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MONTRÉAL - Si le revers de dimanche aux mains des Sénateurs a fait mal au Canadien, celui de mardi a fait plus mal encore.

Juste à voir les visages sévères qu’arboraient Brendan Gallagher et le capitaine Shea Weber, il était clair que la défaite ne passait pas. Juste à entendre les réponses qu’ils défilaient en serrant les mâchoires, il était tout aussi clair que le point prime obtenu dans le cadre du revers de 5-4 encaissé en tirs de barrage n’apaisait pas le moindrement la douleur d’avoir encore perdu. Juste à voir la mine dépitée de l’entraîneur-chef Claude Julien, il était évident que le poids des points perdus ici, échappés là, gaspillés là-bas commence à être lourd à porter.

Cette défaite a fait tellement mal que la douleur doit être encore persistante ce matin tant les plaies sont nombreuses et vives.

À commencer par le but refusé.

La Ligue a-t-elle eu raison de refuser le but qui semblait pourtant avoir donné la victoire au Canadien avec moins de trois secondes à écouler en troisième période?

Parce qu’elle a le mot final, la Ligue a toujours raison.

Mais dans ce cas-ci, je n’arrive pas à comprendre l’application du règlement qui a mené au refus du but marqué par Brendan Gallagher en raison de l’obstruction dont il s’est rendu coupable à l’endroit du gardien Matt Murray.

Quelques précisions avant de commencer :

Les arbitres ne sont pas à blâmer. De un : ils ont accordé le but. De deux : ils n’ont rien à voir dans les décisions finales qui sont prises dans la salle de contrôle située dans les bureaux de la LNH à Toronto.

Deuxièmement, les Sénateurs n’ont pas eu à contester le but de Gallagher. Car tous les buts marqués au cours de la dernière minute de la troisième période ou durant la prolongation sont analysés par les responsables de Toronto qui vérifient un à un tous les critères possibles de contestation.

Lorsqu’ils ont analysé les reprises, les responsables de Toronto ont vu, comme vous, comme moi, que Brendan Gallagher est entré en contact avec le gardien des Sénateurs. C’est évident. Comme il est tout aussi évident que ce contact est attribuable à Gallagher.

C’est ensuite que l’analyse de la LNH diffère de la mienne, de celle du Canadien au grand complet sans oublier ses partisans qui ont tout aussi mal que leurs favoris encore ce matin et qui sont aphones tant ils crient à l’injustice – et certains au complot – depuis la fin du match.

Après l’impact avec Gallagher, le gardien des Sénateurs effectue un tour complet sur lui-même en partant de sa gauche pour revenir sur sa droite. Pendant ce temps, je joueur du Canadien glisse à l’extérieur du demi-cercle, se relève, va prendre position dans l’enclave où, quelques secondes plus tard, il fait dévier un tir de Ben Chiarot que Matt Murray ne peut stopper.

La Ligue, s’appuyant sur la règle 69,1, insiste sur le fait que Gallagher a empêché Matt Murray de se déplacer librement devant son filet et d’ainsi pouvoir protéger sa cage.

Si la rondelle avait déjoué Murray pendant qu’il effectuait sa vrille ou au moment où il l’a complétée, j’aurais accepté le verdict de la Ligue.

Mais dans ce cas-ci, Murray a eu le temps nécessaire pour retrouver son équilibre, localiser la rondelle, bien s’installer et tenter d’effectuer l’arrêt. Il ne l’a pas fait, j’en conviens. Il semblait perdu, semblait en déséquilibre, semblait chercher la rondelle. Mais cela n’était pas, du moins à mes yeux, attribuable seulement à Gallagher puisque Murray avait eu le temps de se replacer convenablement.

Mais bon! Le verdict, c’est la ligue qui le rend. Et ce verdict, il est final et sans appel.

Arrêts fumants, buts désolants

La performance de Carey Price devant la cage du Canadien a aussi fait mal au Canadien... et à de nombreux partisans.

Comme ses coéquipiers, Price a été capable du meilleur comme du pire dans cette deuxième défaite de suite, et troisième en quatre affrontements, aux mains des Sénateurs.

Sur les 35 arrêts effectués lors des 60 minutes réglementaires et des cinq minutes de la prolongation endiablée disputée par les équipes, Price a été brillant rien de moins à quelques occasions. Trois fois il s’est dressé devant Tim Stützle à qui il a volé un, peut-être, deux buts. Deux fois, il a réalisé des arrêts cruciaux devant Colin White qu’il a stoppé en échappée et devant qui il s’est imposé pour maintenir l’avance de 4-3 de Tyler Toffoli venait de donner au Canadien. Price a ajouté des arrêts moins spectaculaires, mais tout aussi importants de la première à la 65e minute de jeu.

L’ennui, et il est de taille, c’est qu’il a aussi offert des cadeaux aux Sénateurs.

On ne peut rien reprocher à Price sur le premier but. Drake Batherson s’est retrouvé devant lui après les erreurs combinées de Brett Kulak qui a décidé d’aller remplacer Alexander Romanov sur le côté droit de la zone défensive, alors que Jesperi Kotkaniemi se laissait glisser au lieu de se replier.

Sur le deuxième, Brady Tkachuk s’est retrouvé fin seul dans l’enclave pendant une attaque massive des «Sens». Mais Price ne pouvait laisser la rondelle filer sous son bras comme il l’a fait. Sans dire qu’il s’agissait d’un mauvais but, il est permis de lancer que c’est le genre de but qu’un gardien qui est considéré comme l’un des meilleurs de la Ligue ne doit pas accorder.

Le troisième est un sapin! Rien de moins.

Erik Brannstrom qui a marqué son premier en carrière à son 40e match dans la LNH a déjoué Price d’un tir anodin de la pointe qui s’est faufilé entre les jambières du gardien du Canadien. Il y avait de l’action devant Price. Je veux bien. Mais là encore, un gardien de son envergure doit effectuer cet arrêt. Brannstrom a d’ailleurs reconnu «avoir été chanceux que la rondelle se retrouve dans le fond du filet» lorsqu’on lui a demandé de commenter son premier but en carrière.

Même chose sur le deuxième but du match de Brady Tkachuk. Le but qui a envoyé les deux clubs en prolongation.

Price a cru que Tkachuk allait passer dans l’enclave! Il s’est fait déjouer par un revers qui est toujours la bête noire des gardiens!

Ces excuses ne tiennent pas. Là encore, un gardien comme Carey Price ne peut se faire déjouer de la sorte.

Pas question ici d’enlever à Tkachuk et Brannstrom le mérite qui leur revient. Le fougueux attaquant et le défenseur prometteur des Sénateurs ont fait ce qu’ils avaient à faire sur ces jeux.

Mais Carey Price n’a pas fait sa part.

En tirs de barrage, il est difficile de jeter le blâme sur un gardien. Mais il est clair que le facteur intimidation qui a souvent joué en faveur de Price au fil des dernières années est loin d’avoir miné Tim Stützle et Josh Norris. À leur tout premier tir de barrage dans la LNH, Stützle a déjoué Price entre les jambières alors que Norris s’est permis de défier sa mitaine.

« J’étais heureux d’y aller troisième. Ça m’a donné le temps de regarder Brady et Tim aller. Initialement, je voulais y aller entre les jambières, mais j’ai eu l’impression que Price anticipait ce tir. J’ai vu une ouverture du côté de la mitaine et j’ai pris la chance d’y aller sur son côté fort », a lancé la recrue des «Sens» dont le but assurait la victoire après que Corey Perry eut été stoppé par Matt Murray et que Jonathan Drouin eut frappé le poteau.

Le match de mardi est à l’image des performances du gardien du Canadien du Canadien depuis le début de l’année. Il est encore et toujours capable de réaliser des arrêts fumants de temps en temps. J’aimerais d’ailleurs le voir en réaliser plus souvent.

Inversement, il accorde aussi des buts désolants. Et malheureusement, il le fait trop souvent.

Est-ce inquiétant? Certainement un peu. Mais comme Price nous a habitués au fil des dernières années à des performances timides, parfois même décevantes, en début de saison avant de se redresser en cours de calendrier, on va attendre l’arrivée des jours meilleurs pour établir une analyse plus juste de ses performances.

Mais pour l’instant, elles sont clairement insuffisantes.

Tkachuk vs Kotkaniemi

Parce que le Canadien a préféré Jesperi Kotkaniemi à Brady Tkachuk lors du repêchage de 2018, les duels Canadien-Sénateurs ouvriront chaque fois la porte aux comparaisons entre les deux jeunes sélectionnés troisième et quatrième de leur cuvée derrière Rasmus Dahlin (Buffalo) et Andreï Svechnikov (Caroline).

Pour l’instant, ces comparaisons favorisent totalement Tkachuk. L’ailier des «Sens» a disputé 31 matchs de plus que Kotkaniemi (163 contre 132) mais affiche plus du double des buts de KK (51 contre 19) et des points récoltés par le centre du Canadien (104 contre 50). Au-delà les statistiques, Tkachuk s’impose davantage que Kotkaniemi dans toutes les facettes du jeu. Surtout sur le plan de l’implication physique alors que Tkachuk est déjà un homme contrairement à KK qui semble en voie de le devenir.

Les spécialistes du repêchage étaient unanimes il y a trois ans. Bien qu’ils refusaient de se lancer sur des projections à long terme, ils convenaient que Tkachuk était tout près de la LNH alors que KK en était encore loin.

Le temps leur donne raison.

La bouche couverte de sang, le sourire amputé de quelques dents, Brady Tkachuk savourait la victoire lorsqu’il s’est présenté devant les journalistes. Une victoire à laquelle il a grandement contribué avec ses deux buts, son combat qui l’a opposé à Ben Chiarot et l’avantage numérique de quatre minutes qu’il a offert à son équipe après avoir été atteint à la bouche par le bâton de Shea Weber alors qu’il bataillait sa place devant le filet de Carey Price.

« C’était un match de fou, mais nous en sortons récompensés. Les victoires des dernières semaines nous ont donné plus de maturité. Et c’est toujours plaisant d’affronter un rival comme le Canadien », a indiqué Tkachuk en convenant qu’il entretenait une relation amour-haine avec ses rivaux de Montréal.

Il est trop tôt pour dire qui de Tkachuk ou Kotkaniemi gagnera la guerre qu’ils sont condamnés à se livrer. Mais pour le moment, toutes les manches disputées jusqu’ici favorisent le jeune leader des Sénateurs qui a littéralement éclipsé KK encore hier soir.

Entre les lignes

- Le but refusé à Brendan Gallagher et les mauvais buts accordés par Carey Price ont fait mal au Canadien. C’est clair. Mais le Canadien a encore miné ses chances en écopant de vilaines pénalités – Kotkaniemi pour avoir donné de la bande à 200 pieds de son filet et Anderson pour une mise en échec alors que la première période venait de prendre fin – qui ont ouvert la porte à deux buts des Sénateurs...

-Victimes de deux buts en quatre occasions mardi, les spécialistes du désavantage numérique ont accordé cinq buts en 12 occasions lors des trois derniers matchs. Globalement, le Canadien a été victime de 17 buts lors des 72 désavantages écoulés jusqu’ici cette saison. Ils ont aussi accordé au moins un but à court d’un homme dans 11 des 18 matchs disputés cette année...

-L’attaque massive du Canadien a été encore bien passive mardi soir. Non seulement le Canadien a été blanchi en trois occasions, mais il n’a obtenu que deux tirs au but. À titre d’exemple, les Sénateurs ont marqué deux buts sur les 12 tirs décochés au cours de leurs quatre supériorités numériques : 11 fois à cinq contre quatre et une fois à cinq contre trois...

-Le Canadien a été blanchi en attaque massive à ses six derniers matchs (0 en 11 occasions) et il n’a marqué qu’une fois (1 en 22 occasions) à ses neuf dernières parties...

-Shea Weber a marqué ses troisième et quatrième buts de la saison, ses deux premiers à forces égales. Des neuf points qu’il affiche, Weber en a récolté six (2 buts, 4 passes) lors d’attaques massives...

-Parce que la défaite, le but refusé par la LNH et les hauts et les bas de Carey Price retiendront toute l’attention, ou presque, le 12e but de la saison de Tyler Toffoli, le 2e de Jonathan Drouin et les deux passes (7e et 8e) de Phillip Danault risquent de passer sous silence pas mal.

-Danault est toujours le seul attaquant du Canadien à être toujours en quête d’un premier but cette saison. Les défenseurs Victor Mete et Brett Kulak sont dans la même situation...

-Le Canadien a accordé plus de 35 tirs pour la quatrième fois de la saison mardi soir. La troisième fois contre les Sénateurs. Le Canadien a accordé 39 tirs aux Canucks dans une victoire de 5-3 le 2 février. Il a accordé 39 tirs lors de ses deux derniers matchs contre Ottawa – des défaites de 5-4 en tirs de barrage et de 3-2 en prolongation – et 35 tirs le 6 février lors de sa seule victoire (2-1) jusqu’ici cette saison aux dépens des Sénateurs…

-Avec une petite victoire à ses six derniers matchs (1-4-1-1), le Canadien met le cap sur Winnipeg où il affrontera les Jets jeudi et samedi…