TURIN, Italie - Auteur d'un renversement de situation inattendu, le champion d'Italie Vincenzo Nibali a conquis le Giro pour la deuxième fois d'une carrière de plus en plus étoffée, dimanche à Turin.

À un an de fêter sa centième édition, la course rose, le deuxième grand tour par ordre d'importance dans le cyclisme, s'est offert un suspens presque complet. Par la grâce (ou la faute) de Nibali, son grand favori au départ d'Utrecht, qui a affiché sa vulnérabilité avant de se rétablir quasi-miraculeusement dans les trois derniers jours pour devancer le Colombien Esteban Chaves (2e) et l'Espagnol Alejandro Valverde (3e).

« J'ai pris le départ avec l'étiquette de favori et ça m'a un peu conditionné. On attendait beaucoup de moi et j'ai été amené à mal courir », a expliqué le Sicilien avant la fête à Turin, sur les rives du Pô décorées de rose.

« Quand j'ai compris que c'était pratiquement perdu, je me suis senti libéré », a déclaré le « Requin de Messine », sa ville de naissance voici 31 ans. Pour un improbable rétablissement, alors qu'il était pointé à plus de quatre minutes et demie du Néerlandais Steven Kruijswijk, en position de force après les Dolomites.

Un final en trombe

La glissade de Kuijswijk, vendredi, dans un virage du col d'Agnel a changé soudainement la donne. Avec le soutien de son équipe, Nibali, renaissant après avoir été en difficulté sur les cols des jours précédents, a gagné l'étape à Risoul avant de porter l'estocade, samedi, dans le col de la Lombarde sur la route menant au sanctuaire de Sant'Anna di Vinadio.

À la différence de son succès de 2013, quand il avait dominé la course de la tête et des épaules, le champion d'Italie n'a repris le maillot rose qu'à la veille de l'arrivée à Turin où la dernière étape est revenue à l'Allemand Nikias Arndt après le déclassement de l'Italien Giacomo Nizzolo pour sprint irrégulier.

Mais ce final en trombe, à l'exemple de sa stupéfiante accélération sur le haut du col de la Lombarde, rappelant celles de Chris Froome dans le Tour de France, lui a aussi ouvert d'autres perspectives.

Dans cinq semaines, il prendra le départ du Tour au sein de la même équipe que son compatriote Fabio Aru, le vainqueur de la dernière Vuelta. Puis ce sera en août le grand défi olympique, aux JO de Rio, où Nibali, l'un des six coureurs de l'histoire de son sport à avoir gagné les trois grands tours (Giro, Tour de France, Vuelta), vise une apothéose.

Le charisme de Chaves

« Avant, je pense d'abord à récupérer. Ce Giro a été très éprouvant », a toutefois insisté le coureur d'Astana, l'équipe dont il est en instance de départ en fin de saison pour une destination encore à préciser, peut-être la formation encore virtuelle en passe d'être montée à Bahrein.

Ses adversaires ont terminé la course, marqués dans leur chair. Tant Kruijswijk, qui a sans doute perdu en chutant en haute altitude, à près de 2700 mètres, une occasion rêvée de gagner un grand tour (4e au classement final), que Chaves.

Le jeune (26 ans) coureur natif de Bogota est tombé à deux reprises, dimanche, sur les routes du Piémont humidifiées par les averses. Mais « Chavito », présent sur la première fois sur le podium du Giro tout comme le vétéran espagnol Alejandro Valverde (3e), a marqué les esprits par son talent et son charisme.

Chaves, en rose à 48 heures de l'arrivée mais affaibli par un refroidissement, n'a pu imiter Nairo Quintana, vedette colombienne et seul coureur de son pays vainqueur du Giro (2014). Il a dû laisser les honneurs à Nibali, dont le succès a été salué dans son pays. « Mamma mia, le Squale! Bravo Vincenzo Nibali. L'Italie est fière de toi », a tweeté le premier ministre Matteo Renzi.

« Je n'aurais pu espérer un meilleur final », s'est félicité l'organisateur Mauro Vegni. « C'est le plus fort qui a gagné. Un vainqueur humain comme Vincenzo, un champion qui, entre hauts et bas, a montré encore une fois de quelle pâte il est fait. »

« Je suis content et soulagé » - Hugo Houle

Hugo Houle (AG2R La Mondiale) a conclu sa course sur une note positive et a pris le 72e rang du classement général.

« Je suis content et soulagé. Avec toutes les chutes, il faut rester bien placé et cela amène son lot de stress. Après trois semaines, il y a eu beaucoup de travail, d’effort et de souffrance par moment. Je suis content d’avoir fini, surtout avec mes problèmes de mollet. Ça me rend encore plus heureux de m’être rendu jusqu’à Turin sans problème majeur », a commenté d’emblée le coureur de Sainte-Perpétue.

Le Français Hubert Dupont a mené l’équipe d’Hugo Houle en terminant 43e dans un peloton comprenant plus d'une centaine de coureurs, dont le Québécois, 132e. Tous ont fini dans le même chrono que le vainqueur puisque les temps ont été gelés après le premier tour.

« Il a plu au départ et après une trentaine de kilomètres, le soleil est arrivé, sauf au circuit final. Nous faisions huit tours de dix kilomètres en ville à Turin. Il y avait un peu de pluie et l’asphalte était mouillé. Il fallait être très vigilant et il y a eu un peu de chutes. Les temps au classement général ont été neutralisés, donc ça enlevait un peu de stress. Tout le monde est resté plus calme et il n’y a pas beaucoup de coureurs qui sont arrivés dans le peloton principal », a ajouté le cycliste de 25 ans.

Houle a fini à 3 heures 20 minutes 38 secondes de Nibali. Le meilleur résultat de l’AG2R La Mondiale a été obtenu par Dupont, qui a terminé 11e du cumulatif (+24 minutes 33 secondes).

Maintenant, le Québécois devra attendre jusqu’à la mi-juin afin de savoir s’il sera sélectionné par l’équipe canadienne en cyclisme sur route pour les Jeux olympiques de Rio.

« Mon plan sera le même que j’y aille ou pas. Je rentre au Québec lundi pour me reposer un peu et après je fais les Championnats canadiens à la fin juin, le Tour de Pologne à la mi-juillet et la Classique San Sebastian en Espagne à la fin juillet. Ça n’arrête jamais! »

Classement final du Tour d'Italie :

1. Vincenzo Nibali (ITA/AST) 86h32:49.

2. Esteban Chaves (COL/ORI) à 0:52.

3. Alejandro Valverde (ESP/MOV) 1:17.

4. Steven Kruijswijk (P.-B./LNL) 1:50.

5. Rafal Majka (POL/TIN) 4:37.

6. Bob Jungels (LUX/ETI) 8:31.

7. Rigoberto Uran (COL/CAN) 11:47.

8. Andrey Amador (CRC/MOV) 13:21.

9. Darwin Atapuma (COL/BMC) 14:09.

10. Kanstantsin Siutsou (BLR/DDT) 16:20.

11. Hubert Dupont (FRA/ALM) 24:33.

12. Jakob Fuglsang (DAN/AST) 24:59.

13. Giovanni Visconti (ITA/MOV) 31:38.

14. André Cardoso (POR/CAN) 34:12.

15. Maxime Monfort (BEL/LOT) 34:34.

16. Michele Scarponi (ITA/AST) 38:09.

17. Sebastian Henao (COL/SKY) 38:09.

18. Stefano Pirazzi (ITA/BAR) 41:00.

19. Matteo Montaguti (ITA/ALM) 43:49.

20. Domenico Pozzovivo (ITA/ALM) 51:49.

21. Diego Ulissi (ITA/LAM) 56:59.

22. Gianluca Brambilla (ITA/ETI) 57:07.

23. Tanel Kangert (EST/AST) 59:30.

24. Nicolas Roche (IRL/SKY) 1h04:44.

25. Mikel Nieve (ESP/SKY) 1h05:22.

...

50. Axel Domont (FRA/ALM) 2h21:03.

54. Guillaume Bonnafond (FRA/ALM) 2h32:28.

72. Hugo Houle (CAN/ALM) 3h20:38.

86. Nikias Arndt (ALL/GIA) 3h34:14.

90. Benoît Vaugrenard (FRA/FDJ) 3h40:01.

131. Olivier Le Gac (FRA/FDJ) 4h29:26.

134. Arnaud Courteille (FRA/FDJ) 4h33:09.

144. Svein Tuft (CAN/ORI) 4h43:04.

145. Blel Kadri (FRA/ALM) 4h43:48.

146. Mickaël Delage (FRA/FDJ) 4h45:40.

154. Jack Bobridge (AUS/TRE) 5h08:51.

198 coureurs au départ d'Apeldoorn, 154 classés.