MONTRÉAL – Une croyance largement répandue dans le monde du sport dit qu’on ne change pas une formule gagnante. Pendant cinq ans, soit le laps de temps qui s’est écoulé entre ses débuts professionnels et sa dixième victoire consécutive, Chad Laprise y a adhéré sans se poser de question.

Sept victoires pour accéder à l’UFC, trois autres après y être parvenu. Pourquoi se casser la tête? D’un combat à l’autre, Laprise répétait la même routine qui menait chaque fois au même résultat.

Mais la ligne droite qui définissait sa carrière a finalement été altérée. En l’espace d’un an, Laprise est passé d’un athlète invaincu à un athlète en léthargie en subissant une défaite par K.-O. contre Francisco Trinaldo et une autre par décision partagée contre Ross Pearson.

Loin de l’avoir abattu, cette modification négative à sa fiche l’a toutefois forcé à se livrer à une introspection qu’il jugeait nécessaire.

« Honnêtement, c’est la meilleure chose qui me soit arrivée, affirme Laprise au sujet de ses récents insuccès. Je sais que c’est un gros cliché, mais on apprend plus d’une défaite que d’une victoire. Quand je battais tout le monde, j’avais une recette et je tenais mordicus à ne rien changer. Ces deux défaites m’ont forcé à m’asseoir et à réfléchir à la suite des choses. Je me suis regardé dans le miroir et j’ai identifié quelques trucs qui pourraient me rendre encore meilleur. »

Laprise en est venu à la conclusion que les arts martiaux mixtes occupaient une trop grande place dans sa vie. L’atteinte d’un meilleur équilibre fut donc le premier objectif qu’il s’est fixé. Pour y arriver, il s’est quelque peu éloigné du gymnase Tristar de Montréal et a déplacé une partie de son camp d’entraînement chez Adrenaline Training Center, chez lui à London en Ontario.

« Ne plus être obsédé par mon sport, ça a été ma première résolution, explique-t-il. Quand je suis déménagé à Montréal avec ma femme, on ne connaissait personne d’autre ici. J’arrivais du gymnase et je m’installais pour étudier comme un fou, j’écoutais des combats toute la journée. Maintenant, je passe plus de temps à la maison avec ma famille, mes anciens partenaires d’entraînement et mes amis. Mentalement, je m’en porte beaucoup mieux. Je suis heureux et ma passion ne m’apparaît plus comme un travail. »

« Bref, un combattant heureux est un combattant dangereux », conclut Laprise.

Il y a une autre raison pour laquelle le poids légers de 30 ans n’a pas investi trop de temps à l’analyse des forces et des faiblesses de son prochain adversaire. À sa dernière sortie dans l’octogone, Laprise s’était soumis à un camp d’entraînement de douze semaines pour connaître le Brésilien Alan Patrick sous toutes ses coutures. Mais à une semaine d’avis, Laprise avait été appelé à changer d'adversaire et à affronter Pearson. Un plan de match minutieusement élaboré a dû être jeté aux poubelles.

« J’ai fini par réaliser qu’une préparation trop poussée pouvait être néfaste. Avant, j’approchais mes combats avec des idées trop précises des intentions de mes adversaires et je me suis rendu compte que ça me jouait un peu trop dans la tête », avance Laprise avant d’offrir un exemple concret.

« Alan Patrick est un grand gaucher qui est très fort au corps à corps. Du jour au lendemain, j’ai dû m’adapter pour un petit boxeur droitier. À l’avenir, je vais me concentrer sur moi-même plutôt que de tenter de brosser un portrait parfait de mon adversaire. Je ferai mes devoirs, c’est bien évident. Si mon adversaire est un lutteur de classe mondiale, bien sûr que je travaillerai un peu plus sur cet aspect. Mais règle générale, c’est mon propre jeu que je peaufinerai. »

Laprise n’est donc que très peu familier avec Thibault Gouti, qu’il affrontera samedi sur les ondes de RDS2 en sous-carte du gala qui mettra en vedette les mi-moyens Carlos Condit et Demian Maia. Un Français de 29 ans qui montre une fiche de 11-2, Gouti  a perdu ses deux seuls combats au sein de l’UFC. À sa dernière sortie, il s’est incliné devant Olivier Aubin-Mercier, un coéquipier de Laprise que ce dernier avait vaincu pour remporter la saison de L’Ultime Combattant opposant des concurrents australiens à des adversaires canadiens.

« Le jour où j’ai signé le contrat pour l’affronter, j’ai regardé deux de ses combats. J’étais également sur place, à Ottawa, pour assister à la victoire d’Olivier. Mais c’est tout. Je n’ai pratiquement pas pensé à lui pendant mon camp d’entraînement. Je sais qu’il est un bon cogneur avec de belles habiletés techniques, mais c’est lui qui devra s’ajuster à moi. J’appliquerai la pression et ne lui laisserai aucune autre option. Ça sera un combat amusant, divertissant. »