MONTRÉAL - Plusieurs blagues et bravades ont été lancées, vendredi soir, lors du point de presse qui a suivi la victoire expéditive de Lucian Bute aux dépens du Colombien Fulgencio Zuniga devant 12 153 spectateurs au Centre Bell. Ce qui traduisait bien l'état d'esprit du boxeur montréalais d'origine roumaine, toujours champion du monde IBF des super-moyens, et de son entraîneur Stéphan Larouche.

"Placé où on était dans le coin, on a perdu son gant de vue tellement son coup lui est rentré profondément dans le corps", a dit Larouche de l'uppercut du gauche au corps que Bute a asséné à Zuniga pour envoyer ce dernier au tapis au quatrième round, ce qui a mené quelques secondes plus tard à l'arrêt du combat par l'arbitre. "Il a fait une indigestion de cuir."

"Tout est question d'argent à ce niveau. Tu n'as peur de personne.... à la condition qu'on te donne assez d'argent", a par ailleurs lancé Larouche en guise de boutade en parlant des prochains adversaires que Bute pourrait affronter dans une autre défense optionnelle en juin, à Montréal ou à Québec, tels que Kelly Pavlik, Jermain Taylor, Carl Froch, Allan Green ou Carlos de Leon fils.

"Avant le combat, j'ai demandé à Lucian qu'on prenne sa photo dans une de ces machines à 2,50 $. On l'a affiché au babillard et je lui ai dit, 'Lucian, ton but, ça doit être de terminer ta carrière avec un aussi beau visage que maintenant'. Oscar De La Hoya était beau avant de commencer sa carrière et il l'est encore aujourd'hui, ça c'est un vrai champion!", a aussi lancé Larouche, en pensant aux combats qui viendront ensuite, contre Librado Andrade sans doute à l'automne, puis contre des "vrais" gros noms de la boxe mondiale, si tout va bien, en 2010.

"Je ne me suis pas encore regardé dans le miroir, mais je pense que je m'en suis sorti pas trop 'magané'", a quant à lui dit Bute de sa victoire contre Zuniga.

Bref, Bute et Larouche étaient heureux après cette troisième défense de la ceinture que l'athlète-vedette d'InterBox a décrochée aux dépens d'Alejandro Berrio, le 19 octobre 2007. Heureux d'avoir cloué le bec à ceux qui le croyaient fragile après qu'il eut frôlé le désastre, en octobre dernier, lors du 12e round de son fameux combat contre Librado Andrade.

"Je lui ai parlé ce matin, il est comme flambant neuf, a indiqué Larouche, samedi. (Bute) était content de son combat, d'avoir retrouvé la satisfaction de faire plaisir à ses partisans.

"Ç'a été vraiment une belle soirée, a ajouté Larouche. Une soirée qui arrive au bon moment pour Lucian. Si ç'avait été le moindrement difficile pour lui, les gens auraient encore posé toutes sortes de questions.

"Je l'ai senti un peu frustré par ces questions cette semaine, même s'il s'était promis d'y faire face. Mais je ne voyais pas ça d'un mauvais oeil. Je me disais qu'il allait nous sortir quelque chose de spécial."

Et c'est ce qu'il a fait. Même qu'il a réalisé quelque chose qu'il n'avait pas réussi depuis le 12 février 2005 contre Donnell Wiggins, c'est-à-dire obtenir le K.-O. en première moitié de combat. Ses huit affrontements suivants, contre des adversaires d'un niveau de plus en plus élevé, avaient tous nécessité huit rounds ou plus.

La valeur de Zuniga

Certains mettront en doute la valeur réelle de Zuniga. Mais Larouche a prévenu ceux qui pourraient croire que Bute, vendredi, a vaincu sans péril et triomphé sans gloire.

"Plusieurs experts, des spécialistes américains, disaient que Lucian revenait trop vite (après sa difficile fin de combat contre Andrade), que Zuniga était trop agressif, qu'il allait lui faire revivre le même cauchemar", a rappelé Larouche.

Mais ça ne s'est pas passé comme ça du tout.

"Pour répéter le commentaire de Gordon Hall (le chef de production du réseau Showtime)... Si Lucian a fait un pas en arrière après son combat contre Andrade, sa performance contre Zuniga lui a fait prendre deux pas en avant", a relaté Larouche.

"Certains se demandent ce que Lucian avait à gagner contre un 10e aspirant, a poursuivi l'entraîneur de Bute. Mais au classement mondial, il y a 15 aspirants. Chacun d'entre eux a une chance de se retrouver en championnat du monde. C'est certain qu'on va prendre le combat le plus difficile une fois par année seulement, et c'est la défense obligatoire, qui a été disputée contre Andrade l'automne dernier... Mais Zuniga était le choix du réseau Showtime. Ils nous ont dit, si Zuniga est là, c'est certain qu'on va être là aussi."

"Zuniga a un bon nom aux États-Unis, il est très respecté là-bas", a souligné Bute.

"Il n'était pas notre premier choix, mais c'est la télé américaine qui l'a choisi", a ajouté Larouche.

Larouche a indiqué, samedi, que le premier choix d'InterBox aurait été l'Allemand Robert Stieglitz, qui a perdu contre Andrade en combat éliminatoire l'an dernier. C'est un boxeur bien coté... mais en Europe surtout. Larouche aurait aimé l'affronter car il aurait permis à Bute de continuer à peaufiner son style en vue de combats de plus grande envergure encore. Or, l'objectif d'InterBox en ce moment, c'est de faire connaître Bute aux États-Unis, afin de permettre à celui-ci de passer à la caisse.

L'arbitre

Par ailleurs, Larouche s'est dit très satisfait du travail de l'arbitre américain Lindsey Page fils, vendredi.

"On a vu que c'est un arbitre professionnel. Lucian a frappé bas au début du combat et l'arbitre n'a pas arrêté l'affrontement, il a simplement fait un signe à Lucian, il a laissé l'action se dérouler.

"Mais il n'était pas meilleur que les arbitres du Québec, a ajouté Larouche. C'est juste qu'il venait de l'étranger, qu'il était neutre. Ceux de Montréal sont aussi neutres, par contre. Il ne faut pas voir (le choix de Page) comme un désaveu des arbitres d'ici. Dans les circonstances, c'est ce qu'il fallait faire."