C'est une grosse semaine qui s'amorce pour moi et toute l'équipe de GYM et aujourd'hui, je dois vous dire que je suis très enthousiaste. On travaille pendant toute notre vie pour pouvoir vivre des moments comme ceux-là.

Quand vous entendez un boxeur dire qu'il a hâte que son combat soit fini pour passer à autre chose, c'est signe qu'il n'aime pas assez ce qu'il fait. Les vrais, les champions, apprécient énormément la semaine précédant leur combat et leur bonheur décuple lorsqu'ils se retrouvent enfin sur le ring. C'est dans cet état d'esprit qu'on se trouve. On est dans notre élément présentement.

À quelques jours de son affrontement contre Chad Dawson, il est facile de sentir la fébrilité qui suit Jean Pascal partout où il va. L'entraînement public de lundi est le meilleur que j'ai vu depuis l'époque où Gatti était en ville.

Lorsqu'on l'a rencontré en fin de semaine pour la pesée de sept jours, Gary Shaw, le promoteur de Dawson, nous a dit que si Jean devait battre son poulain samedi, il deviendrait du jour au lendemain une méga-star de la boxe internationale. C'est comme si Éric Lucas avait battu Roy Jones ou encore si Arturo Gatti, même s'il était déjà un boxeur extrêmement populaire en raison de son style fougueux et sans compromis, avait battu Oscar De La Hoya.

Dawson est présentement vu comme le quatrième meilleur boxeur livre pour livre au monde par ESPN. Une victoire de Jean ne signifierait pas nécessairement qu'il grimperait à cet échelon dans les classements, mais il se retrouverait assurément dans le top 10 avec, en poche, un contrat HBO. Au niveau de la boxe québécoise, seul Gatti en a fait autant.

L'enjeu est donc beaucoup plus gros que le titre du WBC et va même au-delà de la suprématie mondiale chez les mi-lourds.

Si en plus on peut compter, comme à l'habitude, sur une foule endiablée qui va soulever Jean vers la victoire, Montréal pourrait devenir un arrêt régulier dans le circuit du réseau HBO. Ça aussi, c'est très important.

Jusqu'à maintenant, la vente de billets se déroule comme on l'avait prévu. J'habite à Candiac, sur la rive sud de Montréal, et tous les matins depuis un mois, je traverse le pont sans aucune difficulté pour me rendre au travail. C'est signe que les gens sont encore en vacances et pour cette raison, c'est plus difficile de rejoindre le public. Malgré tout, on est en voie d'atteindre nos objectifs, c'est-à-dire attirer une foule de 8000 à 10 000 amateurs de boxe.

Jean Pascal est rodé au quart de tour

Tout au long du camp d'entraînement de Jean, on est resté en communication constante avec lui, son entraîneur Marc Ramsay et son psychologue sportif Rob Schinke. Selon leurs rapports, tout s'est réellement déroulé sans anicroche. Si Dawson gagne, ce sera vraiment parce qu'il est le meilleur des deux boxeurs. Jean sera au meilleur de ses capacités et on est convaincu que ce sera suffisant pour l'emporter. Sinon, on assistera tout de même à un combat qui entrera dans les annales de la boxe.

Dawson est un grand gaucher qu'on peut qualifier de boxeur pur. Ses coups sont courts et compacts, il aime boxer à distance. Il aime lancer des coups au corps de temps en temps, mais c'est un gars qui ne prend pas beaucoup de chances. Il a aussi une défensive très fermée. Il essaie de dominer ses adversaires, mais s'il sent la soupe chaude, il se contente de ce que son adversaire lui donne.

À l'opposé, Jean est un boxeur qui aime prendre des chances. Très agressif, il va parier et sauter sur son adversaire avec beaucoup de vitesse. Il frappe aussi avec beaucoup d'autorité. Dawson est plus prévisible, mais tout ce qu'il fait, il le fait extrêmement bien. Jean est plus explosif et instinctif.

On assistera tantôt à un beau jeu d'échec, tantôt à de passionnantes explosions, mais à mon avis, les trois ou quatre premiers rounds seront vraiment déterminants. Dawson n'a jamais tiré de l'arrière dans un combat. C'est plus facile de pratiquer un style défensif et de capitaliser sur les erreurs de ton rival quand tu es en avance. Le premier tiers du combat devient donc crucial. Si Jean réussit à aller chercher le lead pour forcer Dawson à se compromettre, l'aspirant se retrouvera ainsi à l'extérieur de sa zone de confort.

Manque de respect : une question de visibilité

Je ne trouve pas que Jean obtient le respect qu'il mérite depuis quelques semaines, autant en provenance du clan Dawson que des différents médias américains. Cette attitude ne me surprend toutefois pas du tout.

Jean n'a rien cassé lors des rares fois où il a eu l'occasion de se faire valoir devant les lentilles de la télévision américaine. En 2006, quand il avait battu Darnell Boone au stade Uniprix, il en était encore à ses premiers pas et n'avait pas encore trouvé son style. Disons qu'il n'avait pas fait aussi bonne impression que David Lemieux à sa première audition devant nos voisins du sud.

Il y a ensuite eu ce combat en Floride contre Omar Pittman, en 2008, alors que Jean s'était surtout faire remarquer avec sa sortie contre Edison Miranda aux abords du ring. Mais après ça, les Américains ne l'ont plus revu. Ils ont entendu parler de sa défaite contre Carl Froch et ont pu voir sa première victoire contre Adrian Diaconu sur Versus, mais il est quand même passé plutôt inaperçu.

Les Américains ont cette façon un peu chauviniste de voir les choses. S'ils ne te voient pas, tu ne peux pas être très bon. Récemment, Dmitry Pirog était négligé à 5 contre 1 avant de passer le K.-O. à Daniel Jacobs. En fin de semaine dernière, Devon Alexander était largement favori contre Andriy Kotelnik, mais il l'a emporté de peine et de misère.

Alors pour les Américains, Chad Dawson, après ses victoires sur Glen Johnson et Antonio Tarver, s'est élevé comme le meilleur mi-lourds au monde et à leurs yeux, c'est impossible que quelqu'un, quelque part, lui soit supérieur.

Sous-carte : la relève locale à l'honneur

La sous-carte pour le gala de samedi est complétée et sera composée de jeunes boxeurs locaux.

Au départ, Gary Shaw devait amener deux boxeurs de l'extérieur pour les incorporer dans l'horaire de la soirée, mais on a finalement décidé de donner la chance à des athlètes d'ici. Ceux-ci compteront chacun sur leur propre groupe de supporteurs qui contribueront à amener encore plus de gens au Centre Bell et à générer plus d'intérêt pour la sous-carte.

Évidemment, on aurait aimé que HBO prévoit un deuxième gros combat pour avoir une demi-finale avec du punch, mais ici, David Lemieux et Antonin Décarie n'étaient pas vraiment disponibles. Pour inclure David dans l'horaire de la soirée, non seulement il aurait fallu défaire l'horaire qui lui a été planifié, mais on n'aurait même pas eu les moyens de lui offrir un adversaire qui lui aurait permis de progresser. Donc plutôt que de l'opposer à un adversaire qu'il aurait démoli en un ou deux rounds, on a préféré passer notre tour. De toute façon, David fera ses propres finales maintenant.

Ceci étant dit, on est heureux de ramener Dierry Jean. Il a été blessé pendant un bout, mais son entraîneur et son gérant nous disent de très belles choses à son sujet. J'ai bien hâte de le revoir. On verra aussi Tony Luis en action. Tony progresse bien et affrontera un adversaire qui nous donnera une bonne idée de sa valeur.

J'espère que vous êtes aussi excité que moi à l'approche de cette soirée qui s'annonce électrisante. Vous pourrez lire mes impressions dimanche, au lendemain du gala.

D'ici là, bonne semaine!


*Propos recueillis par Nicolas Landry.