NAMUR, Belgique (AP) - Nouveau roi du sprint après ses neuf succès d'étapes sur le Giro au printemps, Alessandro Petacchi a-t-il les moyens de rééditer cet exploit sur le Tour de France? Non, répondent les spécialistes.

Le parcours de la course, son déroulement, la concurrence plus forte, la fatigue accumulée sur le Tour d'Italie sont autant d'arguments qui jouent contre le cycliste de la Spezia.

"Même si Petacchi a gagné neuf étapes au Tour d'Italie, nous ne pensons pas qu'il peut gagner neuf étapes au Tour de France", reconnaît d'ailleurs son directeur sportif, Giancarlo Ferretti. "Nous ne sommes ni stupides, ni dotés d'une imagination particulière. On ne refait pas ça sur commande. Le Tour est une autre course, une course plus difficile."

Dimanche lors de la première étape remportée par l'Estonien Jaan Kirsipuu, un vétéran de bientôt 35 ans habitué à la nervosité des sprints de la Grande Boucle, Petacchi, vainqueur de 4 étapes l'an passé, n'a pris que la huitième place.

"Son équipe a pris trop tôt la course en mains", estime l'ancien champion Raymond Poulidor. "Puis ils ont attaqué le sprint de trop loin et c'était fini. La première équipe qui commence à rouler est marron. Par contre, ils ont très bien roulé pour conserver le maillot jaune de Fabian Cancellara." Le jeune Suisse, vainqueur du prologue à Liège, a conservé sa tunique lundi soir, avec quatre secondes d'avance sur le sprinter norvégien Thor Ushovd (Crédit Agricole).

"Tant que l'équipe aura le maillot jaune, il ne seront pas entièrement à son service", ajoute le retraité Laurent Jalabert. "C'est logique, un maillot jaune ça se respecte."

Petacchi a jusqu'à dimanche pour accumuler les victoires sur ce Tour. Après, le peloton prendra la direction du Massif Central avant de passer par les Pyrénées et les Alpes, des zones géographiques où sa puissance phénoménale ne lui servira à rien, et qu'il n'est même pas sûr de pouvoir traverser.

"On a une semaine réservée aux sprinters, et c'est à Petacchi d'en profiter, parce qu'après Quimper (Lamballe-Quimper, 8e étape dimanche), c'est fini", explique le directeur de la compétition du Tour de France, Jean-François Pescheux. "Il peut gagner au maximum huit étapes. Si on enlève le contre-la-montre par équipes de mercredi il n'en reste plus que sept. Et il a perdu hier, donc il n'en reste plus que six. A mon avis il ne fera donc pas la razzia du Tour d'Italie."

Autre problème pour l'ancien rouleur converti au sprint sur le tard, la présence sur le Tour d'adversaires de premier choix, comme le maillot vert Thor Ushovd, l'Australien Robbie McEwen ou les Allemands Danilo Hondo et Erik Zabel.

"Ici, il y a beaucoup de coureurs qui ont axé toute leur saison sur le Tour de France seulement", poursuit Giancarlo Ferretti. "C'est donc normal que Petacchi gagne moins, parce qu'il a des adversaires plus forts et en meilleure forme que lui. Parce qu'il a déjà le Tour d'Italie dans les jambes."

Un Giro où la course est beaucoup moins tendue et nerveuse que pendant le Tour. "Sur le Giro, ça roule moins vite et on arrive plus frais", poursuit Jalabert. "Les sprinters arrivent plus entiers au moment de l'emballage. On a vu dimanche que son équipe a été mise à contribution et il n'a pas eu vraiment quelqu'un pour l'emmener. Le Tour, globalement, est plus difficile, il y a plus de tension et de stress que sur le Giro, ça rajoute à la fatigue. A l'arrivée, tu as moins de jus que sur le Giro où ça roule peinard. Si t'es tranquille et que tu dois seulement faire l'effort dans le final, c'est pas pareil."

Le principal intéressé, devenu l'an dernier le troisième coureur de l'histoire à gagner au moins une étape sur les trois grands tours la même année, ne compte pas vraiment rééditer ses exploits. "Je vais peut-être étonner en disant que je me suis fixé le but raisonnable d'un succès la première semaine", a-t-il déclaré avant le départ de la course.

"Mais il peut gagner autant que l'année dernière", reste convaincu Jalabert. "Parce que des opportunités pour les sprinters il va y en avoir. Un saladier."