L’ultra marathonien Joan Roch se lance un nouveau défi! Le 4 août prochain, il quittera Percé avec l’objectif de courir jusqu’au sommet du Mont Royal, 1090 kilomètres plus loin. Il souhaite réaliser cet incroyable périple en seulement neuf jours.

 

Roch entend ainsi profiter de sa bonne forme acquise à l’entraînement au cours des derniers mois. À l’origine, son objectif avoué était de compléter la très difficile Triple Couronne (Triple Crown) de l’ultra marathon.  Cette trilogie consiste en trois courses de plus de 200 miles (320 kilomètres) qui doivent être complétées lors de la même saison. Joan Roch

 

La première se déroule dans l’état de Washington près du mont Saint Helens (août). La deuxième est le tour du lac Tahoe en Californie (septembre) et la troisième est Moab 240 miles (385 kilomètres) en Utah. Ceux qui réussissent à les terminer la même année réalisent la Triple Couronne.

 

La COVID-19 est venue bouleverser les plans de Joan Roch si bien qu’il a décidé de se lancer ce défi Percé-Montréal, une course de plus de mille kilomètres, soit environ la même distance que les trois courses de la Triple Couronne, mais en moins de dix jours! 

 

J’ai eu l’occasion de m’entretenir avec celui qui est également connu pour ses magnifiques photos de course qu’il présente sur ses différents médias sociaux et qui ont également fait l’objet d’un magnifique livre (Ultra-ordinaire: journal d’un coureur). Malgré ses préparatifs, Joan Roch a eu la grande générosité de répondre à mes questions. 

 

Joan, comment t’es venue l’idée de ce difficile périple?

 

J’avais de grands plans qui se passaient à l’étranger, mais puisque les frontières sont fermées et qu’il n’y a pas d’assurances pour couvrir les gens à l’extérieur du Canada,  je me suis replié sur le Québec. Je voulais courir beaucoup, mais ça ne me tentait pas de chercher mon chemin dans un sentier quelque part en Gaspésie, car je les connais très mal. 

 

Par contre, dans toutes mes courses d’entraînement pour la Triple Couronne je me suis amusé à courir beaucoup autour de chez moi. J’ai remarqué que les plus beaux couchers et levers de soleil étaient sur le fleuve Saint-Laurent ou le canal de Lachine. Alors je me suis dit pourquoi ne pas essayer de longer le fleuve depuis la fin de celui-ci et revenir jusque chez moi. 

 

Au début, je voulais partir de Gaspé, mais ça représentait moins de mille kilomètres. Je trouvais cela dommage (rire). En allant un petit peu plus loin, à Percé, et en faisant tous les détours nécessaires par la côte j’ai réalisé que si je courais jusqu’au Mont Royal ça me donnait 1090 kilomètres, ce qui est à peu près l’équivalent des trois courses que je voulais faire.

 

À quoi ressemblera ton parcours? Tes arrêts sont-ils minutieusement planifiés?

 

J’en suis encore au début de ma planification, mais, en gros, je vais suivre la route 132 qui longe le fleuve. Je tenterai de demeurer le plus près possible du fleuve en évitant, évidemment, les autoroutes. Je devrai donc trouver des chemins de traverse par endroits. Où vais-je dormir? C’est une question ouverte pour l’instant. Je  découperai probablement ma course en trois étapes qui seraient à peu près l’équivalent des trois courses du Triple Crown que je voulais faire. J’essaierai donc de faire un premier segment de 330 kilomètres avec des micro-siestes. 

 

Je ferais ensuite une pause dans un motel pour quelques heures pour dormir un peu et me changer.  Je repartirais probablement pour une deuxième étape de 330 kilomètres. J’essaierais ensuite de dormir dans un vrai lit avant de terminer avec une dernière étape de 380 kilomètres pour arriver sur le Mont Royal. Ça me semble faisable, car j’ai fait cet exercice à l’entraînement, soit de courir l’équivalent de la distance en une semaine. Ça me donnait 56 kilomètres par jour et ça s’est super bien passé! Mais pour mon défi, je devrai courir 120 kilomètres par jour. 

 

Je suis curieux, de combien de temps as-tu besoin pour courir 330 kilomètres? 

 

Il y a beaucoup d’incertitude dans tout ça et c’est difficile à dire!  Lorsque je faisais mon entraînement de 56 kilomètres par jour pendant une semaine, je me levais à trois heures du matin et j’arrivais à la maison à peu près à temps pour le petit déjeuner et faire ensuite ma journée de travail. Ça me prenait donc cinq ou six heures. Ma référence la plus proche demeure lorsque j’ai couru entre à Québec et Montréal il y a cinq ans. J’avais fait 250 kilomètres en 31h30. 

 

As-tu jeté un coup d’œil au dénivelé de ton parcours de 1090 kilomètres?

 

J’ai fait le tracé dans Google Map et je crois que ce sera plat, plat, plat! Sauf bien sûr à la fin sur le Mont Royal où ça représente 250 mètres de dénivelé positif sur les cinq derniers kilomètres. 

 

Côté logistique, comment vas-tu procéder? Est-ce qu’une équipe d’accompagnateurs sera là? 

 

Pour l’instant, je pars seul. C’est beaucoup plus simple à organiser. Je cherche à être le plus autonome et indépendant possible. C’est un exercice de style qui, je l’avoue, n’est peut-être pas très intelligent, mais ça a le mérite d’être essayé. Je croiserai certainement des gens qui voudront courir quelques kilomètres avec moi. Ils sont les bienvenus! Sinon, il est important que je regarde bien où sont les hôtels et les dépanneurs pour pouvoir me ravitailler. 

 

Joan RochSi je suis accompagné, ça demeure une possibilité, je ferai comme lors de ma course entre Québec et Montréal. Il y avait une personne dans une voiture qui m’attendait à tous les dix ou quinze kilomètres pour me ravitailler. De toute façon, je sais que si j’ai le moindre problème je peux demander de l’aide avec mon cellulaire. 

 

Tu as mentionné que les gens qui le souhaitent pourront se joindre à toi pour courir quelques kilomètres?

 

Effectivement! L’idée est encore nouvelle, mais je vais commencer à lancer l’invitation. Je suppose que les gens qui habitent dans les endroits où je vais courir auront une meilleure idée des routes que je devrais emprunter. Ça peut être parce que la vue est plus belle ou parce qu’il y a moins de voitures. Je vais leur faire confiance et compter sur leurs connaissances du terrain. Je me suis loué une balise GPS qui diffusera à intervalles réguliers ma position. Il sera donc facile de me suivre et de planifier, pour ceux qui le souhaitent, de courir avec moi. 

 

Tu ne voulais pas perdre ta forme physique acquise pour la Triple Couronne, mais ce que tu essaieras de faire demeure un défi redoutable. 

 

Je voulais un défi qui m’intéresse personnellement et qui soit gros. Un défi que j’ai une chance de ne pas terminer. Je ne voulais pas que ce soit un défi plus classique ressemblant à quelque chose que j’avais déjà fait. Je veux des surprises et de l’inattendu. 

 

Quel sera le plus gros défi ou le plus gros piège lors de ton périple? 

 

Il y a tellement d’inconnu! Je n’ai jamais fait de courses aussi longues sur plusieurs jours. Je devrai gérer mes nuits de sommeil et mon alimentation de manière radicalement différente. Le fait que le parcours soit plat représente également un piège. Je ne pourrai pas marcher contrairement à un parcours montagneux où tu as une très bonne excuse pour marcher et récupérer. Je vais tout de même devoir marcher, mais ce n’est pas le terrain qui me forcera à le faire. 

 

D’autre part, la route est continuellement inclinée du même côté sur un millier de kilomètres ce qui pourrait me causer des problèmes. Je ne devrai donc pas oublier de changer de côté de route pour répartir l’asymétrie. Enfin, j’ignore à quoi ressemblera la météo. S’il fait hyper chaud, je devrai peut-être faire des siestes le jour et courir la nuit. S’il pleut, je devrai m’assurer que les vêtements ne m’irritent pas la peau. Dans le fond, je n’ai aucune idée de ce qui m’attend. Je terminerai peut-être en miettes ou en pleine forme. 

 

Tu es reconnu pour tes superbes photos prises lorsque tu cours. Tu en as fait l’objet d’un livre,  d’une exposition prochaine et tu travailles déjà sur un second bouquin. Profiteras-tu de ce périple pour prendre de nouvelles photos? 

 

Absolument! Je cherchais un défi sportif, mais également un projet photographique. Je veux prendre des photos et alimenter, lorsque mon état le permettra, mes médias sociaux. Les plus belles de ces photos se retrouveront dans mon deuxième livre. Je n’ai aucun doute que ce sera magnifique sur le bord du fleuve. 

 

Dans ton impressionnant palmarès de courses où apparaîtra ce défi lorsqu’il sera complété? Tout en haut? 

 

Oui! C’est une expérience que je voulais vivre, une course de plusieurs jours sur des centaines et des centaines de kilomètres en m’attendant à ne peut-être pas y arriver. C’est très réaliste de penser comme ça, car c’est un défi énorme et, si je ne réussis pas, je veux vivre cet échec puisque j’apprendrais des choses. Lorsque tout va bien, c’est plus ennuyeux! 

 

Honnêtement, je ne croyais pas le faire cette année ce défi. J’avais plus dans l’idée de terminer les trois longues courses de la Triple Couronne. Mais mon entraînement est à point, j’avais du temps libre de prévu et je me sens en forme comme jamais alors j’ai décidé de me lancer! Si je réussis à terminer, ça ouvrira la porte sur autre chose. Percé-Montréal