Les blessures les plus douloureuses ne sont pas toujours visibles à l'œil nu. N'allez donc pas croire que c'est le plâtre qui entoure sa main droite depuis deux jours qui dérange le plus Patrick Côté.

« Tout est beau, assure relativement gaiement Côté, qui a été opéré mardi pour réparer une fracture subie lors de sa défaite au UFC 113. Je vais avoir ça pour une semaine seulement. Ensuite, j'aurai une attelle pendant trois ou quatre semaines et tout devrait être rentré dans l'ordre. J'étais supposé prendre trois semaines de congé de toute façon, donc ce n'est pas si grave. »

Ce bel optimisme dissimule toutefois un bémol facilement perceptible. Il ne veut pas en faire un plat, mais on devine sans trop de difficulté que Côté a le moral dans les talons.

« Ah ça... je pense que ça va être plus long à réparer que ma main, soupire-t-il. Une défaite, ça fait toujours plus mal que les blessures. C'est de la façon dont ça s'est passé aussi... »

Côté est un homme déchiré depuis qu'Alan Belcher l'a forcé à l'abandon devant ses partisans, à son grand retour dans l'octogone après une absence de 18 mois. Le petit ange assis sur son épaule droite lui dit de se tenir droit, d'accepter son sort et d'attendre sa prochaine opportunité. Mais le petit démon de l'autre côté travaille fort pour le faire crier à l'injustice.

Il aborde le sujet avec une légère réticence, mais il est clair pour lui que Belcher ne l'a pas battu en respectant toutes les règles de l'art.

« Il était trop tard... »

Vers le milieu du deuxième round, l'Américain a remporté une bataille au corps à corps et a projeté Côté au sol en lui servant la prise du marteau pilon.

« J'ai comme été étourdi. Pendant deux secondes, j'ai perdu la carte et quand je suis revenu à moi à 100%, il était trop tard. Sa technique était déjà passée. »

À 3:25 de la deuxième reprise, Côté a été forcé d'abandonner, étouffé par l'étranglement arrière de Belcher. Le Québécois prétend que c'est sa tête qui a encaissé le choc lorsqu'il a été cloué au sol, une tactique qui est interdite par les règlements du UFC. Mais tout le monde n'a pas interprété l'incident de la même façon.

« J'ai vu la reprise. Quatre-vingt-dix pourcent des gens à qui j'ai parlé jugent que c'était illégal, se défend Côté. Le reste, qui inclut l'arbitre, affirment que je suis plutôt tombé sur le front, ce qui est en théorie correct. Ce n'est pas à moi de juger du règlement. Avec cette technique-là, la ligne est très mince. Mais qu'on ne me demande pas de croire que son intention n'était pas de me faire le marteau pilon. Sa stratégie ne faisait pas de doute. »

L'histoire du combat

Quatre jours après sa défaite, Côté affirme se rappeler de chaque seconde de cette soirée tout de même mémorable. « Ce sont des moments qui seront difficiles à égaler dans ma vie. La foule qui chantait mon nom, c'était vraiment spécial. C'est très difficile à décrire. C'est quelque chose que je vais peut-être vivre une seule fois dans ma vie et je vais m'en rappeler pour le restant de mes jours. J'aimerais d'ailleurs remercier tous les fans qui étaient là pour tous les instants qu'ils m'ont permis de vivre. C'était tout simplement incroyable. »

Côté avoue avoir été surpris par la stratégie de Belcher d'amorcer le combat en position de gaucher. « Ça m'a pris un petit dix ou quinze secondes à m'ajuster et c'est sûr que j'ai peut-être commencé tranquillement », confesse-t-il.

Comme prévu, Belcher est sorti de son coin avec beaucoup d'agressivité, multipliant les coups de pieds au corps, une stratégie dont l'efficacité a été vantée par le président du UFC, Dana White, au terme de la soirée.

« Je pense que ça avait l'air pire que c'était en réalité, a rétorqué Côté. Je ne mentirai pas, ce n'était pas des caresses! Ça rentrait, mais ça ne m'a jamais réellement empêché d'avancer vers lui. D'ailleurs, aussitôt qu'il s'est replacé droitier, je me suis servi de son premier coup de pied pour l'amener au sol sans trop de difficulté. »

Dans le livre de Côté, c'est à ce moment qu'il a pris le contrôle des hostilités. Au milieu du round, il a renvoyé Belcher au plancher, a passé sa garde et a enclenché une tentative de kimura qui, croyait-il, le propulserait vers la victoire.

« Je pensais bien que ça allait se terminer là. J'ai extrêmement confiance en mon kimura et quand je l'ai barré, je croyais qu'il était vraiment solide. Quand j'ai mis ma jambe derrière sa tête, je pensais que c'était fait. »

« J'ai peut-être été trop nonchalant, poursuit Côté dans sa lecture technique. J'ai essayé de rouler sur mon dos, ce qui est la technique qu'on apprend avec mon équipe chez BTT Canada, mais je n'ai peut-être pas appliqué assez de pression avec ma jambe droite au niveau de sa tête, parce qu'il a réussi à la ramener à l'intérieur. Belcher est très fort physiquement et il a fallu que je travaille beaucoup pour plier son bras. J'ai peut-être manqué de concentration avec ma jambe droite... Si c'était à refaire, je m'assoirais plus sur ma jambe au lieu de retourner sur mon dos et d'essayer de le finir sur le dessus. »

Au deuxième round, le Prédateur est vraiment entré dans sa zone de confort et a confronté Belcher avec ses poings. C'est au cours de ces premiers gros échanges qu'il s'est fracturé la main.

« J'ai trouvé mon rythme, ma distance. Tous les coups que je lançais touchaient solidement la cible. Je ne l'ai jamais vraiment senti ébranlé, mais je l'ai ralenti. Je ne pense pas qu'il aurait été capable de tenir ce rythme jusqu'à la fin. »

Un retour en septembre, ensuite une revanche

Même s'il n'accepte pas la façon dont il a été battu, Côté n'a pas l'intention de faire de vagues. Sauf qu'il a la mémoire longue et son plan est déjà clairement défini.

« Je vais laisser les choses comme ça, je n'irai pas en appel. Je ne suis pas un pleurnichard et de tout façon, le UFC n'aime pas les chiâleux. Je vais prendre ma pilule, je vais retourner à l'entraînement, je vais gagner mon prochain combat et ensuite, je vais demander ma revanche contre Belcher. Ce n'est pas fair, ce qui est arrivé. »

Et une autre petite chose chicote le combattant originaire de Rimouski.

« En plus, il a gagné la soumission de la soirée contre moi. Ça, ça m'écoeure pas mal, avoue Côté en pesant ses mots. Je vais l'avoir sur le cœur longtemps. »

Au moins, l'ancien aspirant numéro un des poids moyens n'a pas à se demander d'où arrivera son prochain chèque de paie.

« J'ai parlé aux gens du UFC et ils sont super contents de ma performance. Dana White est venu me voir pour me dire qu'il avait été extrêmement impressionné. Ma job n'est pas en danger. Aussitôt que je serai prêt, ils vont me reprendre. »