ATHENES (AFP) - Nouveau roi du sprint après sa victoire sur le 100 m des Jeux olympiques d'Athènes, l'Américain Justin Gatlin, 22 ans, ambitionne de devenir le plus grand sprinteur de tous les temps après avoir surmonté une maladie de déficit de l'attention.

"Avant le coup de feu, je savais qu'il fallait rester concentré pour prendre un bon départ", raconte Gatlin, vainqueur en 9 sec 85/100 de la finale olympique la plus dense de l'histoire, après un excellent départ qui lui a permis de résiter sur le fil à ses adversaires.

Pourtant, la concentration a justement été le problème majeur de la vie de ce "bébé" de 1,85 m pour 83 kg, selon l'expression de sa mère Janette présente dimanche dans les tribunes du Stade olympique.

"Quand il était en CM1, la maîtresse a constaté qu'en plein milieu d'un contrôle, il pouvait se mettre à regarder les oiseaux et oublier son devoir. On a ensuite détecté qu'il souffrait d'ADD (Attention disorder deficit)", raconte son père Willie, 60 ans, ancien militaire aujourd'hui surveillant dans un lycée.

Hyperactif

Les parents se doutaient déjà que leur cadet de quatre enfants était un hyperactif.

"Quand j'étais jeune, il fallait que je me dépense: je montais sur la télévision, je sautais, je jouais à Jungle Jim dans la rue, je sautais au-dessus des bouches d'incendie...", explique Justin, qui a découvert l'athlétisme sur le tard, après avoir longtemps voulu jouer au football américain, sport qu'il n'a abandonné qu'après des mots avec l'entraîneur de l'équipe de Pensacola (Floride) où sa famille avait déménagé.

Il commence alors l'athlétisme vers 1998. Enchaînant 100 m, 200 m, relais et même les haies au sein d'une équipe du lycée où ne figurent que trois autres coureurs, il ramène le titre de l'Etat par équipes en 2000. Quelque mois plus tard, passé à l'université du Tennessee, il domine les Championnats universitaires.

"Je dédie ce titre à Jay Cormier, l'entraîneur (du lycée) qui a tout de suite vu que j'avais l'étoffe d'un champion du monde... Pardon, d'un champion olympique", dit-il.

La distraction de Gatlin lui joue le plus mauvais tour de sa carrière. En 2001, il est contrôlé positif en raison de produits qui se trouvent dans son médicament: Adderall.

"Coureur propre"

Suspendu début 2002 puis requalifié en juillet de la même année pour motifs médicaux, Gatlin n'a plus droit à son traitement mais jure: "Je suis un vrai coureur propre. Je travaille dur, je m'entraîne six heures par jour, à courir, à soulever des poids... Il y a des tragédies dans ce sport (à cause du dopage) mais moi je peux sortir sur la piste avec le sourire."

Curieusement, son entraîneur Trevor Graham, ancien mentor de Tim Montgomery et Marion Jones, a révélé lundi au Los Angeles Times qu'il était justement le coach anonyme qui avait transmis aux autorités la seringue contenant la THG, ce stéroïde synthétique à l'origine de l'affaire Balco...

En tout cas, si les pronostiqueurs avaient quelque peu oublié avant la finale du 100 m Gatlin, pourtant champion du monde en salle du 60 m en 2003 et multi-médaillé chez les juniors, lui ne se voyait pas comme un outsider.

"Je sors toujours en pensant que je suis le champion, sinon tu commences déjà à laisser ta part aux autres", raconte Gatlin, qui sera forcément un des favori du 200 m et membre d'un relais 4x100 m grandissime favori de l'épreuve.

"Je suis entré dans l'histoire ce soir, je suis déjà le meilleur de l'année, mais mon objectif c'est de devenir le plus grand de tous les temps."