Par Mario J. Ramos - Après le succès de Outlast, le développeur québécois Red Barrels récidive avec Outlast 2, depuis peu disponible sur Nintendo Switch, après sa sortie sur PC et toutes les consoles de génération courante. Je me suis entretenu avec Philippe Morin, co-fondateur et designer de Red Barrels.

 

En lançant Red Barrels, est-ce que c’était dès le départ dans les plans d’explorer le thème de l’horreur dans vos jeux?

 

En janvier 2011, on a fait une liste de toutes les idées qui nous intéressaient et le thème de l’horreur est rapidement devenu le choix évident.  On cherchait quelque chose qui serait un nouveau challenge, mais qui en même temps tirerait profit de l’expérience acquise sur nos jeux précédents, principalement des jeux action-aventure (Splinter Cell, Prince of Persia : the sands of time, Army of Two, Assassin’s Creed et Uncharted).

 

 

De plus, on s’est rendu compte que le marché était en manque de ce type de jeux. Les grosses boites ayant abandonné le genre, i.e. l’horreur pure, ça laissait le champ libre à de petits studios comme nous.

 

Donc, tout concordait.  Avec l’horreur, on avait un type de jeu qui nous stimulait, tout en ayant confiance de pouvoir bien le faire.  Et financièrement, le choix était viable.

 

Au moment que des grosses franchises du survival horror, comme Resident Evil, devenaient davantage des jeux d’action, les indies, dont Outlast et la série Amnesia, retournaient aux sources de l’horreur en enlevant le combat de l’équation. Au moment de faire ce choix de design pour le premier Outlast, voyez-vous ça comme un risque commercial? Êtes-vous surpris du succès de la série?

 

Comme on a fait le premier Outlast avec une équipe de 10 personnes, il était primordial d’être intelligent dans nos choix.  On souhaitait que le jeu se concentre avant tout sur la peur et le sentiment d’impuissance.  En plus, ça nous simplifiait la tâche puisque faire un système de combat représente une grosse charge de travail. 

 

 

En mars 2013, lorsque nous avons présenté le jeu à PAX East, Boston, on en a profité pour faire un sondage auprès des joueurs qui faisaient la file pour jouer à Outlast et le consensus était qu’ils ne voulaient pas de combat. On a donc décidé de s’en tenir à cette philosophie.

 

C’est sûr qu’il y aura toujours une proportion de joueurs qui souhaiteraient pouvoir attaquer les antagonistes, mais en 2012 c’était la meilleure décision pour le jeu et nous. Comme environ 15 millions de joueurs ont téléchargé le jeu à ce jour, le choix semble être apprécié. Honnêtement, on ne pensait jamais en vendre autant et surtout pendant aussi une aussi longue période, car le jeu se vend encore très bien.

 

Dans Outlast 2, et même dans le premier dans une moindre mesure, on mélange les thèmes de la religion et de l’horreur. Qu’est-ce qui a inspiré ce choix narratif?

 

Probablement notre bagage catholique québécois. ;)

 

 

Les 2 jeux traitent d’abus de pouvoir et de manipulations, que ce soit par le truchement de la religion, de la science ou de l’argent.  On aborde simplement les thèmes qui nous intéressent et qui semblent propices pour créer un bon contexte de jeu d’horreur.

 

Quel genre de recherches vous avez fait sur les cultes religieux et quels sont les thèmes que vous cherchez à explorer avec ce sujet?

 

On a beaucoup lu et vu des documentaires sur Jonestown. (https://www.youtube.com/watch?v=9czb6OO5eB0) Aussi, l’ordre du Temple Solaire et les événements de Waco.  On a évidemment pigé dans la bible à propos de l’apocalypse et la venue de l’antéchrist.  Notre secte est beaucoup inspirée du livre d’Ézéchiel.

 

 

Pour les hérétiques, on s’est beaucoup inspiré du travail d’Olivier de Sagazan (https://www.youtube.com/watch?v=6gYBXRwsDjY&t=84s).  On ne voulait pas que nos hérétiques soient des adeptes classiques de satanisme.  On souhaitait plutôt qu’ils soient déshumanisés.

 

Que nous réserve Red Barrels dans l’avenir? Outlast 3? Un autre jeu d’horreur? Quelque chose de complètement différent?

 

On travaille présentement sur un projet qui fera parti de la marque Outlast, mais qui n’est pas Outlast 3.  On reste dans l’horreur, mais ça sera une expérience différente.  On est en phase de prototypage, donc on a encore beaucoup de travail devant nous.  Encore une fois, on a décidé de prendre un certain risque en faisant quelque chose de nouveau, mais qui tire profit de l’expertise acquise sur les jeux Outlast.