pas changé depuis l’université », apprécie Paulhus-Gosselin.
« On le voit à la télé dans la façon dont il se présente, dont il gère les feux de la rampe, ajoute Archambault. Il n’y a jamais de presse négative autour de lui. Ce n’est pas tout le monde qui est capable d’en faire autant. Prenez Johnny Manziel. Le gars n’est même pas un bon joueur dans la NFL, il est partant pour une semaine et il s’en va faire le party. Il y a des gars qui peuvent gérer le succès mieux que d’autres. »
Les anciens Wildcats seront bientôt de nouveau réunis puisque Curry a réservé des billets à ses amis canadiens pour son match du 11 décembre à Boston. Les Warriors auront besoin de cinq autres victoires d’ici là pour s’y présenter avec une fiche toujours parfaite. Cinq victoires qui rendraient aussi la prochaine partie de ping pong encore plus agréable.
« Ça ne devrait pas être plate! », anticipe Paulhus-Gosselin.