MONTRÉAL - Les artisans d'un documentaire sur la vie du grand pilote de course Ayrton Senna sont tombés sur une mine d'or en obtenant l'accès aux archives de Bernie Ecclestone, le numéro un de la Formule Un.

Des centaines d'heures de vidéo, dont de bonnes parties jamais vues du public, étaient à leur disposition pour raconter l'histoire d'un pilote des plus talentueux et imité, un triple champion du monde décédé à 34 ans dans une stupéfiante collision à Imola en Italie, en 1994.

« Il y avait beaucoup de matériel, mais c'était là un heureux problème, a mentionné par téléphone Asif Kapadia, le réalisateur britannique de « Senna ». Ce qui cause problème c'est quand vous n'avez pas assez de matériel, ou quand votre sujet n'est pas assez intéressant. Le défi, dès le départ, était de trouver l'équilibre pour capter l'intérêt à la fois de ceux qui savent tout sur lui et de ceux qui ne connaissent pas son sport. »

La salle comble qui a vu l'oeuvre de 105 minutes en primeur canadienne, la semaine dernière, était un mélange d'inconditionnels de courses, de Brésiliens d'origine, pour qui Senna est un héros national, et de cinéphiles qui avaient lu de belles choses sur le film, qui s'est attiré une majorité de bonnes critiques à l'étranger.

Le documentaire s'intéresse surtout à la rivalité de longue date entre Senna et son ancien coéquipier de McLaren, Alain Prost, et au favoritisme soupçonné envers le pilote français venant de la F1 et de sa tête dirigeante de l'époque, le Français Jean-Marie Balestre.

Comme d'autres films sur des figures célèbres, le sujet est traité avec une révérence appuyée, mais la précision de la présentation, l'aperçu inédit du monde de la F1 et les moments de pure émotion en font une oeuvre remarquable.

Il n'y a pas d'entretiens avec des experts ou de témoignages d'anciens collègues, ce qu'on voit souvent dans les documentaires. Les images d'archives ont préséance dans « Senna », avec quelques fois en soutien des voix hors-champ de gens qui l'ont côtoyé de près, incluant sa soeur aînée Viviane.

On y voit des images captées par son frère cadet Leonardo de la famille en vacances; les images n'étaient pas destinées à être vues par le public, mais la famille a accepté de les rendre disponibles. L'oeuvre inclut également des séquences des réunions des pilotes avant les courses, au plus fort de la rivalité Senna-Prost. L'animosité et les émotions y sont palpables.

En mai 1994, au Grand Prix de Saint-Marin à Imola, le Brésilien Rubens Barrichello a été gravement blessé lors des essais, et l'Autrichien Roland Ratzenberger a été tué dans un accident spectaculaire le lendemain.

Le jour de la course, peu après un redémarrage à la suite d'un accident, Senna a pris un virage droite-gauche mais sa colonne de direction s'est brisée, l'envoyant à haute vitesse dans un mur de béton. Une pièce du bolide a transpercé son casque et son décès a été constaté quelques heures plus tard, causant une onde de choc dans le sport automobile.

Le Brésil a d'ailleurs déclaré trois jours de deuil national pour honorer la mémoire de Senna, qui était vu comme l'un de ses plus grands ambassadeurs.