MONTRÉAL - Il y a 18 mois aujourd'hui, Renan St-Juste voyait plusieurs années de travail gaspillées, alors qu'il s'inclinait devant l'obscur Marcus Upshaw en demi-finale d'un gala présenté au Colisée Pepsi.

Seul dans son vestiaire, ignoré par les journalistes qui n'en avaient que pour l'attraction principale mettant en vedette Éric Lucas et Librado Andrade, St-Juste voyait le tapis lui glisser sous les pieds. C'est qu'il était à ce moment-là aspirant mondial aux titres des poids moyens de la WBA et du WBC.

Plutôt que de se laisser abattre, le boxeur gaucher a pleinement profité de son combat de retour contre Sébastien Demers pour lancer un message, il était loin d'être fini. Sa spectaculaire victoire par knock-out a d'ailleurs été récompensée, puisqu'il s'est retrouvé quatrième aspirant à la ceinture des super-moyens de la WBO.

Malheureusement, la joie a rapidement cédé sa place à la déception. Une pneumonie l'a empêché d'affronter Edison Miranda, tandis que Mikkel Kessler et Kelly Pavlik n'ont tout simplement jamais osé défier St-Juste dans le cadre de combats qui se voulaient pourtant préparatoires. Ainsi, il n'a disputé qu'un seul duel depuis son éclatante victoire contre Demers au mois de décembre 2010, c'était en juillet dernier en Roumaine face à Jaudiel Zepeda.

Mais tout cela ne sera que de l'histoire ancienne lorsque St-Juste (23-2-1, 15 K.-O.) montera sur le ring vendredi soir en Californie pour y croiser le fer avec l'Américain Anthony Dirrell (23-0, 20 K.-O.). Le gagnant deviendra l'aspirant obligatoire au titre des super-moyens du WBC présentement détenu par le Britannique Carl Forch.

"Mon entourage s'est souvent découragé, mais jamais moi", a avoué St-Juste, lundi après-midi, lors d'un point de presse tenu au gymnase d'InterBox situé au Centre Claude-Robillard de Montréal. "Je me suis toujours accroché à l'expression ‘chaque chose en son temps'."

À l'aube de la quarantaine, le pugiliste de Repentigny sait pertinemment qu'il n'a pas le droit à l'erreur. Il refuse ainsi d'envisager la suite des événements, contrairement à son adversaire qui n'a pas hésité à déclarer qu'il aimerait bien en venir aux coups avec Lucian Bute dans un avenir rapproché.

"Il va peut-être me prendre à la légère en apprenant que je suis âgé de 39 ans, mais il va voir que ça rentre vitre comme si j'avais 22 ou 23 ans", a blagué St-Juste. "Il pensera à qui il voudra pendant le combat, mais j'ai l'impression qu'il va peut-être penser à sa mère!"

Pour son gérant Hugh Jean-Claude, il sera également important de reléguer aux oubliettes sa contre-performance de mai 2009 devant les caméras du réseau américain ESPN. Le duel de vendredi sera présenté sur Showtime dans le cadre de leur série ShoBox.

"Ce sera notre finale d'association avant la finale de la Coupe Stanley", a illustré M. Jean-Claude. "Renan a toujours été à son meilleur lorsqu'il y a énormément de pression."

Un duel de cogneurs

Pour son combat contre Dirrell, St-Juste a fait appel aux services d'un nouvel entraîneur. Et comme cela a été le cas pour David Lemieux avec Marc Ramsay, la transition s'est faite toute en douceur avec Pierre Bouchard.

"Je ne suis pas passé de gauche à droite", a expliqué le gaucher. "Je m'entraînais déjà ici. J'ai toujours reçu les conseils de Pierre, Stéphan (Larouche) et Jean-François Bergeron pour mes combats lorsque j'étais avec Mike Moffa."

"Pierre connaît mon style et n'a pas essayé de le changer de A à Z. Ce sont des points stratégiques qui ont été travaillés. Des détails qui n'ont pas l'air importants, mais qui le sont pendant un combat."

"Idéalement, j'aurais aimé profiter d'un bon trois, quatre ou cinq mois avec Pierre, mais c'est une offre que je ne pouvais pas refuser. Je ne pouvais pas demander de reporter le combat après les Fêtes."

Bouchard n'a quant à lui pas fait de cas du fait que leur association n'est vieille que d'un mois.

"L'idée était de ne rien changer pour ne pas le mêler", a précisé celui qui est également l'entraîneur d'Adrian Diaconu et de Jo Jo Dan. "Nous avons plutôt fait des ajustements."

"J'ai été impressionné par la vitesse des mains de Renan. Si Jo Jo en avait eu autant, il n'aurait pas perdu son combat contre Selçuk Aydin en Turquie!"

Même si St-Juste et Dirrell sont reconnus pour leur force de frappe - ils totalisent 35 K.-O. en 49 combats -, le Québécois s'est préparé pour un exténuant duel de 12 rounds. Il ne croit pas que le passé est nécessairement garant de l'avenir.

"J'ai affronté de meilleurs adversaires, mais cela ne compte plus lorsque tu es dans le ring", a révélé St-Juste. "Mais c'est évident que si je l'accroche, il va avoir des problèmes."

"C'est le genre de choses que j'ai dites dans le passé, mais vous savez que je les ai toujours prouvées."

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