MARSEILLE (AFP) - A l'heure de la première journée de repos mercredi à Narbonne, le médecin-chef du Tour de France Gérard Porte avoue que "le peloton est fatigué", conséquence de températures souvent supérieures à 30 degrés ayant plombé les dix premières étapes de la Grande Boucle du Centenaire.

"Lorsqu'elle est associée à une moyenne kilométrique élevée, ce qui est le cas depuis le départ, la chaleur fatigue d'autant plus les organismes, explique-t-il. Abandonnent alors en priorité les +petits+ coureurs qui tirent davantage sur la batterie que les +grands+".

Le Français a fait ses comptes: 23 coureurs ont subitement mis pied à terre, sur les 27 manquant à l'appel avant l'arrivée mardi à Marseille, la preuve que l'association canicule-vitesse a eu raison de la résistance des plus faibles au cours de la traversée des Alpes, première difficulté du 90e Tour de France.

Pour le praticien parisien, âgé de 52 ans, la journée de repos ne suffira pas à redonner vigueur à l'ensemble des coureurs. "Ce ne sera pas suffisant pour que les fameuses batteries se rechargent, insiste-t-il. Toutefois, elle fera quand-même du bien".

Comment l'utiliser de la meilleure des manières? "Je soutiens qu'il y a deux catégories de coureurs: les petits pour lesquels l'idéal serait de ne rien faire, si ce n'est de la chaise longue en s'hydratant, et les grands qui ont les moyens de recharger plus vite, confie Gérard Porte. Ces derniers, ressentant moins la fatigue, auront sans doute le désir de profiter de la fraîcheur matinale pour rouler deux à trois heures".

Entre 125 et 150 aux Champs-Élysées

Si les conditions caniculaires et de course devaient se poursuivre, le Parisien d'adoption aux 32 boucles (quatre comme infirmier, six comme adjoint de Philippe Miserez et vingt-deux en qualité de responsable du service médical) opterait pour un peloton d'une densité se situant entre 125 et 135 éléments sur les Champs-Élysées à Paris.

"Mais, si le temps frais devait s'installer, estime-t-il, on pourrait avec
un peu de chance tabler sur 150 rescapés".

Durant cette première partie du Tour de France, Gérard Porte a été "épaté" par le courage d'un trio de coureurs: le tricolore Jimmy Casper, touché aux cervicales sans lésion mais placé au début dans l'obligation de porter une minerve, l'Italien Fabio Baldato opéré de la main, et l'Américain Tyler Hamilton, victime d'une fêlure de la clavicule.

"On a moins parlé de Baldato mais il exemplaire dans sa lutte, tout comme Jimmy Casper auquel je dis bravo. Il y avait un col de trop pour lui, souligne-t-il. En revanche, je pense que Tyler Hamilton a fait le plus dur alors qu'après sa chute à Meaux, mes craintes de le voir abandonner s'élevaient à cinquante pour cent. Il m'avait même confié le lendemain matin qu'il ne lui serait pas étonnant d'arrêter après dix kilomètres".

Enfin, Gérard Porte ne veut pas envisager que la fatigue ait pu avoir raison de l'Espagnol Joseba Beloki dans la dramatique chute qui a contraint le chef de file de ONCE à l'abandon.

"Le goudron, un virage et une vitesse peut-être excessive sont en fait les seuls responsables", observe Gérard Porte qui ne répétera jamais assez que les leaders ont "des capacités supérieures au niveau de la batterie", ce plus qui différencie les "grands" des "petits".