La « ring rust » affectera-t-elle GSP?
AMM vendredi, 9 nov. 2012. 20:40 jeudi, 12 déc. 2024. 06:45
MONTRÉAL - L'adversaire ce jour-là était totalement inoffensif. Une bande de journalistes - ils devaient être une trentaine - caméra à l'épaule ou calepin de notes en main, venus prendre de ses nouvelles à quelques semaines de son retour dans l'octogone.
Mais Georges St-Pierre, allergique au hasard, avait quand même pris la peine de préparer un plan de match.
St-Pierre bandait méticuleusement ses mains quand ses invités ont commencé à s'agglutiner autour de l'arène dans laquelle l'attendaient deux entraîneurs de boxe thaïlandaise venus directement de Phuket sur le bras du champion. Vêtu d'un short moulant et d'un survêtement rouge, « Rush » se préparait pour sa mission : une routine de 25 minutes, sans retenue, avec comme victimes les mitaines de ses compagnons.
L'exercice aurait achevé n'importe qui était venu pour y assister, mais St-Pierre l'a complété avec la même ardeur qu'il avait démontré en l'amorçant, la goutte au front et un sourire de satisfaction au visage. Un Joe Connaissant vous aurait dit que le gars s'était fait complètement reconstruire un genou moins d'un an auparavant, vous lui auriez peut-être dit que c'était plutôt lui qui avait besoin d'un médecin.
C'était pourtant vrai. Les journalistes, eux, étaient au courant. Et St-Pierre avait déjà une réponse toute prête à leurs prévisibles questions lorsqu'il est venu à leur rencontre après quelques minutes de répit.
« Vous m'avez vu frapper? C'est exactement pour ça que j'ai voulu faire un entraînement public avec les gars de muay thaï. Je me sens comme si je n'avais jamais eu d'opération. Le genou est même encore mieux qu'avant », a-t-il juré dans les deux langues.
L'idée n'est pas de contredire St-Pierre, qui connaît évidemment son corps mieux que quiconque. Si les ligaments ressoudés à sa rotule droite ont survécu à l'intense traitement qu'il s'est imposé depuis qu'il a reçu le feu vert de son chirurgien, pourquoi cèderaient-ils soudainement samedi soir, alors qu'il affrontera Carlos Condit lors du retour du UFC au Centre Bell?
Faites le tour et ils sont rares à s'inquiéter du bien-être physique de GSP, mais une autre question fait régulièrement surface dans le tourbillon de spéculations qui s'accélère à l'approche de son grand retour. Georges sera-t-il rouillé lorsque la porte de la cage se refermera derrière lui? Pour un combattant qui ne s'est pas battu depuis un an et demi, la fameuse ring rust est-elle un mythe, un vieux cliché ou une menace bien réelle?
« C'est très réel, répond sans aucune hésitation Patrick Côté. Que ce soit Georges, Superman ou n'importe qui d'autre, ça existe. »
Côté est bien placé pour comprendre la situation à laquelle fait face son compatriote. Il y a quatre ans, il s'est infligé une blessure identique, une déchirure du ligament croisé antérieur, dans un combat de championnat du monde contre Anderson Silva. Il a dû attendre 18 mois avant de retourner dans la cage.
« La rouille, c'est le manque de timing que ta tête va avoir avec ton corps dans un vrai combat, explique le Prédateur. C'est difficile à expliquer parce qu'en entraînement, tu ne le sens pas. Tout va bien et tu crois que tu es meilleur que jamais, mais quand la cloche sonne et que ça commence pour vrai, ça va vite pas à peu près. »
Côté avoue ouvertement qu'il n'était pas prêt pour le danger qui le guettait. Sa blessure n'était plus qu'un mauvais souvenir et son camp d'entraînement s'était déroulé sans anicroche. Ce n'est que lorsque Alan Belcher l'a agressivement placé sur la défensive qu'il a réalisé que ce dans quoi il s'était embarqué n'était pas nécessairement comme remonter à vélo.
« Je crois qu'il m'a donné dix coups de pieds à la même place avant que je bouge. Je me disais toujours que j'allais bloquer le prochain, mais ça m'a pris quelques minutes à m'ajuster. Tu peux faire ce que tu veux à l'entraînement, mais tu ne peux pas simuler la vitesse à laquelle les choses se passent dans l'octogone. Même si je suis convaincu que Georges est prêt physiquement et mentalement, c'est sûr que ça va l'affecter. »
Du cas par cas
Dans le coin de St-Pierre, on est loin de prétendre que Côté est dans le champ. Firas Zahabi, son entraîneur principal, trempe dans le monde des sports de combat depuis assez longtemps pour savoir que la rouille du ring n'est pas une invention, mais il ne croit pas que ses effets se feront ressentir chez son plus célèbre protégé.
« L'affaire avec Georges, c'est qu'il fait des compétitions depuis l'âge de 9 ans et il a déjà défendu son titre de champion du monde six fois. Quand tu fais quelque chose depuis si longtemps, tu ne l'oublies pas si facilement, défend Zahabi. Georges a les instincts du combat au plus profond de lui, c'est un vrai spartan. Je ne dis pas que c'est facile, mais si quelqu'un peut le faire, c'est lui. »
Matt Serra, le dernier homme à avoir battu St-Pierre, n'a jamais été reconnu pour précipiter ses retours dans l'octogone. Entre 2005 et 2009 inclusivement, il ne s'est jamais battu plus d'une fois par année et affirme n'avoir jamais senti qu'une longue période d'inaction lui avait nui.
« Certains gars offrent toujours leur meilleur performance après des pauses plus longues qu'à l'habitude, faisait remarquer Serra en entrevue à RDS. Ça m'est moi-même souvent arrivé de m'absenter assez longtemps et bien souvent, je revenais meilleur que je ne l'étais auparavant, j'étais un combattant complètement différent. Mais je sais aussi que d'autres ont besoin d'être constamment dans le feu de l'action. À chacun ses préférences, je suppose. »
« C'est à Georges de faire son travail au niveau psychologique, mais ses entraîneurs ont aussi un rôle à jouer, argumente Côté, renvoyant en quelque sorte la balle dans le camp de Zahabi. Ils devront lui rappeler que ce sera normal de se sentir un peu perdu au début, que ce n'est qu'un moment à passer et de ne pas paniquer. Si Condit a une chance de gagner, je crois que c'est dans la première minute du combat. »
« Georges est très bien entouré, rassure Serra, lui-même un entraîneur à son gymnase à Long Island. John Danaher (un enseignant de jiu-jitsu sur qui St-Pierre peut compter dans son coin) est un génie et passe beaucoup de temps avec lui dans un rôle de mentor. Je suis convaincu que le plan de match de Georges sera le bon. C'est un combat que j'ai bien hâte de voir. »
Quand un journaliste lui a demandé sans détour s'il avait peur d'être rouillé, St-Pierre, bien sûr, a sorti la réponse qui était incluse dans son plan de match.
« Je ne suis pas une voiture, je fais ça chaque jour! Je suis prêt à me battre, je suis excité. »
Mais Georges St-Pierre, allergique au hasard, avait quand même pris la peine de préparer un plan de match.
St-Pierre bandait méticuleusement ses mains quand ses invités ont commencé à s'agglutiner autour de l'arène dans laquelle l'attendaient deux entraîneurs de boxe thaïlandaise venus directement de Phuket sur le bras du champion. Vêtu d'un short moulant et d'un survêtement rouge, « Rush » se préparait pour sa mission : une routine de 25 minutes, sans retenue, avec comme victimes les mitaines de ses compagnons.
L'exercice aurait achevé n'importe qui était venu pour y assister, mais St-Pierre l'a complété avec la même ardeur qu'il avait démontré en l'amorçant, la goutte au front et un sourire de satisfaction au visage. Un Joe Connaissant vous aurait dit que le gars s'était fait complètement reconstruire un genou moins d'un an auparavant, vous lui auriez peut-être dit que c'était plutôt lui qui avait besoin d'un médecin.
C'était pourtant vrai. Les journalistes, eux, étaient au courant. Et St-Pierre avait déjà une réponse toute prête à leurs prévisibles questions lorsqu'il est venu à leur rencontre après quelques minutes de répit.
« Vous m'avez vu frapper? C'est exactement pour ça que j'ai voulu faire un entraînement public avec les gars de muay thaï. Je me sens comme si je n'avais jamais eu d'opération. Le genou est même encore mieux qu'avant », a-t-il juré dans les deux langues.
L'idée n'est pas de contredire St-Pierre, qui connaît évidemment son corps mieux que quiconque. Si les ligaments ressoudés à sa rotule droite ont survécu à l'intense traitement qu'il s'est imposé depuis qu'il a reçu le feu vert de son chirurgien, pourquoi cèderaient-ils soudainement samedi soir, alors qu'il affrontera Carlos Condit lors du retour du UFC au Centre Bell?
Faites le tour et ils sont rares à s'inquiéter du bien-être physique de GSP, mais une autre question fait régulièrement surface dans le tourbillon de spéculations qui s'accélère à l'approche de son grand retour. Georges sera-t-il rouillé lorsque la porte de la cage se refermera derrière lui? Pour un combattant qui ne s'est pas battu depuis un an et demi, la fameuse ring rust est-elle un mythe, un vieux cliché ou une menace bien réelle?
« C'est très réel, répond sans aucune hésitation Patrick Côté. Que ce soit Georges, Superman ou n'importe qui d'autre, ça existe. »
Côté est bien placé pour comprendre la situation à laquelle fait face son compatriote. Il y a quatre ans, il s'est infligé une blessure identique, une déchirure du ligament croisé antérieur, dans un combat de championnat du monde contre Anderson Silva. Il a dû attendre 18 mois avant de retourner dans la cage.
« La rouille, c'est le manque de timing que ta tête va avoir avec ton corps dans un vrai combat, explique le Prédateur. C'est difficile à expliquer parce qu'en entraînement, tu ne le sens pas. Tout va bien et tu crois que tu es meilleur que jamais, mais quand la cloche sonne et que ça commence pour vrai, ça va vite pas à peu près. »
Côté avoue ouvertement qu'il n'était pas prêt pour le danger qui le guettait. Sa blessure n'était plus qu'un mauvais souvenir et son camp d'entraînement s'était déroulé sans anicroche. Ce n'est que lorsque Alan Belcher l'a agressivement placé sur la défensive qu'il a réalisé que ce dans quoi il s'était embarqué n'était pas nécessairement comme remonter à vélo.
« Je crois qu'il m'a donné dix coups de pieds à la même place avant que je bouge. Je me disais toujours que j'allais bloquer le prochain, mais ça m'a pris quelques minutes à m'ajuster. Tu peux faire ce que tu veux à l'entraînement, mais tu ne peux pas simuler la vitesse à laquelle les choses se passent dans l'octogone. Même si je suis convaincu que Georges est prêt physiquement et mentalement, c'est sûr que ça va l'affecter. »
Du cas par cas
Dans le coin de St-Pierre, on est loin de prétendre que Côté est dans le champ. Firas Zahabi, son entraîneur principal, trempe dans le monde des sports de combat depuis assez longtemps pour savoir que la rouille du ring n'est pas une invention, mais il ne croit pas que ses effets se feront ressentir chez son plus célèbre protégé.
« L'affaire avec Georges, c'est qu'il fait des compétitions depuis l'âge de 9 ans et il a déjà défendu son titre de champion du monde six fois. Quand tu fais quelque chose depuis si longtemps, tu ne l'oublies pas si facilement, défend Zahabi. Georges a les instincts du combat au plus profond de lui, c'est un vrai spartan. Je ne dis pas que c'est facile, mais si quelqu'un peut le faire, c'est lui. »
Matt Serra, le dernier homme à avoir battu St-Pierre, n'a jamais été reconnu pour précipiter ses retours dans l'octogone. Entre 2005 et 2009 inclusivement, il ne s'est jamais battu plus d'une fois par année et affirme n'avoir jamais senti qu'une longue période d'inaction lui avait nui.
« Certains gars offrent toujours leur meilleur performance après des pauses plus longues qu'à l'habitude, faisait remarquer Serra en entrevue à RDS. Ça m'est moi-même souvent arrivé de m'absenter assez longtemps et bien souvent, je revenais meilleur que je ne l'étais auparavant, j'étais un combattant complètement différent. Mais je sais aussi que d'autres ont besoin d'être constamment dans le feu de l'action. À chacun ses préférences, je suppose. »
« C'est à Georges de faire son travail au niveau psychologique, mais ses entraîneurs ont aussi un rôle à jouer, argumente Côté, renvoyant en quelque sorte la balle dans le camp de Zahabi. Ils devront lui rappeler que ce sera normal de se sentir un peu perdu au début, que ce n'est qu'un moment à passer et de ne pas paniquer. Si Condit a une chance de gagner, je crois que c'est dans la première minute du combat. »
« Georges est très bien entouré, rassure Serra, lui-même un entraîneur à son gymnase à Long Island. John Danaher (un enseignant de jiu-jitsu sur qui St-Pierre peut compter dans son coin) est un génie et passe beaucoup de temps avec lui dans un rôle de mentor. Je suis convaincu que le plan de match de Georges sera le bon. C'est un combat que j'ai bien hâte de voir. »
Quand un journaliste lui a demandé sans détour s'il avait peur d'être rouillé, St-Pierre, bien sûr, a sorti la réponse qui était incluse dans son plan de match.
« Je ne suis pas une voiture, je fais ça chaque jour! Je suis prêt à me battre, je suis excité. »