Le plan de combat mis sur pied par Howard et Otis Grant pour préparer Joachim Alcine, en vue du combat de championnat du monde des super mi-moyens de la WBA face à Travis Simms, a fonctionné de A à Z et chapeau! J'étais au courant de la stratégie qui consistait à être prudent dans les deux ou trois premiers rounds, de commencer à intensifier le combat à partir du quatrième round et après, à partir du huitième round, d'aller complètement en attaque.

Nous avons consulté les statistiques de Simms et nous avons regardé beaucoup de ses combats et nous avons constaté que le nombre de coups qu'il lançait diminuait dramatiquement à chaque round, plus le combat avançait. C'était donc évident que Joachim devait calculer pour répartir ses énergies. Mais Simms est un cogneur émérite, on le savait, et il n'était pas question que Joachim se fasse surprendre tôt dans le combat. J'étais tout près du ring - près de beaucoup de gens du Québec qui était autour dans le « ring side » - et à mesure que les rounds avançaient, je me disais que tout se passe exactement comme prévu.

En regardant le dossier de Simms, même s'il boxe depuis plus longtemps que Joachim, il avait une cinquantaine de rounds de moins de disputés en carrière et beaucoup moins de combats de plus de huit rounds, il en avait seulement quatre alors que Joachim en a le double. Joachim a été extrêmement discipliné et le plan a bien fonctionné.

À partir du moment où Simms s'est aperçu qu'il commençait à être en déficit, il est sorti de son plan de combat. Normalement, il est en avance, fait mal à ses adversaires et ça lui donne du temps pour réfléchir et d'exploser à nouveau en attaque mais samedi, il n'a pas réussi à faire mal à Joachim et il n'a pas eu le temps pour réfléchir. Il a bien essayé d'aller se chercher du temps et tout ce qu'il a trouvé à faire était de retenir continuellement. N'eut été de ça, la victoire de Joachim aurait été plus évidente.

Joachim était dans sa bulle

Nous étions confiants dès le départ, avant le combat. Nous avions même apporté 250 chandails imprimés « Joachim Alcine champion du monde ». Joachim était prêt, lui qui est extrêmement fort mentalement. Il a la capacité de se lever au niveau du défi qui se présente à lui.

Après avoir étudié Simms, je pensais que le combat serait plus serré. Nous étions confiants à l'effet que Joachim avait les habiletés requises, la vitesse et l'endurance nécessaire, et cela a joué pour beaucoup parce que Joachim avait encore beaucoup d'énergie après huit rounds. Nous avons été en mesure de monter une stratégie comme celle utilisée parce que nous savions que Joachim avait beaucoup d'endurance et qu'il finissait ses combats avec force.

Le fait que Simms ait été arrogant toute la semaine n'a pas fait de différence, Joachim n'a pas besoin de ça. C'est un gars qui est capable d'être dans sa bulle. Il a fait peut-être un peu plus de vagues lors de la conférence de presse parce qu'il voulait répliquer au chahut que faisaient les supporteurs de Simms mais à part de ça, quand Simms tentait l'intimidation, de lui parler, Joachim avait un sourire en coin. Il n'était pas dérangé du tout.

L'histoire qui est sortie dans la Presse de samedi à l'effet qu'il aurait subi un K.O. face à Jean Pascal pendant un entraînement ne l'a pas affecté du tout. On a accepté que Joachim donne quelques entrevues là-dessus samedi, ce qu'on aurait pas fait en temps normal. Il a déclaré que c'était mensonger puisque la dernière fois qu'il avait vu Jean Pascal, c'était au combat de ce dernier au Stade Uniprix au début de juin.

N'ayant rien à se reprocher, Joachim était aussi confiant parce qu'il savait qu'il avait fait tout ce qu'il fallait pour se préparer. Quand un boxeur fait tout ce qu'il faut dans sa préparation, il est prêt et comme Joachim le disait lui-même, il a remis ça dans les mains de Dieu et il n'avait qu'à donner le meilleur de lui-même.

Excellent pour GYM et la boxe au Québec

Les gens nous demandaient avant le combat : est-ce qu'une défaite de Joachim pourrait mettre GYM en danger? Pas du tout. Nous avons une série qui fonctionne très bien, beaucoup de boxeurs talentueux, des événements fréquents, un plan d'affaires exceptionnel et nos événements sont planifiés deux ans à l'avance. Si Joachim avait perdu, il aurait réintégré la série et on l'aurait ramené rapidement parmi les aspirants.

La victoire, par contre, apportera énormément à GYM. Ça va donner un souffle majeur sur l'organisation parce que maintenant, nous sommes en contact avec les grands décideurs de la boxe et avec des grands réseaux de télévision au niveau international. Maintenant, lorsque l'on négociera avec d'autres promoteurs ça ouvrira la porte pour d'autres boxeurs de l'organisation.

Comme ce fut le cas pour Éric Lucas chez Interbox quand il avait remporté le titre mondial, tous les autres boxeurs de GYM vont grandir de deux pouces. Tout le monde va se sentir plus fort, plus confiant. Tout le monde voit que c'est possible de réussir et que nous avons les ressources pour ça.

Au-delà de ça, ça légitime beaucoup toute l'industrie de la boxe au Québec. Depuis trois ou quatre ans nous voyons des boxeurs classés, nous voyons beaucoup d'événements de boxe, nous avions des boxeurs invités à des championnats du monde, nous avions des aspirants obligatoires -c'était le mieux qu'on avait à offrir. Pour pouvoir offrir plus, il fallait passer à l'étape suivante et avoir un champion du monde et on a réussi. Ça prouve qu'on a les ressources au Québec, que la boxe est en santé, qu'il y a beaucoup de talent.

Ça va être aussi une inspiration supplémentaire pour les jeunes boxeurs.

Du repos et des négos

Joachim va prendre quelques semaines de repos et pendant ce temps, nous allons regarder diverses options qui s'offrent à nous. Nous avons déjà quelques discussions à gauche et à droite mais rien de concret. Nous allons prendre le temps d'analyser tout ça.

Notre objectif serait de ramener Joachim à Montréal pour une défense du titre en octobre ou en novembre contre un des aspirants, sauf si nous recevons une offre exceptionnelle contre un autre champion ou dans un combat d'unification. On va regarder tout ça, mais la première chose qu'on voudrait faire vraiment c'est que, comme Joachim est allé gagner le titre à l'extérieur, ce serait d'avoir un combat de défense du titre chez nous.

Joachim n'avait pas de clause de combat revanche contre Simms. Il était un aspirant obligatoire et ça comporte des avantages et des inconvénients. Le désavantage, il était soumis à des délais plus longs pour obtenir le combat de championnat du monde comme dans notre cas où ça pris un an. Mais la beauté quand un boxeur est aspirant obligatoire est qu'il ne doit rien à personne. Il est champion avec nous et nous n'avons pas été obligé de donner une partie de son contrat à qui que ce soit.

Par contre, nous nous sommes entendus avec Don King à qui, en échange d'avantages, nous avons accordé le droit d'égaler n'importe quelle offre qu'on pourrait recevoir d'un autre promoteur. Ainsi, si un promoteur nous fait une offre, King a le droit de l'égaler et on va aller boxer dans un de ses programmes. Mais ça ne nous enlève absolument rien dans notre pouvoir de négociations en ce qui concerne Joachim.

Soirée des revirements

Nous sommes allés à une petite fête organisée par Don King après le gala. Travis Simms ne s'est pas présenté. Les résultats des combats de samedi ont montré un renversement : Bermane Stiverne a perdu, il était invaincu et il a subi le K.O.; Monte Barrett, qui est un ancien aspirant mondial, a lui aussi subi le K.O. face à Cliff Couser, qui n'est qu'un « journeyman »; Vic Darchinyan était invaincu a aussi subi le K.O. face à Nonito Donaire, un renversement majeur, et finalement Joachim qui a battu Simms. Normalement, on prépare ces « partys » pour fêter ceux qui sont favoris, les gars qui ont habituellement le plus de supporteurs. Samedi, c'était donc un peu moins joyeux de leur côté mais pour nous, ce fut une très belle soirée notamment avec la famille d'Alcine et des amis du Québec -il y a même eu des gens qui sont venus de la Beauce. D'autres boxeurs de notre équipe étaient également sur place.

Gagner un combat de championnat en territoire étranger -avec trois juges américains- nous redonne confiance au système. Nous avions logé un protêt avant le combat parce qu'il n'y avait que des juges américains et le règlement de la WBA stipule qu'il faut des juges neutres. Nous avions logé le protêt en expliquant bien aux juges et aux organisateurs que ce n'était pas contre eux personnellement et qu'on ne remettait pas en question leur compétence, mais bien par principe et c'est le règlement.

Mais les juges ont été très professionnels, ils ont jugé exactement comme le combat s'est déroulé et c'est rafraîchissant de voir ça.

*Propos recueillis par RDS.ca