C'est un jeu de mots, vous l'aurez compris, mais… Après quelques matchs passés sur la passerelle, Guillaume Latendresse et Ryan O'Byrne ont finalement obtenu la chance de montrer à leur entraîneur qu'ils ont compris ce qu'on attend d'eux et qu'ils sont prêts à faire ce qu'il faut pour améliorer leur situation et rendre l'équipe meilleure, chance qu'a obtenue Sergei Kostitsyn contre les Flames de Calgary.

Il peut être difficile de comprendre comment un jeune qui a connu du succès à ses premiers pas dans la Ligue nationale peut soudainement perdre sa touche magique. À l'inverse, on peut se demander pourquoi un joueur fraîchement arrivé des mineures peut connaître un départ canon comme c'est présentement le cas de Matt D'Agostini.

Il y a plusieurs façons d'interpréter ce genre de situation et je tenterai ici de vous expliquer pourquoi.

Quand tu arrives dans la Ligue nationale de hockey, c'est le rêve devenu réalité. Tout est excitant, tout est super beau, chaque endroit que tu visites est nouveau. Si le jeune a suffisamment de talent pour rivaliser et jouer avec les meilleurs, il va connaître du succès parce que puisqu'il n'y aucun standard d'établi, les attentes sont généralement basses et la pression est inexistante. La recrue joue avec une certaine naïveté qui l'amènera à bien jouer parce que dans sa tête, il ne fait que jouer au hockey. Il ne pense pas vraiment aux conséquences, il ne réalise pas complètement ce qui lui arrive.

Pensez à Forrest Gump quand il a commencé à jouer au football : il ne se cassait pas la tête, il ne faisait que courir le plus vite possible. C'est la même chose!

Sauf qu'à un certain moment donné, l'euphorie diminue et la réalité te rattrape. Arrivent ainsi l'évaluation des entraîneurs et les attentes des observateurs. Tu deviens catalogué, catégorisé et les gens vont s'attendre à une progression. C'est une étape presque inévitable à laquelle la grande majorité des joueurs professionnels ont dû ou devront faire face. Quand tout le monde a fini de te dire à quel point tu es bon et que tu es beau, quand tu t'habitues à la gloire qui vient avec ton métier et à ton chèque qui rentre aux deux semaines, la poussière retombe et tu passes à travers un passage à vide.

La grande question, c'est de savoir combien de temps ce passage à vide va durer. Je dis toujours que l'important n'est pas la façon dont tu débutes ta carrière dans la LNH, mais ta capacité à t'améliorer et à grandir dans ce milieu. En d'autres mots, ta carrière ne commence pas nécessairement à ton premier match. Elle commence une fois que tout l'aspect « nouveauté » est passé.

À partir de ce moment, ta carrière peut prendre deux branches différentes. Il y a ceux qui réussiront à s'établir - parce qu'ils auront été capables de prendre les hauts et les bas de leur première expérience et de s'améliorer, de prendre leur place et de répondre aux attentes - et les autres qui vont sombrer dans l'oubli et être remplacé par le prochain qui attend sa chance.

L'un des plus beaux exemples de noms qu'on peut retrouver dans cette dernière catégorie, c'est l'ancien gardien Jim Carey. On pourrait aussi inclure un gars comme Andrew Raycroft. Si on prenait le temps de s'asseoir ensemble et de répertorier les joueurs qui n'ont pu sortir du passage à vide, on en trouverait certainement des centaines et des centaines.

À l'inverse, un joueur dont le cheminement illustre parfaitement celui d'un gars qui a compris ce qu'il avait à faire et qui a su éliminer les pensées négatives de sa tête, c'est Josh Gorges. À son arrivée, rappelez-vous, il était plus ordinaire, mais il a pris en note les messages qu'on lui a envoyés, il est retourné à la table à dessin et regardez où il est cette année.

Vous savez, jouer un match dans la LNH, c'est pas pire. Mais jouer pendant 15 ans c'est une toute autre paire de manches.

Dehors, les distractions!

Les trois jeunes joueurs du Canadien mentionnés en introduction sont, quant à moi, dans le même bateau. Ils vivent le genre de passage à vide auquel je viens de faire référence. Ils n'ont pas moins d'aptitudes que l'an passé! Leur problème est 100% entre les deux oreilles et à un certain niveau, c'est normal.

Quand vont-ils s'en sortir? Quand ils vont mettre toutes les distractions, toutes les informations inutiles et négatives de côté. Là, il auront finalement compris.

Compris que le petit creux de vague qu'ils connaissent, ce n'est pas la faute de leurs entraîneurs, ce n'est pas la faute de leurs parents, ce n'est pas la faute de leur agent, ce n'est pas la faute de leur équipement. C'est au joueur de prendre conscience qu'il ne mérite peut-être pas de jouer. Je ne dit pas que ces trois jeunes joueurs blâment tout le monde, car je ne suis pas là, mais parfois dans le cas de jeunes joueurs, ça peut arriver inconsciemment.

La première chose à faire, c'est de réaliser que le joueur lui-même est responsable de son jeu et il doit retourner a la base : JOUER AU HOCKEY!!!! Le joueur doit bloquer parents, amis et même journalistes qui peuvent mettre sans malice des idées dans sa tête. Le but de tout ca, c'est de ne pas tomber dans le panneau de trouver des excuses pour nos contre-performances. Facile à dire, mais pas toujours facile a faire!

Parce qu'on les aime et qu'ils sont jeunes, nous voulons les aider. C'est facile de leur trouver des excuses, mais personne ne peut aller tenir le bâton à leur place. Après tout, ça demeure du hockey, rien de plus.

Au hockey, toute est une question d'attitude. Pensez-vous vraiment que les 700 joueurs de la LNH sont les 700 joueurs les plus talentueux au monde? Voyons donc! Les gars qui font carrière dans la LNH, ce sont ceux qui ont compris que c'est une jungle et qu'il n'y a personne d'autre que toi en général pour t aider. C'est à toi de décider si tu vas céder ta place au moindre petit contretemps.

Et finalement, il faut réaliser que malgré toute leur bonne volonté, certains ne survivront pas à la jungle. Et vous savez quoi? Il n'y a rien de mal là-dedans. Dans la vie, que ce soit dans n'importe quel domaine, n'importe quelle business, il y en a pour qui ça va marcher et d'autre pas.

Sans vouloir prêcher pour ma paroisse, le travail qu'on demande d'accomplir aux jeunes joueurs professionnels n'est pas facile. Si ce l'était, tout le monde qui lit ces lignes pourrait le faire à leur place. Vous aimez peut-être beaucoup votre métier, mais vous ne prendriez pas la place de Sergei Kostitsyn si vous étiez capable de le faire demain matin? Je suis convaincu que oui, sauf que ce n'est pas comme ça que ça fonctionne.

Pensez-y : les 700 meilleurs joueurs au monde, AU MONDE, jouent dans la LNH. Si vous ne les trouvez pas bons, vous avez peut-être raison, mais ils sont quand même les 700 meilleurs!

*Propos recueillis par Nicolas Landry.