MADRID - L'ex-coureur cycliste allemand Jörg Jaksche, entendu comme témoin au procès de l'affaire Puerto, a déclaré lundi à Madrid qu'il n'était pas le seul membre de l'équipe Liberty Seguros client du docteur Fuentes, principal accusé dans ce scandale de dopage.

« Je ne peux pas dire qui exactement dans l'équipe, en dehors de moi, faisait partie des clients de Fuentes, mais je sais qu'il y en avait d'autres », a assuré Jaksche, qui avait avoué s'être dopé via les services de Fuentes après l'opération policière ayant permis la saisie de près de 200 poches de sang dans les appartements madrilènes du médecin en 2006.

« Lors des compétitions, les autotransfusions étaient matérialisées par des petits cercles. Je me rappelle que lors d'une de nos entrevues, Fuentes m'avait montré la carte du Tour de France à venir, 2005 ou 2006, je ne sais plus. Eh bien, on ne pouvait plus voir la carte tant il y avait de petits cercles », s'est notamment souvenu Jaksche.

Jaksche a raconté par le menu les différents services proposés par Fuentes - autotransfusions, hormones de croissance, anabolisants, EPO - et les prix demandés par le docteur - 4000 euros par poches de sang sur un Tour de France.

Un mystérieux coureur de premier plan

Il a aussi évoqué la présence d'un coureur de premier plan, arrivé en 2005 dans la formation, et qui aurait selon lui fait partie des clients du docteur Fuentes, mais sans mentionner son identité.

Selon lui, la collaboration de Liberty Seguros avait été officiellement interrompue en 2005, mais les coureurs « qui souhaitaient encore aller le voir pouvaient le faire ».

Et même si Jaksche a déclaré ne pas savoir si l'équipe avait recommencé à travailler en 2006 avec le médecin, il a fait part de ses soupçons.

« Fin 2005, un coureur de premier plan était arrivé dans l'équipe et n'avait pas eu les résultats escomptés. Fuentes m'a alors dit : "ton chef (Manolo Saiz, également inculpé) s'est manifesté auprès de moi". Je lui ai alors dit : "c'est sans doute en raison du nouveau", ce que Fuentes m'a confirmé par la suite », a raconté Jaksche.

Le coureur repenti a terminé par une diatribe contre son ancien milieu. « Les mêmes personnes qui nous incitent à nous doper durant notre carrière sont celles qui nous montrent ensuite du doigt pour se refaire une virginité. Ils ont le grand avantage par rapport aux coureurs de ne pas pouvoir être testés positifs lors de tests antidopage. »

Basso déstabilisé par l'avocate de l'AMA

Le cycliste italien Ivan Basso, sanctionné sportivement dans le cadre de l'affaire de dopage Puerto mais qui a toujours nié avoir utilisé les poches de sang trouvées à son nom, a été déstabilisé par l'avocate de l'Agence mondiale antidopage (AMA) lundi lors du procès.

Le coureur, condamné en 2007 à deux ans de suspension, a affirmé s'être mis d'accord avec le docteur Fuentes sur des autotransfusions à l'automne 2005 - sans admettre les avoir utilisées - et avoir aussi à cette occasion choisi le nom de code censé identifier ses poches de sang, Birillo, dans son témoignage par vidéoconférence depuis Tenerife où il se trouve actuellement avec son équipe actuelle, Cannondale.

Mais l'avocate de l'AMA l'a mis en difficulté en produisant un fax datant du 27 avril 2005, saisi chez Fuentes par la Guardia civile, et portant déjà le nom de « Birillo ».

« Comment pouvez-vous expliquer que ce nom apparaisse déjà sur un fax datant d'avril 2005 si vous affirmez avoir défini ce nom de code à l'automne 2005 avec Fuentes, en même temps que le plan complet des autotransfusions? », lui a-t-elle demandé.

Le cycliste n'a alors pas donné de réponse satisfaisante, invoquant le nombre d'années passées depuis le démantèlement du réseau en 2006 et sa mémoire défaillante.

La déposition de Basso a même parfois tourné à la farce quand sa traductrice a répondu aux questions du tribunal de Madrid à sa place.

« J'ai gagné avant Puerto, mais aussi après Puerto. De mon point de vue, (ma collaboration avec Fuentes) a été une faiblesse pour réaliser mon rêve de gosse, gagner un jour le Tour de France. J'ai réalisé plus tard que je n'avais pas pris la bonne décision », a assuré Basso.

Le coureur a toutefois réitéré sa version des faits dont il n'a jamais démordu : « Trois extractions de sang ont eu lieu à l'automne 2005, mais jamais ce sang ne m'a été réinjecté. Mon intention était d'utiliser les poches de sang pour gagner le Tour 2006, mais comme le réseau a été démantelé en mai 2006, ça ne s'est jamais fait », a martelé l'Italien.

Par ailleurs, le coureur a dit avoir toute confiance dans le professionnalisme du docteurs Fuentes, poursuivi pour délit contre la santé publique et non pour aide au dopage.