LIEGE (AFP) - Champion du monde contre-la-montre juniors à deux reprises, Fabian Cancellara s'est offert, à 23 ans, un double plaisir, samedi à Liège, en endossant le maillot jaune et, mieux encore peut-être, en repoussant le maître Lance Armstrong à deux secondes dans le prologue du Tour de France cycliste.

Un si grand bonheur en vérité au terme d'une si brève aventure de 6,100 km! Mais, ce jeune Bernois n'en fera pas un fromage, fut-il suisse. Il sait en effet raison garder: "Qu'on ne se méprenne pas, Lance est en grande forme, présent pour gagner".

Cependant, force est de constater que ce succès arrive à point nommé pour le bougre aux allures de jeune premier, avec ses 186 centimètres pour 78 kilos (il a légèrement fondu ces derniers temps).

Arrivé l'an dernier dans la Fassa Bortolo, précédé d'une solide réputation de puissant rouleur façonnée dans les rangs de la Mapei espoirs, il lui fallait rapidement concrétiser son talent pour échapper, peut-être, au danger guettant les sans-grade de l'équipe italienne: être enrôlé dans le train, spécial sprint, à disposition du maître Alessandro Petacchi.

Les plus belles montagnes du monde

Fabian Cancellara, de mère Basilicate et de père suisse-allemand, n'a donc pas laissé passer l'occasion de s'accorder un régime de faveur, pour sa première participation à la Grande Boucle.

Il doit au hasard, à son amour de la nature, tout autant qu'à son talent, de se retrouver lové dans ce fauteuil d'orchestre au départ de la première étape Liège-Charleroi.

Sa curiosité l'avait amené au fin fond du garage familial, à l'âge de 13 ans, alors qu'il dépensait son énergie au soccer. Il y fit la découverte d'un vieux vélo duquel il s'enticha immédiatement.

Il raccrochait donc les crampons et se lançait dans l'aventure de la bicyclette. "Cela a bouleversé ma vie. Je me suis soudainement aperçu que j'étais resté enfermé dans un périmètre restreint et que la nature, verte et magnifique, s'ouvrait à mes nouvelles aspirations, explique-t-il. Je me suis lancé à corps perdu sur les routes, auprès de ces montagnes, les plus belles du monde".

Les détails du champion en herbe devaient être ensuite réglés par son mentor Roberto Damiani, sensible le premier jour "à cet exceptionnel moteur" ronronnant en lui, et ceux de l'homme séduisant à souhait, par Stéphanie, sa copine coiffeuse à Berne, elle aussi amoureuse des cimes enneigées.