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Artur BeterbievMONTRÉAL – Même si la boxe québécoise s’est enorgueillie d’un nouveau champion du monde en 2017, les 12 derniers mois ont davantage été marqués par des événements à l’extérieur de l’arène qui ont inévitablement effrité sa popularité déjà mise à mal depuis quelques années.

En disposant d’Enrico Kölling par arrêt de l’arbitre au 12e round le 11 novembre à Fresno, en Californie, Artur Beterbiev s’est emparé du titre vacant des poids mi-lourds de l’IBF pour devenir le deuxième boxeur québécois à posséder une couronne mondiale avec Adonis Stevenson.

Le Montréalais d’origine russe est ainsi devenu le 16e pugiliste de l’histoire de la Belle Province à être sacré champion du monde et le 3e protégé de l’entraîneur Marc Ramsay à réussir l’exploit en moins d’une décennie après Jean Pascal, en juin 2009, et David Lemieux, en juin 2015.

Mais comme les choses n’ont été simples pour personne cette année, le triomphe de Beterbiev a été en grande partie éclipsé par son conflit avec Groupe Yvon Michel (GYM), ce qui explique pourquoi il s’est battu aux États-Unis en demi-finale d’un événement organisé par Top Rank.

En mai, Beterbiev avait déposé une requête pour jugement déclaratoire en cour pour obtenir la terminaison de son contrat avant de prétendre que GYM avait tenté d’empêcher la tenue de son duel contre Kölling en exigeant 30 pour cent de sa bourse 48 heures avant sa présentation.

Les deux parties devraient se retrouver au tribunal en 2018 pour dénouer l’impasse, mais le clan Beterbiev a déjà reconnu que le conflit l’empêchait d’échafauder d’intéressants plans d’avenir.

Il ne s’agit pas du seul dossier épineux que GYM a eu à gérer cette année, loin de là. Stevenson a facilement défendu sa ceinture des mi-lourds du WBC pour la huitième fois en matant Andrzej Fonfara par arrêt de l’arbitre au deuxième round en juin au Centre Bell, sauf que c’est son obstination à ne pas affronter Eleider Alvarez qui a évidemment mobilisé toute l’attention.

Évoquant le manque d’intérêt de la part de la télévision américaine et son désir de disputer un combat d’unification, Stevenson n’a jamais ouvert la porte à une rencontre au sommet avec celui qui est pourtant son aspirant obligatoire depuis novembre 2015. En août, Alvarez a lancé un ultimatum au champion, mais cet avertissement s’est avéré un coup d’épée dans l’eau.

Tout indique que Stevenson se mesurera à l’ancien détenteur du titre des super-moyens du WBC Badou Jack en début d’année, tandis qu’Alvarez se serait fait imposer un choc complexe face à Oleksandr Gvozdyk avec – encore une fois – sa position d’aspirant obligatoire à l’enjeu.

Malgré tout, Alvarez n’est pas demeuré inactif en attendant le combat qui ne viendra peut-être jamais, profitant même de l’occasion pour ajouter deux noms dignes de mention à son tableau de chasse : Lucian Bute et Jean Pascal. Il a passé un foudroyant knock-out au cinquième round au premier en février et eu le dessus par décision majoritaire des juges sur le deuxième en juin.

Bute n’est pas remonté sur le ring depuis, suggérant à mots couverts au balado Le compte de 8 qu’il s’agissait de sa dernière sortie en carrière, alors que Pascal a fini la sienne sur une bonne note en défaisant l’espoir invaincu Ahmed Elbiali par arrêt de l’arbitre le 8 décembre à Miami.

Billy Joe SaundersLemieux faillit à la tâche devant Saunders

Le Québec aurait pu compter trois champions du monde simultanément pour la deuxième fois de son histoire, mais Lemieux a failli à la tâche devant le détenteur de la ceinture des moyens de la WBO Billy Joe Saunders en finale d’un gala organisé le 16 décembre à la Place Bell de Laval.

Le cogneur disait avoir tiré plusieurs leçons de son affrontement contre le champion unifié Gennady Golovkin au Madison Square Garden de New York en octobre 2015, mais encore une fois, il n’a pas été capable de contenir le jab de son adversaire, s’inclinant par décision unanime.

Lemieux a attribué sa contre-performance à une blessure à l’épaule gauche qui l’empêchait d’utiliser adéquatement un crochet censé ralentir son rival, mais il reste néanmoins très difficile d’imaginer qu’il aurait pu arracher la victoire, même s’il n’avait pas été ennuyé par ce malaise.

Cela demeure dommage pour l’athlète maintenant âgé de 29 ans, puisqu’il avait pourtant connu un excellent début d’année en réussissant l’un des knock-out les plus spectaculaires sur la scène internationale aux dépens de Curtis Stevens en mars et en dominant outrageusement Marcos Reyes en demi-finale du duel entre Saul « Canelo » Alvarez et Julio Cesar Chavez fils tenu en juin.

Lemieux n’est pas le seul boxeur d’Eye of the Tiger Management (EOTTM) et InterBox à avoir subi la défaite cette année. Steven Butler s’est en effet incliné par arrêt de l’arbitre au septième round face à Brandon Cook en janvier – l’Ontarien recevant un seau en métal en pleine poire au moment de l’interruption du choc –, mais il s’est repris en gagnant ses trois combats suivants, devenant notamment le premier boxeur à stopper Larnardo Tyner avant la limite en décembre.

Yves Ulysse fils a également vu sa fiche entachée à la suite d’un revers par décision partagée devant Steve Claggett en septembre, mais tout comme Butler, il s’est relevé de brillante façon en battant Cletus Seldin devant les caméras de HBO en décembre à Laval. David Théroux a aussi commis un faux pas en perdant contre Jesus Perez deux jours plus tôt en finale à Sorel-Tracy.

Sur une note résolument plus positive, Batyr Jukembayev et Simon Kean ont mis la main sur leur premier titre mineur en carrière, tandis que Kim Clavel, Clovis Drolet et Vincent Thibault ont effectué des débuts remarqués. Dans l’ombre, Mathieu Germain à quant à lui poursuivi son ascension en remportant ses quatre sorties à la suite de prestations axées sur l’attaque.

Custio Clayton s’est joint à EOTTM après s’être séparé de GYM en octobre et a ajouté la ceinture internationale des mi-moyens de la WBO en décembre à celles internationale de l’IBF et continentale des Amériques du WBC qu’il avait gagnées en juin. Clayton est classé 15e à la WBO.

Une année plutôt tranquille chez GYM

À l’opposé de son concurrent, GYM a connu une année plutôt tranquille en ne présentant que deux événements d’envergure en février au Centre Vidéotron et en juin au Centre Bell. Son seul champion se battant une fois par année, l’entreprise ne peut profiter d’un effet d’entraînement.

Pour la troisième fois depuis qu’il est arrivé au Québec, Oscar Rivas a été contraint à l’inactivité pendant un an en raison d’une blessure à une épaule. Il a effectué son retour à la compétition en juin, disposant de Carl Davis Drumond pour enfin s’emparer de son premier titre mineur.

Incapable d’obtenir son permis de boxer dans l’État de New York et en Californie à cause d’un décollement de la rétine qui date de quelques années, Rivas s’est battu en décembre en France, où il pourrait bien retrouver l’aspirant mondial Johann Duhaupas en mars prochain à Marseille.

Shakeel Phinn avait impressionné au point de signer un contrat avec GYM après avoir remporté cinq duels entre février et septembre, mais il s’est buté à Ramon Aguinaga en finale d’un gala présenté au Casino de Montréal en décembre pour voir une série de 15 victoires prendre fin. De son côté, Sébastien Bouchard a été limité à une sortie – un gain en février à Québec – avant d’être mis en échec par une rupture d’un tendon du biceps droit qui a nécessité une opération.

Après avoir passé l’essentiel de sa carrière aux États-Unis, Mikaël Zewski s’est également joint à GYM et a enlevé deux combats en juin et décembre. En 2018, il souhaite remettre le grappin sur une ceinture mineure et ensuite se mesurer à un membre du top-10 mondial en juin à Québec.

Mais l’histoire la plus intéressante chez GYM a indiscutablement été celle de Marie-Ève Dicaire, qui a gagné ses quatre duels et qui aura apparemment  la chance de se battre pour un premier titre mineur au cours des prochains mois. L’Olympien Christian M’Billi a de son côté connu des débuts retentissants en s’imposant lors des sept combats qu’il a livrés de février à décembre.

Bazinyan souhaite un nouveau départ

Parmi les autres boxeurs québécois classés mondialement, Erik Bazinyan a signé trois victoires, mais son association avec GYM et Rixa Promotions ainsi qu’avec ses entraîneurs Howard et Otis Grant semble terminée. L’athlète d’origine arménienne a laissé entendre à 12rounds.ca qu’il souhaite se battre plus souvent et que les deux promoteurs étaient incapables de le satisfaire.

Francis Lafrenière, la tête d’affiche de Rixa, a remporté ses trois duels et est devenu champion des moyens de la NABO en février, ce qui lui a permis de se hisser parmi les cinq premiers aspirants au titre de la WBO en octobre. Il est classé huitième à la WBO et au quinzième à l’IBF.

Deontay Wilder et Bermane StiverneL’ancien champion des lourds du WBC Bermane Stiverne n’a pas du tout fait le poids devant l’actuel détenteur de la ceinture Deontay Wilder en se faisant rosser en seulement 2:29 par l’Américain en novembre. À leur premier rendez-vous en janvier 2015, Wilder avait détrôné le Québécois d’origine haïtienne à sa première défense en s’imposant par décision unanime.

L’ex-aspirant mondial chez les mi-moyens Jo Jo Dan a retrouvé le chemin de la victoire en mars à Montréal, mais a aussitôt renoué avec la défaite en juillet au Nassau Coliseum en s’inclinant face à Jamal James. Il n’a pas combattu depuis et rien n’indique qu’il le fera dans un futur rapproché.

Dans un dernier temps, Vanessa Lepage-Joanisse a croisé le fer avec la championne des lourds du WBC Alejandra Jimenez en août au Mexique, sauf que la boxeuse originaire de l’Outaouais qui évolue normalement chez les lourds-légers a été stoppée au troisième round par sa rivale.