AUGUSTA, Géorgie - Le tailleur devrait songer à ajuster le veston vert à la taille d'Augusta National. Parce qu'au fond, c'est le parcours qui mène le bal après trois rondes au Tournoi des Maîtres.

Des vents tourbillonnants, du temps froids et des verts glissants ont rendu la tâche pratiquement impossible aux golfeurs, qui ont peiné à chaque trou pour réussir la normale.

Une fois la troisième ronde complétée, Stuart Appleby a vu son nom occuper le premier rang du classement grâce à un cumulatif de 218, deux coups au-dessus de la normale. Il a joué 73, un au-dessus de la normale. Tiger Woods (72) et Justin Rose (75) n'étaient qu'à un coup de la tête.

Augusta National n'a jamais été aussi capricieux. C'est la première fois en 71 ans d'histoire de ce tournoi que le meneur après 54 trous se trouve au-dessus de la normale.

"Il fallait vraiment se battre", a noté Appleby.

Le score moyen de 77,35 le démontre d'ailleurs.

Appleby était pourtant en position de finir sous le par jusqu'à ce qu'il commette un triple boguey au 17e trou, une normale quatre. Il a été freiné par deux fosses de sable sur ce trou et a eu besoin de trois roulés, si bien qu'il se secouait la tête, incrédule, en route vers le 18e tertre de départ.

Reste qu'une normale pour compléter la ronde lui a permis d'occuper la tête du classement, alors que Rose a commis deux bogueys dans la dernière portion du parcours.

"Ecoutez, ce genre de choses arrive sur un terrain de golf, a dit Appleby de son triple boguey. C'est le golf. C'est Augusta.

"C'est un adversaire coriace."

Demandez-le aux Canadiens, ils seront sûrement d'accord.

Stephen Ames, de Calgary, qui a joué 77, et l'Ontarien Mike Weir, de Bright's Grove, avec un 80, ont chacun disputé leur pire ronde en carrière sur ce parcours. Ils étaient tous deux à neuf coups de la tête, à égalité au 34e rang.

Augusta National a été prolongé de plus de 500 verges au cours de la dernière décennie, mais c'est la première fois depuis que ces changements ont été effectués que le parcours est aussi ferme et rapide. Weir, vainqueur du Tournoi des Maîtres de 2003, n'aime pas ce qu'il voit cette année.

"Personnellement, je pense qu'ils sont en train de rater le bateau, a-t-il dit. Je pense que ce tournoi doit être excitant, il doit favoriser les rugissements de la foule.

"On n'entend pas de rugissements. Personne ne fait quoi que ce soit. On entend des applaudissements polis pour des normales. On est habitué à cela à l'Omnium des Etats-Unis, mais pas ici. Personnellement, je crois que c'est une erreur."

C'était d'ailleurs une journée ponctuée d'erreurs. Woods a complété sa ronde avec des bogueys à ses deux derniers trous - c'est la deuxième fois cette semaine que ça lui arrivait - et il semblait devoir se contenter d'un déficit de plusieurs coups lorsqu'il a remis sa carte.

Puis, ceux qui jouaient derrière lui ont commencé à commettre des bogueys.

"En toute sincérité, je n'ai même pas regardé le classement, a affirmé Woods, qui avait commencé la journée à égalité au 15e rang. Je faisais de mon mieux. Il y avait déjà suffisamment de choses dont je devais me préoccuper, avec le vent et les verts.

"Je pense que ç'a été une des rondes les plus difficiles que nous ayions jamais eu à jouer ici."

Et ce ne sera guère plus facile dimanche, alors que le Tigre se retrouvera en compagnie d'Appleby au sein du dernier groupe à prendre le départ.

"Il ne se rendra même pas compte que je suis là, a lancé Appleby en riant. Mais je suis certain que moi, je réaliserai qu'il est là."

Ce sera une situation que connaît bien Woods. Il s'est retrouvé au sein du dernier groupe pour chacune des 12 victoires qu'il a récoltées lors de tournois majeurs.

Pour mériter un cinquième veston vert, toutefois, il devra mettre fin à une mauvaise séquence. Woods n'a jamais remporté un tournoi majeur en venant de l'arrière.