Des règles spécifiques pour Armstrong?
Cyclisme mercredi, 31 oct. 2012. 08:53 jeudi, 12 déc. 2024. 01:36
LAUSANNE - Le cas de Lance Armstrong, condamné pour des faits pour la plupart prescrits et sur la foi de témoignages d'ex-coéquipiers dopés, laisse perplexes plusieurs spécialistes du droit du sport, qui déplorent une décision avant tout politique faisant fi des règles antidopage.
"L'affaire est certes exceptionnelle par son ampleur, mais ce n'est pas une raison pour ne pas appliquer les règlements, voire les ignorer, comme cela a été le cas", juge Antonio Rigozzi, professeur de droit du dopage à l'Université de Neuchâtel (Suisse).
Cet avocat suisse peut certes comprendre que pour éviter "un suicide médiatique", l'Union cycliste internationale (UCI) ait préféré valider la décision de l'Agence antidopage américaine (Usada) et rayer d'un trait les sept Tours de France remportés par le Texan. Mais en faisant "primer l'aspect politique sur l'aspect juridique", elle perd de sa crédibilité, selon lui.
Car entre les libertés prises avec la durée de prescription, limitée à huit ans pour les infractions antidopage, et les accords généreux passés avec les anciens coéquipiers d'Armstrong désormais accusateurs, plusieurs dérogations aux règlements font sourciller les défenseurs des athlètes.
"On n'a pas une procédure antidopage classique, mais une procédure Armstrong. On se concentre exclusivement sur lui et on accepte, en échange de témoignages favorables au dossier, d'avoir plusieurs autres athlètes épargnés par cette grande vague", regrette Alexis Schoeb, autre avocat suisse spécialiste du sport.
"Beaucoup d'anciens cyclistes font actuellement un mea culpa, à l'image de Jonathan Vaughters, le patron de l'équipe Garmin. Dans ces cas, le délai de prescription de huit ans a été respecté", souligne-t-il: "Pour certains, on applique les règles et pour Lance Armstrong, clairement, non. Il y a un peu deux poids, deux mesures".
Pour l'avocat français Jean-Jacques Bertrand, l'Usada a réussi un bon "coup" politique en mettant à disposition sur son site "un rapport très charpenté, très détaillé, qui rendait pratiquement tout recours voué à l'échec".
"Personne n'ose critiquer l'Usada, de peur d'apparaître comme défenseur d'Armstrong. Mais on doit avoir des juges qui sont au-dessus des sentiments et doivent faire appliquer le droit comme il est écrit", avance cet ancien arbitre du Tribunal arbitral du sport (TAS).
Pour M. Schoeb, le cas Armstrong mériterait de finir devant le TAS, pour une décision juridiquement satisfaisante: "En l'état, il y a trop de zones d'ombre. Le débat autour de ce cas est toutefois positif parce qu'il permet de faire bouger les choses, parce qu'il invite à remettre en question le sport-business".
Pas plus que l'UCI, selon lui, l'Agence mondiale antidopage (AMA), qui a encore trois semaines pour faire appel auprès du TAS, ne serait exempte de reproches si elle classait le dossier tel quel.
"Dans le cas d'Alberto Contador, les autorités sportives, notamment l'UCI, n'avaient pas hésité à faire appel. A priori on devrait s'attendre à ce que la même démarche soit faite, afin d'assurer la bonne application de la règlementation, même lorsqu'elle est en faveur de l'athlète", note Alexis Schoeb.
Un appel de l'AMA semble cependant peu probable, elle qui s'est déjà dite "satisfaite que le plus grand scandale de dopage dans l'histoire du sport soit sur le point d'arriver à une conclusion juste et appropriée".
"Ce qui dérange le juriste, c'est de constater que les organisations antidopage ne semblent être prêtes à recourir que lorsque le règlement a été violé dans un sens favorable à l'athlète. Leur but ne devrait pas être d'avoir des condamnations à tout prix mais des décisions justes et conformes à la réglementation applicable", insiste Antonio Rigozzi.
Et de pointer: "Si l'AMA ne fait pas appel, sa légitimité en souffrira. Son rôle devrait être d'instruire à charge, mais aussi à décharge".
"L'affaire est certes exceptionnelle par son ampleur, mais ce n'est pas une raison pour ne pas appliquer les règlements, voire les ignorer, comme cela a été le cas", juge Antonio Rigozzi, professeur de droit du dopage à l'Université de Neuchâtel (Suisse).
Cet avocat suisse peut certes comprendre que pour éviter "un suicide médiatique", l'Union cycliste internationale (UCI) ait préféré valider la décision de l'Agence antidopage américaine (Usada) et rayer d'un trait les sept Tours de France remportés par le Texan. Mais en faisant "primer l'aspect politique sur l'aspect juridique", elle perd de sa crédibilité, selon lui.
Car entre les libertés prises avec la durée de prescription, limitée à huit ans pour les infractions antidopage, et les accords généreux passés avec les anciens coéquipiers d'Armstrong désormais accusateurs, plusieurs dérogations aux règlements font sourciller les défenseurs des athlètes.
"On n'a pas une procédure antidopage classique, mais une procédure Armstrong. On se concentre exclusivement sur lui et on accepte, en échange de témoignages favorables au dossier, d'avoir plusieurs autres athlètes épargnés par cette grande vague", regrette Alexis Schoeb, autre avocat suisse spécialiste du sport.
"Beaucoup d'anciens cyclistes font actuellement un mea culpa, à l'image de Jonathan Vaughters, le patron de l'équipe Garmin. Dans ces cas, le délai de prescription de huit ans a été respecté", souligne-t-il: "Pour certains, on applique les règles et pour Lance Armstrong, clairement, non. Il y a un peu deux poids, deux mesures".
Pour l'avocat français Jean-Jacques Bertrand, l'Usada a réussi un bon "coup" politique en mettant à disposition sur son site "un rapport très charpenté, très détaillé, qui rendait pratiquement tout recours voué à l'échec".
"Personne n'ose critiquer l'Usada, de peur d'apparaître comme défenseur d'Armstrong. Mais on doit avoir des juges qui sont au-dessus des sentiments et doivent faire appliquer le droit comme il est écrit", avance cet ancien arbitre du Tribunal arbitral du sport (TAS).
Pour M. Schoeb, le cas Armstrong mériterait de finir devant le TAS, pour une décision juridiquement satisfaisante: "En l'état, il y a trop de zones d'ombre. Le débat autour de ce cas est toutefois positif parce qu'il permet de faire bouger les choses, parce qu'il invite à remettre en question le sport-business".
Pas plus que l'UCI, selon lui, l'Agence mondiale antidopage (AMA), qui a encore trois semaines pour faire appel auprès du TAS, ne serait exempte de reproches si elle classait le dossier tel quel.
"Dans le cas d'Alberto Contador, les autorités sportives, notamment l'UCI, n'avaient pas hésité à faire appel. A priori on devrait s'attendre à ce que la même démarche soit faite, afin d'assurer la bonne application de la règlementation, même lorsqu'elle est en faveur de l'athlète", note Alexis Schoeb.
Un appel de l'AMA semble cependant peu probable, elle qui s'est déjà dite "satisfaite que le plus grand scandale de dopage dans l'histoire du sport soit sur le point d'arriver à une conclusion juste et appropriée".
"Ce qui dérange le juriste, c'est de constater que les organisations antidopage ne semblent être prêtes à recourir que lorsque le règlement a été violé dans un sens favorable à l'athlète. Leur but ne devrait pas être d'avoir des condamnations à tout prix mais des décisions justes et conformes à la réglementation applicable", insiste Antonio Rigozzi.
Et de pointer: "Si l'AMA ne fait pas appel, sa légitimité en souffrira. Son rôle devrait être d'instruire à charge, mais aussi à décharge".