MONTRÉAL - Maryeve Dufault aurait pu opter pour une carrière de mannequin, revêtir des robes griffées et participer à des soirées glamour, mais elle a préféré enfiler une combinaison ignifuge camouflant ses formes, piloter un bolide de course et s'attaquer à une chasse gardée typiquement masculine. Comme la pilote américaine Danica Patrick.

"C'est sûr que Danica est une icône, parce qu'elle a été découverte rapidement et que c'est une fille, a déclaré la pilote du bolide Dodge no 10. On a cependant pas le même 'background', et je considère que nous sommes des pilotes, comme tous les autres sur le plateau, et donc ça ne change rien."

Elle reconnaît cependant que la pression est perceptible dans les puits, car le fait d'être une femme pilote au sein d'un univers dominé par l'homme n'a rien de reposant.

"Je sais que les yeux se tournent vers moi dès que ça ne fonctionne pas comme je le veux. Les choses se corsent, car on attend beaucoup de moi, a-t-elle avoué. J'aimerais obtenir des résultats toute de suite et prouver que j'ai ma place parmi eux."

Dufault, qui est originaire de Sorel, provient d'une famille possédant une longue histoire en course automobile. Comme son père et son frère, elle a amorcé sa carrière en motocross et en karting. Puis elle a poursuivi en séries de promotion monoplace dans les championnats Jim Russell, Skip Barber, Star Mazda et formule BMW USA.

Une passion dont pourrait se passer sa mère, Judith Giguère, qui est constamment tourmentée entre la fierté de voir sa fille courir en stock car et l'anxiété de la voir se blesser en piste.

"C'est sa deuxième course en NASCAR, alors on ne peut demander mieux, a confié Mme Giguère. Mais en même temps, c'est mon enfant et je ne veux pas qu'elle s'accroche - même pas le petit ongle. Je l'ai suivie partout aux États-Unis - à Infineon, à Fontana - et donc je commence à m'habituer. Mais c'est son rêve, et je ne peux aller contre ça.

"Maryeve veut tellement bien faire, et elle est tellement compétitive. Demain (dimanche), la sensation sera incroyable lors de la course et j'espère que ça ira bien. Toute la famille est là, sa tante, sa cousine...On sera toujours là pour l'appuyer."

En plus de sa carrière de pilote, Maryeve utilise ses talents comme cascadeuse dans des films hollywoodiens, et travaille comme pilote de précision pour des compagnies automobiles et de motos. Elle a également participé à une publicité pour son commanditaire, Dodge, en compagnie d'Andrew Ranger.

"Mon titre de pilote de développement avec Dodge me permet de sortir de l'ombre, a reconnu Dufault. Surtout d'être associée à Andrew, qui est un excellent pilote. Il est super gentil, c'est vraiment un bon gars! Avec la célébrité, ça fait beaucoup à apprendre, mais ça fait partie de la course et je m'adapte."

Dufault a aussi signé un contrat de deux courses - Trois-Rivières et Montréal - en début d'année avec l'écurie québécoise FAZZT Racing, qui compte aussi sur les services d'Alexandre Tagliani en IndyCar.

"André (Azzi) supporte beaucoup les pilotes québécois, il est très généreux et s'implique beaucoup dans la course automobile, a plaidé la jeune femme. Je suis vraiment contente de l'opportunité que j'ai en ce moment."

Bien qu'elle ignore ce qu'il adviendra après l'épreuve de Montréal, Dufault s'est dite confiante de se trouver rapidement du travail en course automobile.

"On va voir et discuter plus tard. Mon plan B serait de retourner en formule, comme Alex (Tagliani) et Patrick Carpentier à l'époque, a-t-elle indiqué. Mais mon rêve ultime serait de courir en Nationwide."

Dufault a dû s'ajuster au stock car

Dufault a confié qu'elle connaissait bien le circuit Gilles-Villeneuve, puisqu'elle y a couru il y a trois ans en formule (open wheels). La jeune femme a cependant reconnu que l'adaptation entre les deux types de bolide a été une tâche ardue.

"Je connais bien le circuit, mais c'est très différent selon la voiture dans laquelle tu cours. Je ne peux pas attaquer de la même façon, j'ai même dû changer mes lignes ce matin (samedi), parce que la voiture ne se comporte pas comme une formule, a-t-elle expliqué. Placer une voiture de 3600 livres c'est très différent. Néanmoins je suis très satisfaite de mon adaptation."

Dufault n'a pu compléter la séance d'essais libres de la série Canadien Tire, samedi matin, en raison d'un bris de transmission.

"Ma voiture fonctionnait pas très bien lors de la séance d'essais libres samedi matin, puis en qualification ç'a mieux été, mais malheureusement je n'ai pas été capable de me trouver un trou, a contextualisé Dufault. J'ai essayé de réaliser un tour rapide, mais le drapeau jaune est tombé et mauvais moment et je suis restée prises."

La déception pouvait se lire sur la visage de la Québécoise, qui devra s'élancer du fond e de la grille de départ dimanche matin.

"Je suis déçue un petit peu, mais ça fait partie de la course, a-t-elle dit fatalement. C'est sûr que j'aurais aimé commencer ça en force - et c'est sûr que je ne peux contrôler les problèmes mécaniques - mais en qualifications j'aurais préféré avoir la chance de mon bord. Mais demain est une autre journée, et on tourne la page."

La Québécoise a confié qu'elle espérait se tenir loin du trouble en course, dimanche, et avancer au sein du peloton malgré l'agressivité des autres coureurs.

Lors de sa première épreuve en série Canadien Tire au Grand Prix de Trois-Rivières plus tôt ce mois-ci, Dufault était partie de la 27e position et avait croisé le fil d'arrivée en 20e.

"J'aurais pu viser un top 10, ou un top 12, mais j'ai appris beaucoup dans cette course-là. J'espère que ça m'aidera à l'avenir."