Steve Claveau était assommé vendredi après-midi.

« C’est comme si j’avais reçu un superman punch de GSP », a-t-il écrit dans un message texte qui a éventuellement mené à une conversation téléphonique d’une vingtaine de minutes.

Claveau, à qui je n’avais jamais parlé auparavant, en avait gros sur le cœur. La veille, il avait appris que la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec (RACJQ) avait rejeté sa demande pour un permis de travail qui lui est nécessaire non seulement pour son retour souhaité dans l’octogone, mais aussi pour être dans le coin de ses élèves lors des événements de MMA locaux.

Se sentant victime d’une injustice, choqué que sa réputation ait été salie sur la place publique, celui qui se fait surnommer « The Snake » voulait donner sa version des faits.

« C’est sûr que je ne laisserai pas ça là. Je veux aller en appel de la décision. Ils ne me saliront pas comme une vidange et un criminel alors que je n’ai rien fait! », insiste-t-il de sa voix rauque.



Sur la possibilité d’aller en appel, un processus qui peut être long et coûteux, l’avocat de Claveau, Me Patrice Paré, est un peu plus nuancé que son client. « Il faut trouver des erreurs dans le jugement. Il y en a, mais… »

Pour les intéressés, Me Paré est celui qui avait défendu Martin Désilets dans un dossier similaire il y a quelques années. « Dans le cas de Désilets, je n’étais pas convaincu, mais dans le cas de M. Claveau, j’étais optimiste. Disons que les conclusions nous laissent un peu mi-figue, mi-raisin. »

« J’étais sûr à 150% de gagner. Ils n’avaient rien contre moi », affirme quant à lui Claveau sans prendre de détour.

Avant d’aller plus loin, pour mieux comprendre les points auxquels Claveau fait référence, vous pouvez lire ici le texte détaillant sa situation, publié dans le Journal de Montréal.

Comprenez aussi que je n’ai pas suivi le dossier rigoureusement et que je ne prétends pas le comprendre en profondeur. Le but n’est pas non plus de prendre position en faveur de Steve Claveau, mais seulement de lui laisser une tribune pour s’exprimer. À chacun de développer son opinion par la suite.

Le jugement intégral de la RACJQ devrait bientôt être rendu public sur Internet à l’adresse www.jugements.qc.ca.

Des relations sous le microscope

Dans un premier temps, la RACJQ s’inquiète des relations entretenues par Steve Claveau au fil des ans. On craint que ses liens – présumés ou avoués – avec des membres des Hell’s Angels nuisent à l’intégrité des arts martiaux mixtes au Québec.

« Ils n’ont rien contre moi, à part deux ou trois photos sur lesquelles on me voit serrer la main de membres des Hell’s et une vidéo sur laquelle on me voit parler pendant deux minutes avec un autre », se défend Claveau, qui précise à plusieurs reprises au cours de l’entretien qu’il n’a aucun casier judiciaire.



« Je n’ai jamais nié avoir déjà parlé à des Hell’s Angels. Je l’ai même dit en cour. Mais est-ce qu’on m’a pris à faire quelque chose d’illégal? Ce sont simplement des gens que je voyais dans des galas. Ça s’arrêtait là. Je n’allais pas dans des mariages et dans des partys Mais dans des galas, je parlais à toute sorte de monde! Des mains, je pouvais en serrer 200 ou 300 par gala. Est-ce que je gagne des points si je parle à un policier, un avocat ou un médecin? Est-ce qu’on vit dans un pays libre ou pas? »

« Je suis un gars du peuple, je parle à tout le monde. Mais je pense que cette fois-là, d’être un gars du peuple, ça m’a nui un peu… », constate l’homme de 38 ans.

Deux poids, deux mesures

Claveau paie aussi le prix pour avoir affiché, en échange de sommes d’argent, les couleurs de trois entreprises reliées au monde des motards : les boissons Cintron, le bar Le Garage et l’agence Sensations 2000.

« C’est drôle, mais Cintron était aussi un commanditaire de l’émission Loft Story. Pour ce qui est du bar Le Garage, plusieurs autres combattants ont eu son logo sur leurs culottes. »



Dans sa montée de lait, Claveau ne veut pas nommer de noms pour s’assurer de ne pas entacher la réputation d’amis et de confrères. Mais il est clair, selon lui, qu’il est victime d’un traitement qui n’est pas réservé à tous. Deux poids, deux mesures.

« On a dit que j’étais le seul combattant à parler avec des Hell’s dans des galas. Je m’excuse, mais tout le monde sait que c’est faux. J’ai même déjà vu des fighters assis à des tables achetées par des Hell’s Angels. »

Un côté de la médaille

Également pris en considération dans le jugement de la RACJQ, un incident survenu en avril 2010 au cours duquel Claveau s’en serait pris physiquement à un adolescent de 14 ans.

Claveau ne cache avoir usé de force pour maîtriser le jeune homme, mais seulement après que celui-ci ait causé des dommages considérables aux installations du gymnase dont il est le propriétaire à Victoriaville. Aucune accusation n’a été portée contre lui pour ces gestes.

« Il donne sa version et c’est tout ce qu’on peut lire dans les journaux. Ma déclaration et celle de mes témoins n’ont jamais été entendues. On ne prend qu’un côté de la médaille et on fait de la fumée. Pourtant, je n’ai aucun casier judiciaire. Il y a quelque chose qui ne marche pas. Je ne suis pas Pablo Escobar! »

La comparaison avec Hilton

Un point très délicat a été soulevé à maintes reprises par les amateurs d’arts martiaux mixtes depuis que le verdict est tombé sur Steve Claveau.

En 2007, six mois après avoir fini de purger une peine de sept ans pour agression sexuelle sur des mineures, le boxeur Dave Hilton s’est vu accorder le droit de revenir à la compétition. Il a battu Adam Green par décision unanime avant de se retirer pour de bon.

« Est-ce qu’on parle bien des mêmes personnes qui m’empêchent aujourd’hui de me battre?, demande Claveau, visant les décideurs de la RACJQ en haussant le ton. Parce que ça, c’est une belle image pour le sport! Moi, je parle avec des Hell’s pendant cinq minutes et je suis un dangereux. Ne me laissez surtout pas monter sur un ring! »

« On dirait que tout ce que j’ai fait dans le monde du combat ultime ne compte pas. Pourtant, j’ai été un des pionniers du sport au Québec. J’ai aidé Jonathan Goulet à monter au UFC. Georges St-Pierre a toujours été dans mon coin… »



À l’aube de la quarantaine, Claveau, qui montre une fiche de 8–8-1 en carrière, veut qu’on lui donne l’opportunité de disputer quelques combats avant d’accrocher ses gants définitivement. L’organisation Ringside MMA espérait pouvoir l’inclure sur sa carte du 21 octobre, mais semble-t-il qu’il faudra enterrer l’idée.

De quel côté de la clôture vous tenez-vous? Comprenez-vous la position de la RACJQ ou croyez-vous que Steve Claveau est victime d’une injustice? Exprimez-vous, mais sans dépasser les limites du bon goût, s’il-vous-plaît.

_Si vous êtes sur Twitter, il est possible de me suivre_ @NicLandryRDS.