MONTRÉAL – Autant le résultat du prochain combat de Simon Kean aura une grande incidence sur la suite de sa carrière, autant il influencera la suite des choses pour une industrie locale qui se cherche désespérément depuis la fin de son âge d’or au tournant de la dernière décennie.

Le gala qu’organisera Eye of the Tiger Management ce soir à Shawinigan sera en effet le premier – et dernier – à être tenu dans un amphithéâtre québécois en cette première moitié d’année. Une situation qui n’a rien d’exceptionnel, mais qui en dit plutôt long sur l’état actuel du sport.

Car hormis David Lemieux, qui a disputé plus de la moitié de ses dix derniers combats aux États-Unis en raison de son association avec Golden Boy Promotions, Kean (16-1, 15 K.-O.) est peut-être le seul qui peut se vanter d’attirer les foules lorsqu’il est la tête d’affiche d’un événement.

Quant à Erik Bazinyan, Yves Ulysse fils et Steven Butler – qui a déjà fait une finale au Centre Bell –, il est déjà acquis qu’ils suivront les traces de Lemieux puisqu’ils se sont également entendus avec Golden Boy Promotions en février dernier. La relève est donc assez mince pour le moment.

« Simon joue gros, tout comme la boxe québécoise d’ailleurs, a reconnu le promoteur Camille Estephan en entrevue téléphonique avec RDS.ca », vendredi après-midi, quelques heures après que son protégé eut fait osciller le pèse-personne à 234 livres, son plus bas poids en carrière.

Estephan n’a jamais caché son ambition de présenter des galas mettant en vedette Kean un peu partout au Québec. Un deuxième revers contre Carman (14-4, 13 K.-O.) en l’espace de huit mois ferait obstacle à ce projet, la défaite essuyée en octobre s’étant déjà fait ressentir aux guichets.

Si 4862 spectateurs avaient assisté à l’événement mettant en vedette Kean et Adam Braidwood il y a pratiquement un an jour pour jour au Centre Gervais Auto, ils devraient être un peu plus de 3200 cette fois, alors que l’objectif initial était pourtant de 4000. Des averses sont aussi prévues sur la région jusqu’en soirée, ce qui devrait naturellement refroidir les ardeurs des retardataires.

Une défaite qui a ravivé la flamme?

Afin de regagner ses lettres de noblesse auprès d’un public qui l’a très durement jugé à la suite du knock-out qu’il a encaissé au quatrième round en octobre dernier, Kean aurait pu être tenté d’effectuer de grands changements dans son entourage, mais il a davantage revu ses priorités.

« C'est personnel »

« Simon s’est toujours entraîné très, très fort, mais cette fois, il s’est assuré de bien récupéré, a lancé Estephan. Il m’a dit qu’il n’avait jamais autant dormi pendant un camp d’entraînement! Je compare ça à un système immunitaire. Si tu ne dors pas, tu es plus susceptible d’être malade. »

Mais les érudits pourraient cependant répliquer que les difficultés rencontrées par Kean lors du premier duel avec Carman n’étaient pas uniquement dues qu’à un léger manque de sommeil ou à quelconques distractions, car l’Ontarien a exposé le Trifluvien comme personne auparavant.

« Il y a toujours des choses qui peuvent être améliorées et c’est évident que Simon avait des carences à combler, a avoué Estephan. Son entraîneur Jimmy Boisvert a épié chaque minute de son entraînement. Tous les détails ont été scrutés à la loupe en vue du duel de [samedi] soir. »

Avec le recul, le promoteur est plus que jamais convaincu que cette défaite est survenue au bon moment et qu’elle a ravivé cette flamme qui s’était tranquillement éteinte au fil des victoires.

« Ça faisait longtemps que je n’avais pas vu une telle hargne dans les yeux de Simon, s’est réjoui Estephan. Jack Dempsey disait que les gens ne pouvaient pas comprendre ce désir de remonter dans le ring à la suite d’une défaite à moins d’avoir eu à se battre pour subvenir à leurs besoins.

« C’est cette faim qui manquait à Simon. Il faut qu’il reste aux aguets, qu’il ait peur à la limite. »

« Kean est plus talentueux, mais n'est pas un encaisseur »