NYBORG, Danemark – Sillonnant l'Hexagone en juillet, le peloton du Tour de France est aux premières loges du réchauffement climatique auquel il est contraint de s'adapter : les températures moyennes enregistrées sur le revêtement de ses routes ont bondi de dix degrés en moyenne en vingt ans.

La vague de chaleur de juin qui a touché de plein fouet les coureurs du Tour de Suisse et de la Route d'Occitanie s'inscrit dans une tendance de fond. Entre les trois éditions du Tour de France de 1999 à 2001 et les trois dernières ayant eu lieu en juillet (2018, 2019 et 2021), la température moyenne relevée sur les routes est passée d'environ 29,6 degrés à 40,1 degrés.

Le « Monsieur Route » du Tour, André Bancalà, coordinateur des Départements de France, a partagé à l'AFP ses données relevées et compilées depuis 1999. Il enregistre, à l'aide d'un pistolet, les températures de l'air et du sol, au kilomètre zéro, à mi-étape et juste avant l'arrivée (à la flamme rouge) pour s'assurer que les routes ne « ressuent » pas sous l'effet de la chaleur, c'est-à-dire qu'elles ne ramollissent et ne deviennent glissantes.

André Bancalà a conservé ses relevés et a calculé des moyennes par édition du Tour de France en ne retenant que la semaine précédant le 14 juillet et celle le suivant pour écrêter de ses données les départs à l'étranger et neutraliser, au possible, les changements de dates du Tour de France, en raison des Jeux olympiques par exemple.

« L'augmentation de la température du sol est plus nette car j'imagine que le demi-degré ou le degré supplémentaire a plus d'incidence sur les revêtements sombres des routes », décrit André Bancalà. Cette chaleur emmagasinée se transmet ensuite aux coureurs.

Protocole « températures extrêmes »

« Je n'ai pas mesuré la température des routes mais on voit bien que l'environnement change beaucoup », confirme le directeur de la performance de l'équipe Jumbo Mathieu Heijboer. « Normalement, nous n'avons recours à des stratégies de rafraîchissement que quelques jours pendant le Tour, un peu plus pendant la Vuelta mais c'est de plus en plus souvent. »

« On utilise des vêtements réfrigérants hors course et des cols froids en course », explique le médecin de l'équipe AG2R Citroën, Thomas Klimaschka. « Il faut rappeler aux coureurs de boire assez et surveiller le seuil de potassium, perdu avec la transpiration. Ils peuvent en absorber en pastille ou avec une boisson dans un bidon. »

Sept équipes du Tour de France ont également recours à un capteur mesurant la température du corps en course, selon le fabricant Core sensor. « C'est une possibilité mais pour le moment (avec une température de l'air) entre 30 et 35 degrés, nous sommes habitués à réagir », décrit le Dr Thomas Klimaschka.

Au-delà, en cas de « températures extrêmes », le protocole de l'Union cycliste internationale, prévoit la possibilité d'un « changement de parcours ou neutralisation d'une partie » de celui-ci voire « l'annulation de l'étape ou la course ».

Machine à glaçons et gels réfrigérés

Même quand elle ne met pas en danger les coureurs, au point de souffrir d'un coup de chaleur, les températures élevées sont un paramètre surveillé par les équipes.

Le nouveau camion de l'équipe Jumbo depuis l'an passé comprend une machine à glaçons. « On utilise aussi des gels nutritifs froids à des températures de 0 à 2 degrés pour refroidir l'organisme par l'intérieur », détaille Mathieu Heijboer. En plus de l'aérodynamique, leur équipementier textile « développe des vêtements qui ventilent plus ».

Le record de température enregistré par André Bancalà est de 63 degrés au sol dans la station des Rousses en 2010 lors de l'étape remportée par Sylvain Chavanel.