« Protester contre les injustices, c’est dans mes gênes. »

Kajan Johnson a grandi dans un environnement de révolte. D’un côté, son père a été garde du corps pour des membres du Black Panther Party, un parti politique d’extrême gauche qui a lutté pour la libération des Afro-Américains dans les années 1970. De l’autre, son beau-père a été un chef des Ts'il Kaz Koh. Il a ainsi milité pendant de longues années devant les différents paliers du gouvernement pour faire valoir les droits des peuples des Premières Nations au Canada.

« Contester l’autorité, c'est quelque chose qui me fait peur. Mais si quelque chose vous effraie et vous excite en même temps, il est très important de l’accomplir. Alors je le fais. C'est effrayant, mais je suis heureux de le faire. »

En mai dernier, son éducation militariste l’a poussé à agir. Un dimanche matin, Johnson et des centaines d’autres combattants de l’UFC étaient entassés dans une salle de conférence de Las Vegas. L’organisation les avait convoqués pour visiter les nouveaux quartiers généraux. La fin de semaine incluait de nombreuses activités, dont des conférences. Pendant le discours d’un représentant de Reebok, Johnson a senti le besoin de se lever et de critiquer la multinationale. Selon lui, son arrivée en arts martiaux mixtes a ruiné les athlètes en les empêchant d’apposer des commanditaires sur leurs uniformes de combat. Plusieurs combattants ont appuyé le Canadien en l’applaudissant.

L’UFC a tout de suite organisé une réunion d’urgence avec ses athlètes pour entendre leur mécontentement. « C'est toujours quelque chose que j’ai voulu faire. Je n'ai jamais compris pourquoi nous sommes parmi les personnes les plus coriaces de la planète, mais que face à une injuste, nous sommes tous silencieux. Personne ne veut parler, personne ne veut dire la vérité. Et pour moi, dire la vérité, c’est très important. »

Les développements à la suite de la sortie de l’athlète de 33 ans ne sont pas clairs. L’UFC l’a contacté, la semaine dernière, pour lui annoncer qu’un projet sera mis sur pied à l’automne. Mais Johnson ne sait pas de quoi il est question. « Nous avions proposé de ramener les bannières commanditées pendant la présentation des combattants, ou bien le droit d’avoir un seul logo personnalisé sur nos shorts. Mais je doute que Reebok accepte. »

Quand on questionne le Britanno-Colombien sur sa relation avec son employeur, il y a également des doutes dans son esprit. « Je vois beaucoup de failles dans l’organisation. Leur façon de traiter les athlètes est inadéquate. Et je les critique souvent sur la place publique. Je serais très surpris si j'étais l'un des combattants préférés de Dana White. »

Celui qui pratique le sport de façon professionnelle depuis 15 ans n’a d’ailleurs jamais rencontré le célèbre président de l’UFC, sauf brièvement lors d’une audition pour l’émission L’Ultime Combattant. Il ne sait pas s’il sera à Edmonton pour assister à l’UFC 215. « Mais s'il est là, j'aimerais vraiment lui parler. Je veux me faire ma propre idée de qui il est et comment il pense. »

Round 2 - Contre Adriano Martins

La prochaine sortie de Kajan Johnson aura lieu le 9 septembre, contre Adriano Martins. Ce n’est pas un combat qu’il espérait particulièrement. « Il est très dangereux, mais personne ne le connaît vraiment. J’aurais préféré quelqu’un de plus connu. L’enjeu aurait été plus gros. » Malgré tout, Johnson avoue que leurs deux styles de combat s’harmoniseront bien. Martins est un artiste du K.-O. Treize de ses vingt-huit victoires sont survenues par mise hors de combat. Il est également ceinture noire en jiu-jitsu brésilien. Le Canadien maîtrise aussi le jeu des soumissions, ayant signé 11 victoires de cette manière au cours de sa carrière.

Round 3 - La rouille de l’octogone

Oui, Johnson a gagné ses deux derniers duels dans l’octogone, mais sa dernière sortie remonte à près de deux ans. Le 27 septembre 2015, il avait battu Naoyuki Kotani par décision unanime, au Japon. C’est une blessure à une épaule qui l’a gardé sur les tablettes. Souvent, quand un athlète d’arts martiaux mixtes est forcé à prendre une pause aussi prolongée, on s’inquiète de sa forme. « Ce ne sera vraiment pas un problème pour moi. J’ai déjà dû laisser passer 30 mois entre deux combats avant L’Ultime Combattant. La rouille de l’octogone s’empare de toi seulement si tu y crois. Mais je n’y crois pas. »

Round 4 - Quitter Montréal

Cette blessure a aussi forcé Johnson à quitter Montréal, lui qui habitait la métropole québécoise depuis cinq ans. Il vivait dans les dortoirs du gym Tristar et s’entraînait sous la tutelle de Firas Zahabi. Avec une épaule invalide, il lui était impossible de combattre. « J’ai ainsi perdu ma source de revenus. Et puisque je ne parle pas français – je vous jure que j’ai essayé! – je n’ai pas pu me trouver du travail à Montréal. J’ai dû partir. »

Le combattant poids léger est retourné en Colombie-Britannique, d’où il est originaire. Il a travaillé fort pendant ces deux dernières années pour l’ouverture d’un centre d’entraînement. Il est maintenant copropriétaire d’une affiliation de Tristar à Vancouver. Et c’est là qu’il a passé l’entièreté de son camp d’entraînement pour son combat de septembre. Malgré ses chapeaux de copropriétaire et d’entraîneur, pas question de perdre de vue son statut de combattant.

Round 5 - Transformation physique

D’ailleurs, si vous suivez Kajan Johnson sur Instagram, vous remarquerez une nette différence au niveau physique. « En possédant désormais mon propre centre d’entraînement, je peux vraiment structurer mon horaire selon mes besoins. J’ai senti que je manquais de souffle pour finir mes deux derniers adversaires. J’ai été forcé de gagner par décision, car mon cardio m’a lâché. Alors j’ai vraiment mis beaucoup d’énergie sur ma forme physique cette fois. »
 


*Le combat de Kajan Johnson face à Adriano Martins sera le tout premier affrontement de la carte de l’UFC 215. Les duels de championnat des poids coqs entre Amanda Nunes et Valentina Shevchenko et celui des poids mouches entre Demetrious Johnson et Ray Borg cloront la soirée. La carte préliminaire sera présentée dès 20 h, sur les ondes de RDS2.