Il n'y aura pas de spectateur plus attentif que Georges St-Pierre samedi soir au UFC 143.

Mais ça ne signifie pas que le champion des mi-moyens de l'organisation, confiné à un rôle d'observateur en raison d'une blessure à un genou, trouvera satisfaction à la vue de la bataille que se livreront Nick Diaz et Carlos Condit pour le titre intérimaire de la division des 170 livres.

St-Pierre a hâte de découvrir l'identité du gagnant - et du même coup de celui qu'il aura l'occasion d'affronter pour reprendre sa couronne lorsque sa santé le lui permettra. Mais monter dans la cage pour confronter le vainqueur du combat de samedi, ça, il s'en passerait.

Un tel face-à-face est monnaie courante dans le contexte de sport-spectacle des sports de combat, mais ce n'est pas la tasse du thé du Québécois.

"Je n'aime pas la confrontation, mais je sais qu'elle est nécessaire pour la promotion du sport, a confié St-Pierre à la Presse Canadienne cette semaine. Les dirigeants du UFC nous forcent à faire ce genre de chose parfois. Ils adorent ça."

Josh Koscheck, qui a été battu deux fois par St-Pierre et qui a été son adversaire lors de la série de téléréalité The Ultimate Fighter, n'a pu résister de lancer un petit jab à son vieux rival lorsqu'il a été mis au courant des révélations du champion.

"Il est un petit gars un peu bizarre", a glissé Koscheck avec un petit sourire en coin.

Une victoire de Diaz samedi devrait mettre la table à une rencontre intéressante. Diaz ne s'est pas gêné pour lancer une flèche envenimée au champion immédiatement après sa victoire face à B.J. Penn en octobre. De son siège aux abords de l'octogone, St-Pierre bouillait tellement qu'il a exigé de ses patrons qu'ils lui offrent un combat contre Diaz plutôt que celui qui était déjà prévu contre Condit.

Le président du UFC, Dana White, s'est fait un plaisir d'accepter, mais St-Pierre a aggravé une blessure quelques semaines plus tard. Et on se retrouve aujourd'hui, avec un combat de championnat intérimaire en attendant que le véritable monarque récupère.

Des mauvais souvenirs

St-Pierre est déjà monté dans la cage pour défier un futur adversaire et il n'en garde pas nécessairement de bons souvenirs.

En 2006, il avait tenté de provoquer Matt Hughes en lui lançant qu'il n'avait "pas été impressionné" par la performance qu'il venait juste de livrer contre B.J. Penn, mais son initiative s'était retournée contre lui. St-Pierre avait plus tard expliqué qu'il avait mal interprété des paroles que Hughes avait tenues à son endroit et qu'il avait réagi sous le coup de l'émotion.

"C'était une erreur de ma part, concède aujourd'hui GSP. Et je crois que c'est un manque de respect de monter dans la cage. Quand un gars remporte un combat, c'est son moment de gloire et je ne veux pas y porter ombrage. Il gagne, il mérite ce moment."

Peu importe le dénouement du combat de samedi - et il sait qu'une victoire de Diaz rendrait le scénario encore plus imprévisible - St-Pierre promet qu'il fera face à la musique. "Je suivrai la vague", dit-il en riant.

La colère de St-Pierre à l'endroit de Diaz semble s'être atténuée avec le temps. Dans une certaine mesure, celui qu'on surnomme "Rush" a trouvé le moyen d'apprécier le colérique Californien, notamment en visionnant les émissions UFC Primetime destinées à mousser le gala du week-end du Super Bowl.

"Je ne crois pas qu'il soit une mauvaise personne. À mes yeux, il est irrespectueux envers moi parce que nous allons nous battre un contre l'autre. Mais je suis sûr que si, par exemple, un amateur va à sa rencontre, il saura être gentil. Je crois qu'il est une bonne personne."

"Je ne crois pas qu'il existe de mauvaises personnes, continue de clarifier St-Pierre. Je crois que chacun a ses problèmes, moi le premier. Je ne suis pas parfait. J'ai des qualités et des défauts, tout comme Diaz. Peut-être qu'il est simplement mal à l'aise en public. Peut-être que la caméra le rend nerveux. Qui sait? Mais je ne crois pas qu'il soit une mauvaise personne."

St-Pierre respecte les combattants que sont Diaz et Condit et même si son rival le plus vocal est favori à 2-contre-1 selon plusieurs preneurs aux livres, il prévient quiconque oserait prendre Condit à la légère.

"Ce serait une erreur. Je ne serais pas surpris si Condit passait le K.-O. à Diaz", avertit le natif de St-Isidore, en banlieue de Montréal.

Une nouvelle mentalité

Médicalement parlant, St-Pierre dit avoir pris de l'avance sur l'échéancier qui avait été établi après qu'il eut subi une opération pour réparer le ligament croisé antérieur de l'un de ses genoux.

"Tout va bien. Maintenant, je n'ai qu'à écouter mes médecins et m'assurer de ne pas brusquer les choses pour éviter de faire un pas en arrière."

Plus facile à dire qu'à faire. St-Pierre est un véritable fanatique de l'entraînement en quête constante de nouveaux moyens pour améliorer sa préparation. Mais il a récemment réalisé qu'il y avait des côtés négatifs à toujours garder la pédale au plancher.

"Avant, je disais que j'allais dormir une fois que je serai mort, mais c'est probablement la chose la plus stupide que j'ai dite dans ma vie. J'ai bien l'intention de changer cette mentalité."

St-Pierre ne s'attend pas à reprendre l'entraînement complet avant la fin juillet et prévoit qu'il sera prêt à retourner à la compétition en novembre. Ces jours-ci, il concentre ses efforts sur le haut de son corps avec ses professeurs de gymnastique et passe la majeure partie de son temps à Los Angeles, où il a été opéré et où il suit pendant trois à quatre heures par jour son programme de remise en forme.

À 30 ans, et après huit ans à l'emploi du UFC, St-Pierre semble bien dans sa peau. Les platitudes insérées dans sa tête par ses psychologues sportifs ont pris le bord et le champion semble moins réticent à livrer le véritable fond de sa pensée.

Et St-Pierre croit que le temps qu'il passe à l'écart de la compétition lui permettre non seulement de guérir sa blessure majeure, mais aussi une pléthore de petits bobos qui l'affligent depuis des années.

Koscheck, en éternel rabat-joie, a toutefois ses doutes.

"Je lui souhaite une guérison rapide. Mais j'ai des amis qui ont eu le même genre d'opération et ils n'ont jamais été les mêmes par la suite."