Levez la main si vous avez trouvé le Canadien bien trop généreux lorsqu’il a accepté de donner deux choix de deuxième ronde – dont l’un est devenu Alex DeBrincat qui flirte avec le plateau des 40 buts et qui a fracassé la barre des 70 points cette année – aux Blackhawks de Chicago le 24 juin 2016 pour faire l’acquisition d’Andrew Shaw.

Levez la main si vous avez trouvé que Marc Bergevin s’est montré bien trop généreux lorsqu’il a consenti un contrat de 23,4 millions $ répartis sur six ans qui assure un salaire moyen de 3,9 millions $ jusqu’à la fin de la saison 2022 à ce joueur de soutien.

Levez la main si vous avez cru tout l’été que le cocktail néfaste de blessures et commotions cérébrales servi à Shaw l’an dernier l’empêcherait de remplir son rôle d’agitateur et minerait ses chances d’assumer un rôle de leader au sein de l’équipe.

Levez la main si vous avez même cru que sa carrière pourrait être compromise.

Parce que j’ai levé la main en guise d’approbation à chacune de ces questions, le nom de Shaw s’est écrit de lui-même lorsqu’on m’a demandé d’inscrire le nom du candidat du Canadien dans la course au trophée Bill Masterton.

Le trophée remis annuellement par les journalistes de la presse écrite affectés à la couverture des 31 équipes de la LNH au joueur qui a affiché la plus grande détermination et la plus grande passion à l’endroit de son sport.

Shaw ayant été élu de manière plus que convaincante, j’imagine que d’autres collègues comme de nombreux amateurs avaient aussi levé la main en guise de réponse à plusieurs des questions posées plus haut.

Meilleure saison en carrière

Mais attention! Ce n’est pas pour effacer des remords de conscience que j’ai voté pour Shaw.

Pas du tout!

C’est parce qu’il m’a forcé la main en surmontant les doutes et balayé du revers de la main les conséquences néfastes des blessures et des commotions qu’il a encaissées au fil de ses trois premières saisons avec le Canadien.

Shaw disputera son 500e match en carrière ce soir à Columbus. Son 179e dans l’uniforme du Canadien.

Il a besoin de deux buts pour égaler son sommet personnel de 20 en une saison dans la LNH. Chaque point qu’il ajoutera aux 42 actuellement à sa fiche d’ici la fin de la saison améliorera son record personnel qui était de 39.

Mais voilà! Ces 20 buts et 39 points, Shaw les a marqués en 2013-2014 alors qu’il a disputé 80 des 82 matchs des Blackhawks. S’il dispute les cinq dernières parties de la saison, Shaw aura joué 63 matchs seulement cette année.

Ce qui mousse davantage la qualité de sa saison.

« Cette nomination représente un bel honneur », a répondu Andrew Shaw qui a rencontré les journalistes qui l’ont élu à son arrivée à Columbus mercredi.

Un honneur qui couronne la persévérance affichée par le vétéran qui aura 28 ans en juillet au fil des dernières saisons.

« Il y a beaucoup de millage dans ce corps : les commotions, mon opération au genou, ma blessure au cou. J’ai connu une saison difficile l’an dernier en disputant seulement la moitié des matchs. J’ai ensuite été inactif pendant neuf mois en raison de la blessure au genou. Malgré tout, j’avais comme objectif d’être de la formation pour le tout premier match de la saison. »

Premier match rassurant

Shaw a pris les moyens pour être de ce premier match. Il s’est astreint à un entraînement rigoureux passant près de trois heures par jours – cinq jours semaines – dans le gym en plus de respecter toutes les consignes des médecins.

Et lors de cette première disputée à Toronto le 3 octobre dernier – le Canadien a encaissé un revers de 3-2 en prolongation – Shaw a enfilé un but sur les trois tirs dirigés au cours de la rencontre.

« J’étais en retard sur tout le monde. Je n’avais pas disputé de matchs préparatoires. Je ne m’étais pas entraîné avec l’équipe. Mais les entraîneurs avaient assez confiance en moi pour me faire confiance. Je ne voulais pas les laisser tomber. Je ne voulais pas me laisser tomber, laisser tomber ma famille ou les partisans. Ça m’a incité à pousser plus fort », a reconnu Shaw qui a aussi convenu avoir composé avec des doutes au fil des mois qui ont précédé son retour au jeu.

« Il y a toujours des moments au cours desquels tu peux douter. Comme athlète et hockeyeur, je suis fort mentalement. Je me pousse toujours à la limite. Mais je ne peux prendre seul le crédit de mon retour. Je dois remercier ma famille, mon épouse avec qui il a eu son premier enfant – la petite Andy aura bientôt 10 mois – mes coéquipiers et toute l’organisation. Ils ont tout fait pour m’aider. »

Au fait, combien de commotions cérébrales Shaw a-t-il encaissées au fil de sa carrière?

« Je ne sais pas exactement. Dans la LNH, c’est trois ou quatre parce qu’elles sont répertoriées. Tu ne veux pas subir de commotions. Tu y penses constamment. Tu dis que tu ne pourrais peut-être plus jamais jouer au hockey. J’ai consulté plusieurs spécialistes. Je voulais m’assurer qu’il n’y avait pas de danger. J’ai posé les bonnes questions, j’ai été rassuré. Le fait d’avoir été blessé au genou lors de ma dernière commotion – difficile d’oublier les images de Shaw s’écroulant lourdement sur la patinoire alors qu’il venait de mettre en échec Greg Pateryn alors avec les Stars de Dallas – m’a aidé. J’étais obligé de m’éloigner du hockey après l’opération au genou. Cette période d’inaction m’a aussi permis de soigner ma tête. »

L’amour du hockey

Les coups durs encaissés par le biais des blessures, les coups sournois associés aux commotions, les coups bas et les coups tout court parce qu’il en a reçu et en a donné beaucoup au cours de sa carrière, Shaw a su les éponger en raison de l’amour qu’il voue au hockey.

« J’ai toujours joué et je joue encore par amour pour le hockey. Je veux simplement faire partie d’une équipe. Me faire des amis au passage. J’ai toujours affiché le même style et joué de la même façon. C’était la seule façon pour moi d’avoir du succès. Je n’ai jamais reculé devant le jeu rude. Ça me permettait de me différencier des autres. Tu ne peux pas composer une équipe avec des joueurs qui sont tous semblables. Tu as besoin de caractères différents, d’habiletés différentes. J’ai vite réalisé que j’avais des aptitudes différentes et j’ai toujours continué ainsi », a expliqué Shaw qui accueille à bras ouverts son 500e match en carrière.

« Je suis pas mal enthousiaste, mais j’aurais atteint ce chiffre bien avant, n’eût été blessures », a-t-il souligné. Avec raison.

Depuis son arrivée dans la LNH, Shaw n’a disputé qu’une seule fois tous les matchs de son équipe. C’était en 2012-2013 lors de la saison écourtée à 48 parties en raison d’un lock-out.

En trois saisons à Montréal, Shaw a raté un peu plus du quart des parties du Tricolore : 63 sur les 241 disputées.

Malgré tout, le vétéran assure avoir toujours envisagé de se rendre à cette 500e partie lorsqu’il a été repêché en cinquième ronde (139e sélection) par les Blackhawks de Chicago en 2011 avec qui il a gagné deux coupes Stanley.

« J’ai toujours cru en moi. J’ai toujours travaillé plus fort que la plupart des joueurs. Surtout dans les rangs juniors. Je savais que j’avais de la hargne, que j’étais un gagnant et que je pouvais aider une équipe à gagner. Pas toujours avec des buts ou des passes, mais toujours en jouant de la bonne façon et en étant constant. »

Des nombreux objectifs que s’est fixés Shaw, celui de permettre à sa fille de garder des souvenirs de son père évoluant dans la LNH est haut perché sur la liste. « J’ai connu une année formidable. Le travail me rapporte. Ce n’est jamais facile et je sais qu’il y aura d’autres embûches sur mon chemin. Mais ceux qui s’en sortent sont les plus forts. Je veux qu’Andy me vois évoluer dans la LNH. Ça veut donc dire que je dois jouer encore au moins quatre ans. »

Shaw succède à Antti Niemi qui était le candidat du Canadien l’an dernier.

C’est Brian Boyle des Devils du New Jersey a reçu le Bill Masterton l’an dernier.

Chez le Canadien, Claude Provost a reçu le trophée en 1968 lors de sa création. Henri Richard, Serge Savard, Saku Koivu et Max Pacioretty sont les autres porte-couleurs du Tricolore à l’avoir remporté.