Hier après-midi, un groupe de combattants du UFC a institué une poursuite en vertu des lois antitrust américaines contre le UFC et sa compagnie parente Zuffa. Plus précisément, la requête a été déposée à la cour du Northern District de la Californie au nom de Cung Le, actuel combattant du UFC et de deux anciens, Jon Fitch et Nathan Quarry.

Demandes des combattants

D’entrée de jeu, ils cherchent à obtenir l’autorisation du recours collectif et ce, pour représenter d'autres combattants. Pour reconnaître l’existence d’un recours collectif, ils devront remplir certaines exigences procédurales, notamment celle de soulever des questions de droit ou de faits identiques, similaires ou connexes.

Essentiellement, ce qui est allégué à la requête est que le UFC a violé le Sherman Antitrust Act pour former un marché moins compétitif. Plus précisément, les combattants soutiennent que le UFC a contrevenu à l'article 2 de cette loi, lequel concerne la légalité des monopoles. L'essence même de cet article est que toute entreprise doit avoir recours à des pratiques anticoncurrentielles sur une industrie particulière dans un marché donné. Ainsi, les combattants reprochent que le UFC monopolise son marché de combattants en ne permettant pas sa libre concurrence  et ce, tel qu’il est prévu à l’article 2. Ce faisant, le UFC réduit les possibilités de revenus des combattants, lesquelles seraient accessibles dans un marché plus compétitif. En fait, ils insistent que le UFC détient un monopole illégal sur ses combattants en ce qu’il élimine les compétiteurs sur le marché et limite conséquemment les revenus disponibles pour ses athlètes.

À leur avis, le UFC étouffe illégalement la concurrence aux ligues d'arts martiaux mixtes. À ce titre, ils soutiennent qu’en leur interdisant de négocier avec les ligues MMA, le UFC se permet de les payer à de bas salaires et de leur imposer des normes d’emploi minimales et strictes. De telle sorte que le UFC laisse ses combattants sans pouvoir de négociation et prend alors avantage de cette absence de concurrence. Selon eux, le UFC aurait utilisé une combinaison de contrats oppressifs et de tactiques trompeuses pour éliminer ses rivaux et les futurs rivaux sur le marché. L'absence de concurrence sérieuse pour le UFC leur laisse donc le monopole. Tel est le cas pour les personnes qui vendent un service à un seul acheteur principal, la MMA « vend » ses combattants au seul important acheteur sur le marché, le UFC. Dans une telle optique, l'acheteur peut fixer des prix plus bas et imposer d'autres restrictions sur les ventes puisqu’il sait pertinemment que les autres acheteurs ne sont pas suffisamment importants pour offrir de meilleurs prix.

Par ailleurs, les combattants prétendent qu'ils ont été forcés de signer des contrats oppressifs qui les rendent serviteurs du UFC en ce que l'agence libre leur est refusé et qu’ils doivent leur céder l’exploitation de leur nom et de leur image. En fait, ils soutiennent que le UFC les obligent à renoncer à leurs droits de la personnalité à perpétuité, les empêchant ainsi de recevoir le bénéfice associé à l’exploitation lucrative de leur nom et de leur image. À ce titre, ces demandes rappellent celles soulevées par Ed O'Bannon dans le cadre de sa poursuite contre le NCAA qui portait principalement sur ​​l'octroi de licences et des droits à l'image des athlètes de niveau collégial. Ce qu’O’Bannon reprochait à la NCAA est qu’un joueur collégial ne pouvait pas tirer profit de sa propre image, laquelle bénéficiait seulement à l'université et à la NCAA. Cette revendication s’apparente donc à ce qui est réclamé par les combattants en l’espèce.

Précisons toutefois que contrairement aux athlètes de la NBA, de la NFL, de la MLB et de la LNH, les combattantsdu UFC ne sont pas syndiqués et il n'y a pas d’Association de joueurs. En conséquence, les restrictions et les normes quant aux salaires des combattants ne sont pas négociées collectivement et donc ne figurent pas dans une convention collective. Les normes sont plutôt négociées individuellement entre les combattants et le UFC.

Moyens de défense du UFC

Bien entendu, le UFC offrira un certain nombre de moyens de défense. Tout d'abord, il fera valoir que les combattants signent volontairement leurs contrats avec le UFC. Ainsi, aucun combattant n’est forcé à poursuivre une carrière dans le UFC, ni d’accepter les conditions d'emploi offertes par le UFC. Il y a en revanche d'autres ligues et d'autres professions que les combattants pourraient plutôt poursuivre. De manière générale, le UFC allèguera que leurs contrats reflètent un échange consensuel négocié à des fins qui profitent aux deux parties. Alors que le UFC semble profiter de la prestation de travail de ses combattants, ces derniers sont compensés financement en plus de jouir d’une importante visibilité médiatique et d’endosser des opportunités qu'ils ne pourraient pas obtenir autrement. Par ailleurs, le UFC indiquera qu’il n’est pas illégal de vouloir prospérer dans le monde des affaires. Enfin, il est fort probable qu’il soumette des données et des témoignages d'experts qui relient la croissance extraordinaire de la popularité du MMA aux États-Unis à la réussite du UFC. Selon cette théorie, la prévention du UFC de livrer une concurrence efficace mettrait en danger sa popularité, et potentiellement conduirait à des salaires inférieurs pour les combattants du UFC.

Quoi qu’il en soit, un litige fondé sur des violations aux règles antitrust engendre souvent un très long processus judiciaire et il est donc peu probable que cette cause se règle rapidement. Or, rappelons que le UFC avait fait l’objet en 2011 d’une enquête par le Federal Trade Commission's Bureau of Competition, lequel est un organisme américain responsable des dossiers de monopole. En janvier 2012, le dossier avait été fermé, mais le FTC s’était tout de même réservé le droit de rouvrir cette enquête.