MONTRÉAL – Combien de fois, au cours des dernières semaines, avez-vous accroché votre sentiment de culpabilité au vestibule pour céder devant une dernière portion de tourtière, vous empiffrer dans le dessert ou en décapsuler une petite dernière?

Avouez-le, vous avez flanché!

Pendant ce temps, dans son propre party, Patrick Côté jure qu’il est resté de marbre. À quelques semaines de son retour dans l’octogone, le Prédateur affirme avoir passé, professionnalisme oblige, un temps des fêtes « tranquille et sobre ».

« On recevait chez nous en plus. Il devait y avoir une trentaine d’invités avec de la bouffe à n’en plus finir. Moi, je faisais le serveur! », racontait Côté, de fort belle humeur, mercredi.

Côté affrontera l’Américain Ben Saunders le 17 janvier au TD Garden de Boston. Il s’agira de son sixième combat chez les mi-moyens, une division qu’il a jointe il y a bientôt trois ans et qui requiert des combattants qui y sont inscrits qu’ils fassent osciller la balance à un poids maximal de 171 livres à la veille de leur combat.

Ancien vétéran de la division des poids moyens, Côté a toujours honoré ses engagements sur la pesée depuis qu’il a pris la décision de réorienter sa carrière. Mais la discipline rigide qu’il a dû ajouter à son arsenal pour y arriver a été mise à l’épreuve lors des récentes célébrations de fin d’année. Pour la première fois en huit ans, soit depuis sa préparation pour affronter Drew McFedries, Côté a défoncé le Nouvel An en plein camp d’entraînement.

« Ç'a été strict, on n’a pas dérogé du plan, promet-il. Si le combat avait eu lieu en février, j’aurais peut-être pu tricher un peu, mais là c’était beaucoup trop près. »

Comme seul écart de conduite, Côté dit s’être permis la moitié d’une coupe de champagne après le coup de minuit, le 1er janvier. Le lendemain, il passait par son compte Twitter pour informer ses supporteurs qu’il affichait un poids de 191 livres. Ses sacrifices avaient rapporté puisque son plan d’amincissement programmé tenait la route.

« Moins d’un mois avant le combat, tu es entré dans la machine, dans l’engrenage. Donc c’est sûr que ça dérange beaucoup moins parce que tu es dans ta bulle, soutient celui qui place sa stratégie nutritionnelle entre les mains du préparateur physique Jean-François Gaudreau. Mais ce n’est jamais facile la diète, je ne m’en suis jamais caché. Aller au gym et recevoir des coups de poing, ça me dérange moins que de manger du brocoli à tous les jours! »

Et justement, côté entraînement, le cogneur de 35 ans est resté fidèle à son horaire pendant que le commun des mortels se reposait les deux pieds sur le pouf.

« J’ai pris ça un peu plus relax les 24 et 25 décembre, mais sinon les gars sont venus s’entraîner pour m’aider à être prêt et j’en suis très reconnaissant, confie le représentant de BTT Canada. On forme une équipe, une autre famille et mon succès leur tient à cœur. Quand c’est leur tour d’être prêt pour un tournoi de jiu-jitsu ou une autre compétition, c’est la même chose, on travaille tous ensemble. Ça a toujours été ça notre mentalité. »

Ben Saunders, un vétéran de 32 ans qui compte dix combats à l’UFC, est un drôle de moineau qui propose des défis peu communs à ses adversaires. À 6 pieds 3 pouces, le pratiquant de boxe thaïlandaise compte neuf victoires par K.-O., mais peut aussi faire du dommage au sol grâce à un style peu orthodoxe.

« Debout il n’est pas extrêmement rapide, mais il lance beaucoup de coups de pied, présente Côté. Sa lutte est ordinaire, mais il possède une ceinture noire en jiu-jitsu brésilien et si on tombe dans sa garde, il devient très dangereux. Il ne faut pas que je tombe inerte, que je m’endorme là parce qu’il fait des choses que personne d’autre ne fait. Il est très souple, il peut se passer les jambes en avant du visage, des choses comme ça. Son jeu de jiu-jitsu est unique, moins conventionnel, mais on a fait les ajustements nécessaires. »

Lui-même ceinture noire en jiu-jitsu sous la supervision de Fabio Holanda, Côté a demandé l’aide de deux gauchers de grande taille pour se préparer à la boxe de Saunders et croit avoir tout fait pour éviter les surprises.

« De toute façon, 95 % des gars contre qui je me suis battu dans ma carrière étaient plus grands que moi, note le Québécois. À 185 livres, mes adversaires étaient toujours plus gros et plus grands. Je ne m’en vais pas en terrain inconnu. »

Saunders en est à son deuxième séjour à l’UFC. Détenteur d’un dossier de 7-3 au sein de l’organisation Bellator de 2010 à 2013, il montre un dossier parfait en trois combats depuis son retour au bercail. Mais son prochain rival n’est pas impressionné par ses récentes réalisations.

« Quand il est revenu à l‘UFC, il a eu la soumission de l’année avec un "omoplata". C’est bien beau, c’est une belle technique, mais son adversaire n’aurait jamais dû d’abandonner là-dessus. Ensuite Joe Riggs s’est blessé lui-même en l’amenant au sol et pour sa dernière victoire face à Kenny Robertson, je pense qu’il a reçu un cadeau des juges. Donc oui, il est sur une série de trois victoires, mais quand tu regardes de plus près, ça peut laisser à désirer. »

Un choix d’adversaire décevant

Même s’il est entièrement investi dans sa préparation, Côté admet sans gêne que Saunders n’est pas celui qu’il espérait retrouver sur son chemin à ce stade de sa carrière. Après sa plus récente victoire contre Josh Burkman, en août, celui qui montre une fiche de 4-1 depuis son passage chez les mi-moyens avait émis le souhait d’être confronté à un combattant classé dans le top-15 de la division.

Il a d’abord lancé un défi à Hector Lombard, mais ses paroles sont restées lettre morte. Il s’est donc mis à la recherche d’un volontaire sur les réseaux sociaux. « Je crois que je les ai tous essayés un par un », dit-il en riant.

Il a jeté sa ligne en direction de Tarec Saffiedine, sans succès. Jake Ellenberger a mis du temps à mordre, mais s’est éventuellement laissé embarquer dans le jeu au point de vouloir en prendre le contrôle. « On a eu une petite chicane et je pensais bien avoir trouvé le maillon pour me faufiler, mais finalement l’UFC avait d’autres plans », avoue Côté.

Neil Magny s’est ensuite interposé et a rapidement accepté la proposition du Prédateur, mais on a finalement fait appel à ses services quand Matt Brown s’est blessé avant d’affronter Kelvin Gastelum.

Côté a finalement dû se contenter de la sélection de la maison. Le dénouement l’a déçu sur le coup, mais il ne l’a pas ruminé trop longtemps.

« J’ai bien cru que j’aurais ce que je voulais, mais il reste que ce n’est pas moi le patron. Je suis un employé et je me bats contre le gars qu’on met en avant de moi. Saunders pousse lui aussi pour se hisser le top-15, je dois m’en méfier. Mon travail, c’est gagner des combats et c’est exactement ce que je m’en vais faire la semaine prochaine. »

Une victoire contre Saunders offrirait à Côté un argument massue pour qu’on satisfasse ses demandes. Il s’agirait pour lui d’un troisième triomphe de suite, un cinquième en six tentatives dans la division anciennement dominée par Georges St-Pierre.

« Je mentirais si je disais que je croyais donner un nouveau souffle aussi puissant à ma carrière, affirme-t-il au sujet du virage qu’il a entrepris après sa victoire par disqualification face à Alessio Sakara. Mais je n’avais plus le choix de descendre à 170 et cette décision m’a donné plus de connaissances. Mon coach Fabio m’a souvent dit qu’à 24 ou 25 ans, je n’avais pas le style de vie d’un athlète censé prendre soin de lui. J’avais du succès, mais je n’étais pas vraiment discipliné. À un moment donné, tes priorités changent. »

« Depuis trois ou quatre ans, je suis plus concentré à mener ma carrière de façon professionnelle et ça joue en ma faveur. »