Entre assurance et suspicion
Tour de France mardi, 25 juin 2013. 08:43 jeudi, 12 déc. 2024. 15:51PARIS - La domination de l'équipe Sky, grande favorite du Tour de France après son doublé de l'an passé, suscite inévitablement des soupçons que chasse résolument Dave Brailsford, son charismatique et inflexible patron.
Le parallèle dressé l'an dernier sur les réseaux sociaux avec l'US Postal de Lance Armstrong avait mis en colère Bradley Wiggins. Avant de gagner le Tour, le Londonien s'en était pris aux « putains de branleurs » qui s'abritent derrière un pseudonyme sur Twitter.
Un an plus tard, son dauphin Chris Froome, plus policé, se contente de dire que « le sport a beaucoup changé depuis dix ans ». « C'est choquant car tous les coureurs sont mis dans le même sac. Mais on a appris du passé. Ma victoire prouve que les choses ont évolué », a répété le favori du 100e Tour après son succès dans le dernier Critérium du Dauphiné.
Des performances en question
Dans un sport qui a beaucoup fauté durant ces deux dernières décennies, toute performance de très haut niveau est devenue suspecte aux yeux d'une partie des observateurs et du public. La supériorité de Froome lors du Dauphiné s'inscrit dès lors dans ce cadre. Frédéric Grappe, universitaire et entraîneur reconnu, préférait s'en tenir à des données exprimant sa puissance et ses valeurs physiques : « Grosse perf de Froome sur la montée de Valmorel avec 6W/kg . On est entre 85 et 90ml/min/kg de VO2max. Top du top. » Trois jours plus tard, le spécialiste tranchait : « Il (Froome) est au top de sa forme et ne progressera plus beaucoup jusqu'au Tour ».
« Compte tenu de l'histoire du cyclisme, tout le monde comprend pourquoi l'on se pose des questions et que les performances soient sans cesse discutées. C'est compréhensible mais c'est une vraie honte lorsque les coureurs propres, qui devraient être admirés sont régulièrement remis en cause », a répondu récemment l'équipe britannique à la revue "Tous dopés ?" qui évoque une "suspicion légitime".
De rares faux-pas
Créée en 2010 avec pour philosophie le refus annoncé de faire appel à toute personne ayant été impliquée dans une affaire de dopage, Sky a commis de (rares) faux-pas réparés par la suite. Entre autres, l'embauche à temps partiel du Dr Geert Leinders, qui fut le médecin de l'équipe Rabobank à l'époque du Danois Michael Rasmussen (chassé du Tour 2007).
Dans la foulée de l'affaire Armstrong, Brailsford a opté pour le contre-pied de la mode du pardon et de la repentance. Pusieurs membres de l'encadrement (De Jongh, Julich) ont pris la porte, pour des fautes commises lorsqu'ils étaient coureurs avant de rejoindre le staff britannique. Même Sean Yates, directeur sportif numéro un sur le Tour l'an passé, est parti. Pour raisons personnelles, a poliment expliqué Sky au sujet du Britannique, qui avait cotoyé Armstrong à sa grande époque.
Tolérance zéro
« On a fait des erreurs par le passé même si on a essayé de faire au mieux », a reconnu Brailsford au Dauphiné. Habile, le manager gallois anobli l'an passé après les succès du cyclisme britannique aux JO de Londres a rappelé surtout la stratégie affichée, celle de la tolérance zéro.
« On ne procède pas à des contrôles internes. Si on trouvait quelque chose, il y aurait la tentation de le cacher. Donc, on préfère travailler avec des agences extérieures, comme l'agence britannique antidopage. On a une très bonne relation avec eux et bien sûr l'UCI (Union cycliste internationale) et l'AMA (Agence mondiale antidopage) », a soutenu Brailsford.
Quant au choix de ne pas rejoindre le Mouvement pour un cyclisme crédible (MPCC), qui regroupe les équipes en pointe dans l'antidopage, le patron de Team Sky a répondu d'un sourire : « Si nous étions au MPCC, on reviendrait à moins de sévérité. Donc, on préfère rester où l'on est ».