Me voici de retour, quelques jours après notre premier revers de la saison. Ne vous inquiétez surtout pas pour mon moral! J'ai ruminé pendant toute la saison morte notre défaite en finale de la coupe Grey, je ne bouderai certainement pas pendant des jours pour UNE défaite en saison régulière.

C'est certain que comme compétiteur, comme tout athlète professionnel, je suis rendu où je suis en voulant gagner dans tout ce que je fais. Je suis une personne très compétitive et je ne m'en cache pas, ça écoeure une défaite comme celle que nous ont infligée les Eskimos. Mais il faut passer par-dessus et quand on pense que c'est notre première en cinq matchs, on se dit qu'il ne faut pas commencer à paniquer avec ça!

Au cours des derniers jours, certains ont analysé notre défaite en disant que les Eskimos, désireux de venger l'affront qu'on leur avait fait subir lors de leur visite à Montréal, ont joué un match sans faille et que leur exécution presque parfaite leur a permis de nous dominer. D'autres ont surtout remarqué la façon dont on a réagi et noté qu'on n'avait vraiment pas offert notre meilleur effort.

Moi, je dirais qu'il y un fond de vérité dans ces deux constats.

J'ignore jusqu'à quel point l'esprit de vengeance a joué un rôle dans la performance des Eskimos. Je n'étais pas dans leur vestiaire et je ne peux pas savoir s'ils se sont servis de la raclée que nous leur avions servie trois semaines plus tôt pour se motiver. Ce que je sais, c'est que tout le monde a sa fierté et quand tu te fais planter, tu ne veux pas que ça arrive une deuxième fois.

Reste que c'est vrai que les Eskimos ont très bien joué. Ricky Ray était au sommet de sa forme, les unités spéciales et leur défensive ont été solides et leur plan de match était bien étoffé.

De notre côté, on n'a tout simplement pas fait ce qu'on avait à faire. On a accordé cinq ou six jeux de 25 verges ou plus, le genre de longs gains qu'on se faisait justement une fierté d'éliminer en tant que brigade défensive. La logique veut que quand tu évites d'accorder ces longs jeux, tu es capable de limiter les dégâts parce que tu forces l'adversaire à en faire beaucoup plus pour traverser le terrain. Mais les Eskimos, en découpant notre défensive comme personne n'était encore parvenu à le faire, ont réussi à contrôler la partie. Et comme ils ont souvent pris possession du ballon en position avantageuse sur le terrain, on dirait que chaque séquence ponctuée par un long jeu se terminait par un touché.

Une grande partie du blâme nous revient pour nos largesses, mais il faut aussi donner le crédit aux Eskimos. Prenons par exemple le premier touché de Fred Stamps. La couverture de Chip Cox était excellente sur le jeu, mais la passe de Ray était parfaite et le receveur était où il devait être au bon moment et a réussi à mettre les deux mains sur le ballon.

Pour nous, ça faisait une cinquième défaite à nos six dernières visites à Edmonton. La statistique est facile à ressortir, mais c'est beaucoup moins simple d'y associer un raisonnement logique. J'ignore pourquoi on a davantage de difficulté au Commonwealth Stadium. Pourtant, la foule là-bas n'est pas particulièrement hostile, ça ne se compare pas à Regina. Je me demande si on ne devrait pas partir un peu plus tôt pour s'acclimater au décalage horaire... Je ne sais pas.

Au diable la saison parfaite!

Après la rencontre, j'ai peut-être surpris quelques-uns d'entre vous en disant que j'avais eu l'impression qu'on était sortis sans intensité, sans passion. Mais je le pense toujours aujourd'hui, même si je ne sais pas comment l'expliquer. Ce n'est pas la première fois qu'on voit une équipe commettre un faux départ, c'est une réalité du sport.

Pourtant, comme je l'ai déjà mentionné, on avait connu une très bonne semaine à l'entraînement. Même dans le réchauffement d'avant-match, je ne peux pas dire que j'étais envahi par un mauvais pressentiment, tout était normal. Mais dès que la partie a commencé, on s'est fait frapper quelques fois solidement et c'est comme si ça nous avait endormis au lieu de nous réveiller. À partir de ce moment, on a baissé les bras sans réagir.

Toutefois, je considère qu'on a réellement une vraie équipe de professionnels cette année. Les gars sont tous à leur affaire, ils continuent d'étudier et de travailler aussi fort que lorsqu'ils se battaient pour un poste au camp d'entraînement. Ça me rassure et je ne suis pas, mais pas du tout inquiété par cette défaite. Même que tant qu'à l'avoir subie, je préfère en retirer les aspects positifs.

Effectivement, en revenant d'Edmonton avec une défaite dans nos bagages, on a au moins mis un terme à toutes les discussions plutôt farfelues qu'on avait commencé à entendre sur nos chances de connaître une saison parfaite.

Premièrement, je dois vous assurer que parmi mes coéquipiers, je n'ai senti personne s'égarer et commencer à penser qu'on était trop forts pour le reste de la Ligue. Hey! On n'avait joué que quatre matchs sur 18! Si vous m'aviez demandé au début de la saison si je pensais qu'on pouvait être invaincus cette année, je vous aurais traité de fous!

C'est comme ça la Ligue canadienne. Il existe une bonne parité, n'importe qui peut battre n'importe qui et je crois que c'est ce qui fait sa force. Hamilton a connu des années difficiles, Toronto a un peu plus de problèmes dernièrement, mais quand même, ces équipes ont beaucoup de joueurs talentueux et peuvent causer des surprises à tout moment.

Tout ça pour dire que la saison parfaite, on aurait peut-être commencé à y penser après dix ou douze matchs, mais après quatre... pas du tout!

Mais en même, je comprends les partisans de s'être mis à rêver, même aussi tôt. Il y a une magie dans le sport. Il y a tellement d'accomplissements, de beaux moments qui sont vécus, on a le goût de les vivre, de les voir, d'en faire partie. Une saison parfaite, tout le monde aimerait en faire partie et ça fait jaser... Mais en réalité, disons c'est assez difficile à réaliser!

Les Argos : une bombe à retardement

C'est probablement une équipe qui se cherche un peu qui se pointera à Montréal pour notre prochain match vendredi. En attaque, les Argonauts comptent sur plusieurs nouveaux receveurs, des gars qui sont fraîchement arrivés dans un nouveau système et qui cherchent encore à l'assimiler. Il y a aussi eu toute l'attention médiatique apportée par Arland Bruce III en début de saison.

Les Argos doivent également évoluer avec un nouveau personnel d'entraîneurs dont les grands penseurs, comme le nôtre et celui des Stampeders de Calgary, sont issus de la NFL. On peut dire que la barre était haute puisqu'à leur première année au Canada, Marc Trestman et John Hufnagel ont mené leur équipe respective à la finale de la coupe Grey. La pression doit être énorme à Toronto.

Suis-je surpris du début de saison en dents de scie des Argos? Bonne question... Les Argos sont une équipe qui compte sur beaucoup d'excellents athlètes, ce qui fait qu'ils sont susceptibles de connaître un gros match à tout moment. Mais quand la cohésion fait défaut parmi tout ce beau monde, le temps peut être long.

De toute façon, de notre côté, il ne fait pas se préoccuper de l'identité de nos adversaires. L'important, c'est de jouer à notre niveau et ne pas se laisser entraîner dans le style de l'équipe en face de nous. On a l'impression que c'est l'erreur qu'on a faite à notre dernier match. Coach Trestman parle toujours d'un standard de performance. On en a établi un au début de la saison et il faut toujours le maintenir.

Voyons ce que ça va donner vendredi. On s'en reparle!


*Propos recueillis par Nicolas Landry