Les plus grands boxeurs : Jean Pascal
Boxe vendredi, 8 mai 2020. 12:00 vendredi, 13 déc. 2024. 21:41Champion des poids mi-lourds du WBC de juin 2009 à mai 2011 et champion « régulier » des mi-lourds de la WBA depuis août 2018, Jean Pascal présente une fiche de 35-6-1, 20 K.-O. Il a été choisi comme étant le plus grand boxeur québécois du XXIe siècle à la suite d’une consultation auprès d’experts et d’amateurs à RDS.ca.
Jean Pascal n’était pas né pour un petit pain. Il suffit de survoler certaines des manchettes où il est en vedette depuis plus d’une quinzaine d’années déjà pour s’en convaincre très rapidement.
« La défaite n’est pas une option »
« Pascal s’attend à une Guerre mondiale »
« Je ne boxe pas contre des cannes de tomates »
« Pascal veut affronter Stiverne »
« Le plus grand défi de ma vie »
« Pascal est de retour pour mettre du piquant dans la boxe québécoise »
« Je veux devenir le Yvon Michel noir »
« Pascal devient son propre patron »
« Je suis le meilleur au monde »
« Pascal veut être le premier Noir directeur du SPVM »
Si certains titres peuvent aujourd’hui faire esquisser un sourire, ils permettent néanmoins de constater à quel point la carrière de boxeur lavallois a été meublée. Pour le meilleur et pour le pire, Pascal a occupé l’espace médiatique comme très peu d’individus l’avaient fait auparavant.
Il faut dire qu’il s’est vite approprié un créneau auquel personne n’avait jamais véritablement osé toucher jusque-là : celui des ambitions plus grandes que nature. Il n’y avait pas de limites et même si elles avaient existé, Pascal se serait donné le mandat de les dépasser et les repousser.
Pascal jurait évidemment lorsque comparé à un Éric Lucas ou à un Lucian Bute, des champions prisés par la population en raison de leur personnalité résolument humble. Les visées n’étaient pas nécessairement modestes, sauf qu’elles n’étaient au grand jamais exposées publiquement.
Il est tellement facile de l’oublier aujourd’hui, mais Pascal a trimé extrêmement dur pour gagner le respect et l’admiration du public québécois. Ses farouches partisans ne l’ont jamais laissé tomber, mais plusieurs amateurs le trouvaient fantasque et le détestaient ainsi profondément.
C’est probablement pour cette raison que la majorité des spectateurs s’étaient rangés derrière Adrian Diaconu avant le premier choc entre les deux boxeurs. Mais comme dans le quatrième volet d’une célèbre série de films, Pascal a convaincu ses détracteurs les uns après les autres.
Non, il n’avait pas du tout l’intention de changer, sauf que tout le monde n’aurait pas le choix de le respecter. Personne ne pouvait rester insensible en le voyant se faire replacer l’épaule droite par son cutman Russ Anber entre les rounds de son deuxième affrontement contre Diaconu. Et dans la victoire, comme dans la défaite, il affrontait toujours la tempête. Jean Pascal s’assumait.
« Je me sens triste, mais je pense que j’ai encore un bel avenir devant moi », avait-il dit après avoir fondu en larmes à la suite de sa deuxième défaite contre Sergey Kovalev. La seule fois qu’il n’a pas fait face à la musique après son revers contre Eleider Alvarez, mais personne ne pouvait lui reprocher à ce moment-là. Il avait tant donné et tout le monde le savait totalement dévasté.
Malheureusement, cette réelle authenticité n’est pas toujours celle qui a fait le plus les unes des journaux et des sites web au fil du temps. Ses déclarations fracassantes pendant les conférences de presse faisant la promotion de ses combats étaient parfois si exagérées qu’elles occultaient tout le reste. Pascal a souvent eu des choses à dire, il s’agissait simplement de tendre l’oreille.
Reste que ce sont les ambitions démesurées de Pascal qui ont permis à la boxe québécoise de s’établir comme l’une des capitales mondiales du sport l’instant de quelques saisons. Chad Dawson, Bernard Hopkins et Sergey Kovalev ont tous été de passage au Québec pour l’affronter. Avant Pascal, ce sont les Québécois qui devaient se déplacer pour fréquenter cette noblesse.
Heureusement, Pascal a fini par obtenir une reconnaissance universelle lorsqu’il s’est retrouvé dans le rôle de négligé. Alors que plus personne ne croyait en ses chances, il a continué à bosser comme un forcené et est parvenu à redevenir champion du monde. Même ceux qui le croyaient complètement usé à la corde après sa défaite contre Dmitry Bivol n’ont eu d’autre choix que de se raviser et lui rendre hommage à la suite de sa victoire dramatique face à Marcus Browne.
Comme dans n’importe quelle relation passionnelle, celle entre Pascal avec le public québécois a été marquée par de cruels déchirements et d’intenses retrouvailles. Et en analysant tout le chemin parcouru avec un pas de recul, il faut se rendre à l’évidence : Pascal est le plus grand.
Francis Paquin