MONTRÉAL - Telle une terre laissée trop longtemps en jachère, Groupe Yvon Michel (GYM) veut faire du « Rest of Canada » une plaque tournante de l’industrie de la boxe professionnelle. Pour y parvenir, l’entreprise québécoise enverra son plus illustre représentant en défricheur.

Le champion des poids mi-lourds du WBC y défendra son titre pour la sixième fois depuis sa victoire en seulement 76 secondes aux dépens de Chad Dawson en juin 2013, alors qu’il affrontera l’Américain Tommy Karpency le 11 septembre au Richo Coliseum de Toronto.

Il s’agira du premier combat de championnat du monde présenté dans la Ville Reine depuis celui des super-légers de l’IBF entre Aaron Pryor père et Nick Furlano le 22 juin 1984. Et ce pourrait être même le début d’une série de plusieurs si la réponse des amateurs s’avère positive.

« Toronto est le troisième plus gros marché corporatif et la ville où il se vend le plus de billets sportifs en Amérique du Nord, a indiqué Yvon Michel en conférence de presse jeudi matin. Il ne leur manquait que de la boxe des ligues majeures, mais il fallait trouver le bon moment. »

Flanqué de Maple Leaf Sports and Entertainement (MLSE) et Global Legacy Boxing (GLB), GYM profitera au maximum de l’expertise du groupe notamment propriétaire des Maple Leafs (hockey), des Marlies (hockey) des Raptors (basketball) et du Toronto FC (soccer).

« Il ne s’agit pas d’un grand risque financier, a expliqué Michel. MLSE assume une partie des risques et nous partagerons les profits. Il s’agissait de trouver un groupe qui pouvait se charger des opérations. Nous nous complétons d’ailleurs à merveille dans tous les départements. »

Au cas où l’expérience se voudrait positive, les trois partenaires exploreront ensuite la possibilité de présenter d’autres événements à Calgary et Vancouver dans un avenir rapproché et ainsi imiter l’UFC qui a visité des marchés plus atypiques au cours des dernières années.

Derrière les intérêts financiers évidemment, il y a également le désir de développer une relève plutôt mince sur la scène amateur canadienne. Partenaire du promoteur Les Woods dans l’aventure GLB, l’ex-champion du monde des lourds Lennox Lewis a avoué qu’il aurait lancé sa carrière professionnelle au pays si l’industrie avait existé dans le Canada anglais à son époque.

« Il y a maintenant des promoteurs passionnés et le moment est propice pour se lancer dans une aventure comme celle-là, a lancé le dernier champion incontesté de la catégorie reine de la boxe. Les gens de la grande région de Toronto aiment la boxe et veulent la voir en personne. »

« Il y a plusieurs villes où je veux avoir la chance de boxer, a quant à lui ajouté Stevenson. Il s’agit d’une plate-forme pour promouvoir la boxe au pays. Lorsque les meilleurs boxeurs amateurs décideront de passer chez les professionnels, il y aura cette structure à leur disposition. »

Cela dit, Michel a tenu à rassurer les amateurs québécois en promettant que Montréal et Québec demeureront au cœur des activités de son entreprise. Mais avec le projet d’un combat à Haïti qui a été relancé et qui est dorénavant prévu pour décembre, Stevenson pourrait remonter sur le ring du Centre Bell qu’en 2016 au plus tôt. Sa dernière visite remonte déjà à mai 2014.

« Adonis était le gars idéal pour explorer le marché torontois, mais les Canadiens veulent voir des vedettes, a mentionné le promoteur. Si nous amenions des boxeurs comme Amir Khan ou encore Deontay Wilder, je suis convaincu que nous allons être en mesure de remplir la place. »

Faire fi (encore) des critiques

Comme cela est maintenant devenu une tradition depuis quelques combats, Stevenson et GYM ont dû défendre la décision d’avoir choisi un adversaire pratiquement inconnu des amateurs.

À l’image de ce qu’InterBox faisait lorsque Lucian Bute se mesurait aux Jesse Brinkley et Brian Magee de ce monde, Michel a précisé que bon nombre d’aspirants potentiels étaient indisponibles ou avait fait piètre figure contre des boxeurs que son protégé a déjà battus.

« Karpency s’est déjà battu en championnat du monde (contre Nathan Cleverly) et nous pouvions nous entendre avec lui à prix raisonnable, a dit le promoteur. Il a probablement mis fin à la carrière de Dawson et battait Andrzej Fonfara avant d’abandonner sur blessure.

« J’ai l’impression que c’est devenu à la mode de dire qu’Adonis ne se bat contre personne, mais deux de ses trois derniers combats - face à Fonfara et Sakio Bika - se sont rendus à la limite de 12 rounds. C’était donc des gars assez solides pour prendre tous ses coups de poing. »

« Je m’en fou. Je n’en ai absolument rien à foutre des gens qui me critiquent, a répliqué Stevenson. J’ai travaillé fort pour arriver où je suis et je suis prêt à affronter n’importe qui. On me donne les adversaires qui sont disponibles et il y aura toujours des gens pour critiquer. »

Mais comme l’amateur a toujours raison, il sera intéressant de connaître le nombre d’entre eux qui accepteront de payer pour le voir à l’œuvre sur place ou encore à la télévision à la carte.