PARIS (AFP) - Les pavés du Nord, jadis évocateurs de l'Enfer, attendent dimanche les derniers aventuriers du sport cycliste dans Paris-Roubaix, formidable dramatique de 259 kilomètres surnommée la "reine des classiques".

A défaut de Wallers-Arenberg, la célèbre trouée jugée trop dangereuse et abandonnée provisoirement le temps d'une nécessaire réfection, le parcours propose une succession de grandes difficultés à partir de Troisvilles (km 97). Les organisateurs ont cherché, et trouvé, d'autres secteurs dans le sud du Valenciennois pour aboutir à un total de 54,7 kilomètres de pavés. Davantage que les années passées!

Paris-Roubaix a l'habitude de susciter les sentiments extrêmes. On l'aime ou on la déteste. Par son anachronisme, elle était menacée de disparition voici quelques années. Jusqu'à cette prise de conscience collective par le Nord, de nouveau fier de son patrimoine.

Les Belges, qui viennent en voisins, sont attendus nombreux pour acclamer leur nouveau champion, Tom Boonen, irrésistible dimanche dernier dans le Tour des Flandres.

Dans l'équipe Quick Step de Patrick Lefevere, souvent victorieuse à Roubaix durant la dernière décennie, Boonen assume à lui seul les responsabilités. Troisième en 2002 à sa première participation, il possède les qualités, la puissance et l'habileté, pour signer la 51e victoire belge.

La préparation de Backstedt

Mais le jeune Anversois (24 ans) sait bien que rien n'est acquis sur les chemins cahoteux de cette course étroitement dépendante des intempéries. Ses compatriotes sont ses premiers adversaires. A commencer par Peter Van Petegem, vainqueur en 2003, entouré dans sa formation par de sérieux candidats (Van Bon, Mattan, Steels).

Paris-Roubaix, course de la démesure, exerce sa fascination sur des coureurs de pays culturellement plus éloignés. Magnus Backstedt est devenu l'an passé le premier Suédois vainqueur sur le vélodrome. Au vu de ses dernières courses, le colosse de l'équipe Liquigas (1,93 m, 90 kg) a encore bien préparé son affaire, tout comme le solide Norvégien Thor Hushovd et le jeune russe Vladimir Gusev (22 ans).

La Suisse, dont l'unique succès date de 1923, croit avoir trouvé en Fabian Cancellara (4e en 2004) l'oiseau rare. L'Espagne, jamais gagnante à Roubaix, fait de même avec Juan Antonio Flecha, volé d'une victoire qui lui tendait les bras mercredi dans Gand-Wevelgem. Leur alliance sous le maillot de Fassa Bortolo place pour la première fois l'équipe italienne en première ligne.

L'Allemagne et son équipe-phare T-Mobile (toujours dans l'attente d'un grand succès) espère en la renaissance de Steffen Wesemann qui a abandonné prématurément au Tour des Flandres. Sa formation, handicapée par l'absence d'Andreas Klier, aligne aussi le grognard Rolf Aldag et le prometteur Marcus Burghardt à côté d'Erik Zabel.

"La chute, la crevaison, la douleur"

Comme de coutume, les coureurs des grands tours sont absents. Ils laissent leurs lieutenants en pleine lumière à l'exemple des deux fidèles de Lance Armstrong, le Russe Viatcheslav Ekimov et surtout George Hincapie, lequel, en bon Américain, garde confiance. Un jour, se dit-il, je trouverai l'ouverture.

Il est vrai que Paris-Roubaix réussit souvent aux hommes d'expérience, aux trentenaires qui se sont longtemps escrimés sur les mauvaises sentes du Cambrésis ou du Pévèle.

Le Belge Marc Wauters, première chance de l'équipe Rabobank, l'Australien Stuart O'Grady, s'inscrivent dans la catégorie tout comme Andrea Tafi, un ancien vainqueur (1999). A près de 39 ans, l'Italien a tenu à venir faire ses adieux, dimanche soir, au vélodrome roubaisien.

Pour gagner, les coureurs doivent allier deux qualités selon l'ancien champion belge Roger de Vlaeminck qui détient toujours le record des victoires (4): "L'adresse est nécessaire pour voltiger sur les pavés, éviter les pièges, choisir les meilleures trajectoires. Mais il faut aussi la volonté d'aller jusqu'au bout, malgré la chute, la crevaison ou la douleur."