Je suis en admiration devant Hermann
Boxe samedi, 7 juin 2008. 20:29 jeudi, 12 déc. 2024. 03:41
Au lendemain de sa victoire face au Français Souleymane M'Baye, je ne peux faire autrement que de souligner à quel point Hermann Ngoudjo est un athlète courageux. Pendant dix rounds, il a affronté l'un des meilleurs boxeurs de sa catégorie avec un seul œil et jamais on n'a senti que ça l'embêtait.
Vous savez, dans une situation semblable, plusieurs boxeurs tentent subtilement d'attirer l'attention sur leur blessure. Ils ne l'avoueront jamais, mais dans le fond, ils seront bien contents si quelqu'un décide de mettre fin au combat. Mais Hermann, après avoir été coupé à l'œil gauche au deuxième round, n'a jamais voulu donner une quelconque indication qu'il était dérangé. Et pourtant, il a déclaré au terme du combat qu'il avait eu l'impression que son œil allait sortir de son orbite! Quel bel exemple de détermination et de courage
Personnellement, j'étais presque en état de panique aux abords du ring quand j'ai remarqué sa blessure! Quand tu vois que ton poulain a un œil complètement fermé au tout début d'un combat, ça n'annonce rien de bon Mais les hommes de coin de Hermann ont fait un travail remarquable pour le rassurer et le guider vers la victoire.
Chaque fois qu'il y a un combat de cette importance, il y a un certain drame qui se joue en même temps. Hermann est un gars qui se dédie complètement à son sport. Il n'a quand même pas boxé souvent et s'il avait perdu contre M'Baye, c'aurait été un recul important pour sa carrière. Pas parce qu'il est très vieux - il n'a que 28 ans - mais parce que ça aurait signifié qu'il n'aurait pas eu l'opportunité de se battre pour un titre mondial avant au moins deux ans. Tous ses projets auraient été reportés.
Et puis, si tu te fais battre par un adversaire qui est simplement meilleur que toi, tu te dis que dans le fond, il n'y a avait rien à faire. Mais perdre à cause d'une blessure comme ça, qui t'empêche de te faire justice, c'est décourageant.
Je dois vous avouer que j'étais craintif quand j'ai vu l'arbitre Marlon B. Wright demander à Hermann de se présenter devant le médecin au début de la cinquième reprise, mais je ne voulais pas intervenir. Nos médecins ici au Québec sont parmi les plus compétents au monde et si on avait jugé qu'il fallait arrêter le combat pour la santé de Hermann, je n'aurais jamais protesté. Mais quand on a donné le feu vert pour continuer le combat, je savais que Hermann ne courait aucun risque. À partir de ce moment, c'était à lui de gérer ce problème et il l'a fait de brillante façon.
Grâce à sa détermination, Hermann a repoussé du revers de la main tous les scénarios indésirables. Et aujourd'hui, même s'il a un œil complètement fermé, il nous jure qu'il monterait dans le même ring que Paul Malignaggi demain matin! On va quand même le laisser se reposer un peu, mais on va tout faire pour le placer dans les situations les plus avantageuses pour lui dans le futur.
Changement de stratégie
La performance de Hermann est d'autant plus impressionnante que sa blessure l'a obligé à changer complètement sa stratégie.
En étudiant les tendances de M'Baye sur bandes vidéo, on s'était rendu compte que depuis le début de sa carrière, il éprouvait plus de difficulté lorsque il était mis sous pression par son adversaire. Chaque fois qu'un rival est resté à distance et l'a regardé boxer, M'Baye paraissait très bien et parvenait à l'emporter. Pendant ses deux mois de préparation, avec tous les partenaires qu'il a eus, Hermann s'est préparé à se battre exactement comme il l'a fait au deuxième round vendredi. Le but était de livrer un combat très intense, de ne pas laisser respirer M'Baye, de le bousculer.
Toutefois, après le deuxième, Hermann a dû réajuster le tir car lorsqu'il était près de M'Baye, il ne voyait pas d'un côté. Il ne pouvait plus utiliser son jab puisqu'il s'exposait à la droite de son adversaire. Il a donc été obligé d'utiliser sa vitesse pour se déplacer, se tenir à distance et contre-attaquer. Il voulait un combat physique, mais il a dû s'embarquer dans une lutte stratégique et malgré ça, il est parvenu à aller chercher la victoire. Il a envoyé plus de coups et a été plus précis que M'Baye.
L'avantage de la glace
Après le combat, certains sont demeurés avec l'impression que Souleymane M'Baye s'était peut-être fait jouer le même tour que Hermann lors de ses affrontements contre Malignaggi et Jose Luis Castillo, c'est-à-dire que le boxeur local avait tiré un avantage du fait qu'il se battait devant ses partisans.
Je mentirais si je disais que je n'aurais pas été un peu plus nerveux si le combat s'était déroulé à l'étranger. Sauf que je trouve important de souligner que des trois juges qui notaient le combat, c'est l'Américain qui a donné le plus grand avantage à Hermann. Du côté de ESPN, on favorisait notre poulain par quatre points.
Peut-être que M'Baye aurait reçu plus d'appuis si le combat avait eu lieu en France, mais je constate tout de même que Hermann a véritablement fait tout ce qu'il fallait pour aller chercher la victoire. Les rounds étaient peut-être serrés en raison de son changement de stratégie, mais dans la majorité des cas, c'est lui qui était en contrôle.
Que décidera la clan Malignaggi?
On sait tous ce que la plus récente victoire de Hermann signifie pour lui : il est maintenant l'aspirant obligatoire à la ceinture de champion du monde de l'IBF que détient actuellement l'Américain Paul Malignaggi. Hermann pourrait donc avoir la chance de réaliser son rêve de devenir champion et du même coup prendre sa revanche sur Malignaggi au cours des prochains mois. Ou peut-être pas
Plusieurs personnes prétendent que les décisions des organismes de sanctions, ça ne vaut pas cher. C'est peut-être vrai parfois, mais ce n'est pas le cas avec l'IBF. Le WBC, la WBO et la WBA sont basés au Mexique, à Panama et à Porto Rico et il y a un peu plus de laxisme, je vous dirais, dans leurs règlements. Mais pas avec l'IBF, qui a ses bureaux aux États-Unis. Pour avoir eu à négocier à plusieurs reprises avec ses dirigeants, je peux vous dire qu'ils font respecter leurs règlements à la lettre et qu'ils sont très by the book.
Dans le cas présent, le règlement dit que Paul Malignaggi doit donner un combat à son aspirant obligatoire avant le 5 octobre. Soixante jours avant le 5 octobre, c'est-à-dire le 5 juillet, le groupe GYM va recevoir une lettre de l'IBF qui l'avisera que débute la période de négociations libres avec le clan Malignaggi, période qui dure habituellement une quinzaine de jours. S'il n'y a pas d'entente par la suite, l'IBF nous imposera une date pour les appels d'offre.
Malignaggi a le droit de faire une demande de dérogation, mais cette demande ne sera pas acceptée si l'aspirant n'a pas donné son accord. Ça me surprendrait toutefois qu'on se rende jusque-là. Lou DiBella, celui qui s'occupe de la carrière de Paul Malignaggi, est un promoteur avec qui on fait souvent affaire, c'est un ami.
Dans la division présentement, le plus gros combat possible opposerait probablement Malignaggi à Ricky Hatton, et je ne suis pas certain qu'il serait à notre avantage de bloquer une telle possibilité. C'est sûr que je ne m'attends pas à ce que Hatton donne une chance à Hermann s'il défait Malignaggi, mais ce combat apporterait une belle visibilité à la division.
Et pour qu'on accepte un compris, il va falloir que Hermann soit compensé raisonnablement. De toute façon, le portrait sera plus clair lorsqu'on aura débuté les discussions avec le clan Malignaggi. On va voir tout de suite dans les premières discussions les intentions du clan Mali.
Huit rounds de préparation pour Demers
Un petit mot en terminant sur la prestation de Sébastien Demers, qui n'a eu aucune difficulté à s'imposer devant l'Américain Sam Hill.
Il ne faut pas juger trop sévèrement la qualité de l'adversaire qu'on avait donné à Sébastien. Hill était en bonne condition physique, il était plus gros que Sébastien, mais il s'est rendu compte tôt dans le combat qu'il ne pouvait pas rivaliser d'intensité, de technique et de vitesse avec le favori de la foule. Il a décidé de tenter de le laisser s'épuiser pour le surprendre vers la fin, mais Sébastien ne s'est jamais fatigué et ça a donné un combat à sens unique.
Dans les circonstances, Sébastien a fait exactement ce qu'il avait à faire.
Il ne faut pas oublier que Sébastien a accepté ce combat à pied levé. Il en a un autre très important à livrer le 11 juillet prochain, dans le même programme que Joachim Alcine. Vendredi, il a profité d'un bon combat préparatoire, question d'être encore meilleur, mieux préparé dans un mois. C'est comme ça qu'il faut le voir et dans cette optique, le combat contre Hill a atteint ses objectifs.
*Propos recueillis par Nicolas Landry
Vous savez, dans une situation semblable, plusieurs boxeurs tentent subtilement d'attirer l'attention sur leur blessure. Ils ne l'avoueront jamais, mais dans le fond, ils seront bien contents si quelqu'un décide de mettre fin au combat. Mais Hermann, après avoir été coupé à l'œil gauche au deuxième round, n'a jamais voulu donner une quelconque indication qu'il était dérangé. Et pourtant, il a déclaré au terme du combat qu'il avait eu l'impression que son œil allait sortir de son orbite! Quel bel exemple de détermination et de courage
Personnellement, j'étais presque en état de panique aux abords du ring quand j'ai remarqué sa blessure! Quand tu vois que ton poulain a un œil complètement fermé au tout début d'un combat, ça n'annonce rien de bon Mais les hommes de coin de Hermann ont fait un travail remarquable pour le rassurer et le guider vers la victoire.
Chaque fois qu'il y a un combat de cette importance, il y a un certain drame qui se joue en même temps. Hermann est un gars qui se dédie complètement à son sport. Il n'a quand même pas boxé souvent et s'il avait perdu contre M'Baye, c'aurait été un recul important pour sa carrière. Pas parce qu'il est très vieux - il n'a que 28 ans - mais parce que ça aurait signifié qu'il n'aurait pas eu l'opportunité de se battre pour un titre mondial avant au moins deux ans. Tous ses projets auraient été reportés.
Et puis, si tu te fais battre par un adversaire qui est simplement meilleur que toi, tu te dis que dans le fond, il n'y a avait rien à faire. Mais perdre à cause d'une blessure comme ça, qui t'empêche de te faire justice, c'est décourageant.
Je dois vous avouer que j'étais craintif quand j'ai vu l'arbitre Marlon B. Wright demander à Hermann de se présenter devant le médecin au début de la cinquième reprise, mais je ne voulais pas intervenir. Nos médecins ici au Québec sont parmi les plus compétents au monde et si on avait jugé qu'il fallait arrêter le combat pour la santé de Hermann, je n'aurais jamais protesté. Mais quand on a donné le feu vert pour continuer le combat, je savais que Hermann ne courait aucun risque. À partir de ce moment, c'était à lui de gérer ce problème et il l'a fait de brillante façon.
Grâce à sa détermination, Hermann a repoussé du revers de la main tous les scénarios indésirables. Et aujourd'hui, même s'il a un œil complètement fermé, il nous jure qu'il monterait dans le même ring que Paul Malignaggi demain matin! On va quand même le laisser se reposer un peu, mais on va tout faire pour le placer dans les situations les plus avantageuses pour lui dans le futur.
Changement de stratégie
La performance de Hermann est d'autant plus impressionnante que sa blessure l'a obligé à changer complètement sa stratégie.
En étudiant les tendances de M'Baye sur bandes vidéo, on s'était rendu compte que depuis le début de sa carrière, il éprouvait plus de difficulté lorsque il était mis sous pression par son adversaire. Chaque fois qu'un rival est resté à distance et l'a regardé boxer, M'Baye paraissait très bien et parvenait à l'emporter. Pendant ses deux mois de préparation, avec tous les partenaires qu'il a eus, Hermann s'est préparé à se battre exactement comme il l'a fait au deuxième round vendredi. Le but était de livrer un combat très intense, de ne pas laisser respirer M'Baye, de le bousculer.
Toutefois, après le deuxième, Hermann a dû réajuster le tir car lorsqu'il était près de M'Baye, il ne voyait pas d'un côté. Il ne pouvait plus utiliser son jab puisqu'il s'exposait à la droite de son adversaire. Il a donc été obligé d'utiliser sa vitesse pour se déplacer, se tenir à distance et contre-attaquer. Il voulait un combat physique, mais il a dû s'embarquer dans une lutte stratégique et malgré ça, il est parvenu à aller chercher la victoire. Il a envoyé plus de coups et a été plus précis que M'Baye.
L'avantage de la glace
Après le combat, certains sont demeurés avec l'impression que Souleymane M'Baye s'était peut-être fait jouer le même tour que Hermann lors de ses affrontements contre Malignaggi et Jose Luis Castillo, c'est-à-dire que le boxeur local avait tiré un avantage du fait qu'il se battait devant ses partisans.
Je mentirais si je disais que je n'aurais pas été un peu plus nerveux si le combat s'était déroulé à l'étranger. Sauf que je trouve important de souligner que des trois juges qui notaient le combat, c'est l'Américain qui a donné le plus grand avantage à Hermann. Du côté de ESPN, on favorisait notre poulain par quatre points.
Peut-être que M'Baye aurait reçu plus d'appuis si le combat avait eu lieu en France, mais je constate tout de même que Hermann a véritablement fait tout ce qu'il fallait pour aller chercher la victoire. Les rounds étaient peut-être serrés en raison de son changement de stratégie, mais dans la majorité des cas, c'est lui qui était en contrôle.
Que décidera la clan Malignaggi?
On sait tous ce que la plus récente victoire de Hermann signifie pour lui : il est maintenant l'aspirant obligatoire à la ceinture de champion du monde de l'IBF que détient actuellement l'Américain Paul Malignaggi. Hermann pourrait donc avoir la chance de réaliser son rêve de devenir champion et du même coup prendre sa revanche sur Malignaggi au cours des prochains mois. Ou peut-être pas
Plusieurs personnes prétendent que les décisions des organismes de sanctions, ça ne vaut pas cher. C'est peut-être vrai parfois, mais ce n'est pas le cas avec l'IBF. Le WBC, la WBO et la WBA sont basés au Mexique, à Panama et à Porto Rico et il y a un peu plus de laxisme, je vous dirais, dans leurs règlements. Mais pas avec l'IBF, qui a ses bureaux aux États-Unis. Pour avoir eu à négocier à plusieurs reprises avec ses dirigeants, je peux vous dire qu'ils font respecter leurs règlements à la lettre et qu'ils sont très by the book.
Dans le cas présent, le règlement dit que Paul Malignaggi doit donner un combat à son aspirant obligatoire avant le 5 octobre. Soixante jours avant le 5 octobre, c'est-à-dire le 5 juillet, le groupe GYM va recevoir une lettre de l'IBF qui l'avisera que débute la période de négociations libres avec le clan Malignaggi, période qui dure habituellement une quinzaine de jours. S'il n'y a pas d'entente par la suite, l'IBF nous imposera une date pour les appels d'offre.
Malignaggi a le droit de faire une demande de dérogation, mais cette demande ne sera pas acceptée si l'aspirant n'a pas donné son accord. Ça me surprendrait toutefois qu'on se rende jusque-là. Lou DiBella, celui qui s'occupe de la carrière de Paul Malignaggi, est un promoteur avec qui on fait souvent affaire, c'est un ami.
Dans la division présentement, le plus gros combat possible opposerait probablement Malignaggi à Ricky Hatton, et je ne suis pas certain qu'il serait à notre avantage de bloquer une telle possibilité. C'est sûr que je ne m'attends pas à ce que Hatton donne une chance à Hermann s'il défait Malignaggi, mais ce combat apporterait une belle visibilité à la division.
Et pour qu'on accepte un compris, il va falloir que Hermann soit compensé raisonnablement. De toute façon, le portrait sera plus clair lorsqu'on aura débuté les discussions avec le clan Malignaggi. On va voir tout de suite dans les premières discussions les intentions du clan Mali.
Huit rounds de préparation pour Demers
Un petit mot en terminant sur la prestation de Sébastien Demers, qui n'a eu aucune difficulté à s'imposer devant l'Américain Sam Hill.
Il ne faut pas juger trop sévèrement la qualité de l'adversaire qu'on avait donné à Sébastien. Hill était en bonne condition physique, il était plus gros que Sébastien, mais il s'est rendu compte tôt dans le combat qu'il ne pouvait pas rivaliser d'intensité, de technique et de vitesse avec le favori de la foule. Il a décidé de tenter de le laisser s'épuiser pour le surprendre vers la fin, mais Sébastien ne s'est jamais fatigué et ça a donné un combat à sens unique.
Dans les circonstances, Sébastien a fait exactement ce qu'il avait à faire.
Il ne faut pas oublier que Sébastien a accepté ce combat à pied levé. Il en a un autre très important à livrer le 11 juillet prochain, dans le même programme que Joachim Alcine. Vendredi, il a profité d'un bon combat préparatoire, question d'être encore meilleur, mieux préparé dans un mois. C'est comme ça qu'il faut le voir et dans cette optique, le combat contre Hill a atteint ses objectifs.
*Propos recueillis par Nicolas Landry