L’annonce d’un possible combat entre Lucian Bute et Jean Pascal a provoqué une véritable onde de choc dans les médias québécois au cours des derniers jours. L’idée que les deux plus grands boxeurs de leur génération s’affrontent a déjà commencé à soulever les passions.

Figure incontournable de la boxe québécoise, Éric Lucas est au nombre des observateurs qui attendent cette rencontre au sommet avec impatience. Membre de la garde rapprochée de Bute pendant plusieurs années, l’ancien champion du monde des super-moyens du WBC est aujourd’hui libre de toute attache.

Même s’il croit que Bute est de loin un bien meilleur boxeur que Pascal, Lucas entretient de sérieux doutes quant à la capacité de son ancien dauphin de faire face à toute la pression dont il fera l’objet. Et ce qui est le plus reproché à Pascal - son énorme confiance en soi - serait finalement la meilleure carte dans son jeu.

« Ça va se passer entre les deux oreilles ce combat-là », a prédit Lucas au cours d’un entretien téléphonique avec le RDS.ca. « Pascal est un gars qui a tellement confiance en ses moyens et ça prend absolument ça dans le ring. C’est pour ça qu’il part avec une longueur d’avance. »

« Ça va prendre une force mentale extraordinaire pour gérer ce combat-là. Il va y avoir tellement d’atmosphère. Les deux boxeurs vont avoir tellement de pression. »

Comme plusieurs, Lucas ne reconnaît plus Bute depuis qu’il s’est incliné devant Carl Froch au mois de mai dernier à Nottingham en Angleterre. Sa plus récente victoire aux dépens de Denis Grachev en novembre à Montréal ne l’a pas convaincu que la tendance a été renversée.

« Je ne sais pas si Lucian va retrouver sa confiance », s’est demandé l’ex-pugiliste de Magog. « Sa vitesse, sa technique et sa contre-attaque sont là, mais ce n’est pas à ce niveau que ça se joue. »

« Si sa confiance revient, je ne vois pas de problème. Si Lucian ressemble au gars que j’ai vu en conférence de presse cette semaine, je le donne gagnant 100 à l’heure. »

« Mais sera-t-il capable d’amener cette attitude dans le ring? La boxe, ça reste la boxe. »

En plus d’être un combat entre deux boxeurs, c’en sera également un entre deux entraîneurs - Stéphan Larouche et Marc Ramsay et deux promoteurs - InterBox et Groupe Yvon Michel.

« Stéphan est un gars qui voit beaucoup de choses et qui étudie les combats de tout le monde », a analysé Lucas. « Il prend des trucs un peu partout et s’en inspire pour ses boxeurs. Il y a une très grosse partie des succès de ses athlètes qui lui revient. »

« Je ne connais pas beaucoup Marc, mais c’est un gars dédié à son sport. C’en est un autre qui a toujours de bonnes stratégies. »

Avouant ne pas connaître les plans d’InterBox, Lucas croit évidemment qu’une victoire de Bute sera la bienvenue pour son ancien promoteur, puisqu’il n’y a pas beaucoup d’athlètes à l’horizon qui peuvent soutenir la compagnie.

Une foule pro-Bute? Pas si sûr!

Chose certaine, l’ancien champion est convaincu qu’un combat Bute-Pascal aura une place inégalée dans l’histoire du noble art de la Belle Province. Jamais un duel n’aura suscité autant d’intérêt.

« Si nous reculons un peu et que nous revenons à Hilton-Ouellet ou encore Hilton-Cusson, ça ne se compare tout simplement pas », a expliqué Lucas. « Bute et Pascal sont deux boxeurs de calibre mondial qui ont été champions du monde et qui peuvent très bien le redevenir. »

Lucas n’est également pas contre l’idée qu’un endroit mythique accueille ce combat d’envergure. Le Centre Bell - où il est devenu champion et a combattu 14 fois - demeure son lieu de prédilection, sauf qu’il refuse de regarder le Stade olympique de haut.

« La boxe est tellement populaire depuis quelques années qu’un événement comme celui-là serait sûrement capable d’attirer de 25 000 à 30 000 personnes », a-t-il ajouté. « Aujourd’hui, les dirigeants du stade sont capables de créer une belle configuration. Si l’intérêt est là, pourquoi pas? »

Même s’il n’a jamais eu la chance de vivre semblable expérience en tant que boxeur, Lucas l’a néanmoins vécue en tant que partisan pendant le combat entre Manny Pacquiao et Ricky Hatton en mai 2009 à Las Vegas. Et malgré le fait que le duel s’était terminé à 2:59 du deuxième round, il en garde un souvenir mémorable.

« L’atmosphère était incroyable. Il y avait énormément de fans des deux boxeurs à la pesée et le soir du combat », s’est rappelé Lucas. « Le résultat ne m’avait pas déçu tellement c’était électrisant! »

Lucas attend particulièrement le moment où les inconditionnels de Bute et Pascal se feront entendre. La croyance populaire veut que le premier jouisse de l’appui de la très grande majorité des amateurs, énoncé que met en doute Lucas.

« Les gens ont parfois tendance à changer rapidement leur fusil d’épaule. Le dernier combat de Bute a laissé les amateurs sur leur appétit », a conclu Lucas. « Une légère majorité sera peut-être derrière lui, mais ce sera vraiment difficile de dire qui prend pour qui. »

Lucas s’étant rarement trompé dans ses prédictions depuis qu’il a accroché ses gants, le clan Bute a-t-il à s’inquiéter? Ou à prendre cela comme un sérieux avertissement?