PARIS - Le projet d'une ligue « fermée », baptisée WorldSeries, poussée par plusieurs équipes WorldTour (1re division), suscite l'opposition des fédérations européennes de cyclisme, qui refusent d'ores et déjà cette opération étiquetée surtout business, tandis que l'UCI se montre réservée.

Des équipes à l'affût

« Tous les éléments sont réunis pour que le cyclisme bascule », a estimé dernièrement Dave Brailsford, directeur de l'équipe Sky, au site spécialisé cyclingnews. Il s'est déclaré favorable à un changement de structure pour son sport, dans le droit fil des pourparlers engagés par BSkyB, le groupe TV propriétaire de Sky, pour devenir partenaire du projet WorldSeries.

Ce projet imagine un calendrier et surtout un modèle différent pour le partage des droits TV, actuellement dévolus aux seuls organisateurs. D'un montant limité, hormis pour le Tour de France, ces droits sont guignés de longue date par les patrons d'équipes.

Sur fond de mondialisation, ces WorldSeries comprendraient aussi de nouvelles épreuves d'un format type (course de quatre jours, avec des étapes s'adressant tantôt aux sprinteurs, tantôt aux rouleurs, etc).

Selon le site du groupe Bloomberg, une douzaine d'équipes seraient favorables au projet porté par le Britannique Jonathan Price et le Suisse Thomas Kürth, ex-directeur du G14 qui regroupait au début des années 2000 les clubs de football européens les plus puissants.

Officiellement Sky n'a pas rejoint, jusqu'à présent, les équipes impliquées, Omega Pharma, Saxo et Garmin entre autres. Mais leur camp est renforcé par la prise de position d'une formation comptant dans son effectif les deux premiers du Tour de France 2012 (Wiggins et Froome).

« Je ne pense pas qu'il y ait besoin d'avoir une majorité des équipes pour y arriver, a estimé Brailsford. Si c'est le bon plan, c'est le bon plan pour tout le monde. Il n'y aura pas de résistance car tout le monde en profitera. »

Affaires ou dérives?

« Nous sommes très hostiles à un système de ligue fermée », a martelé le Français David Lappartient, élu dimanche par 74 % des votants à la présidence de l'Union européenne de cyclisme (UEC), qui regroupe les différentes fédérations nationales sur le vieux continent.

Le modèle WorldSeries cherchant à réduire l'aléa sportif afin de développer le chiffre d'affaires n'est pas loin d'être assimilé par ses adversaires à une captation du cyclisme professionnel au profit des promoteurs du projet et de quelques dirigeants d'équipes, pour certains responsables des dérives éthiques de ces dernières années.

« Comme par hasard, les équipes favorables à une ligue fermée ne sont pas celles qui sont au MPCC (Mouvement pour un cyclisme crédible) », a relevé Lappartient.

Selon des informations concordantes, les hommes d'affaires concernés n'ont reçu aucun signal favorable des organisateurs du Tour de France, qui constitue la clé de voûte du calendrier. Or, sans le Tour, l'événement-phare, tout calendrier d'élite est par définition incomplet.

À propos d'un système rappelant à plusieurs égards celui imaginé par son prédécesseur Hein Verbruggen en 2005, Pat McQuaid, président de l'Union cycliste internationale (UCI), semble observer une réserve prudente.

En décembre, l'UCI avait reconnu avoir eu des discussions avec le groupe d'investisseurs et de lobbyistes mené par le Tchèque Zdenek Bakala (propriétaire d'Omega Pharma), pour réformer le WorldTour. Avant de faire un pas en arrière.

« L'UCI ne veut pas d'une ligue », a affirmé dimanche McQuaid. « Mais il faut quand même développer le cyclisme professionnel et il est important de travailler ensemble. »