MONTRÉAL - Le temps est aux récompenses chez le Canadien qui a signé une cinquième victoire de suite en battant les Sénateurs 2-1, samedi soir, à Ottawa.

 

L’entraîneur-chef Martin St-Louis a d’ailleurs lancé le mot récompense au même rythme que les joueurs des Maple Leafs et leurs adversaires des Red Wings échangeaient des buts à peu près au même moment à Detroit. Et comme les Leafs l’ont finalement emporté 10-7, ça vous donne une idée du nombre de fois que le mot récompense est sorti de la bouche du coach.

 

Bon! Avec la quantité de matchs affreux et de défaites qu’ils ont endurés depuis le début de la saison, les partisans du Canadien méritent pleinement ces cinq gains consécutifs et les performances beaucoup plus convaincantes offerts par leurs favoris en guise de récompense pour leur patience.

 

De fait, ils en mériteraient encore plusieurs simplement pour faire contrepoids aux désolantes sorties qui se sont multipliées avant l’arrivée de St-Louis.

 

Ce sont toutefois des joueurs qui méritaient pleinement d’être récompensés qui l’ont été samedi.

 

Premier en lice : Artturi Lehkonen

 

Ce plombier qui se défonce chaque fois qu’il saute sur la patinoire, peu importe qu’il évolue au sein d’un premier ou d’un quatrième trio, peu importe qu’il soit envoyé en avantage numérique ou appelé à « tuer » des pénalités, ce col bleu qui offre son plein rendement même si le poids de défaites est lourd à porter, même si le reste de l’équipe a décidé de lever le pied pour forcer un changement d’entraîneur, n’a pas été choyé par les Dieux du hockey en matière de qualité de mains.

 

ContentId(3.1402254):Canadiens : Artturi Lehkonen, bourreau des Sénateurs (L'Antichambre)
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Lehkonen a toujours comblé son manque à gagner en matière de talent par son travail acharné. Ce n’est pas pour rien qu’il est l’un des joueurs du Tricolore qui obtient le plus de bonnes occasions de marquer.

 

Eh bien, qu’il soit souvent l’objet de quolibets – je plaide coupable tout de go – en raison du nombre d’occasions qu’il gaspille, Lehkonen a marqué ses huitième et neuvième buts de la saison. C’est trois de moins seulement que Josh Anderson, qui domine le Canadien à ce chapitre. Anderson a disputé huit matchs de moins. Je veux bien. Mais Lehkonen accuse un recul de deux buts seulement derrière Nick Suzuki, qui a disputé tous les matchs de l’équipe cette saison, donc trois de moins que son jeune coéquipier qui est, en plus, bien plus talentueux.

Mieux encore, Lehkonen a récolté ses 21e et 22e points de la saison. Une récolte qui le hisse, pour l’instant, au deuxième rang des marqueurs du Canadien. Seul Nick Suzuki, avec neuf, compte plus de matchs de deux points et plus cette saison chez le Canadien que Lehkonen qui en affiche six. C’est deux de plus que Jonathan Drouin qui est troisième.

 

Je sais! On pourrait avancer, avec justesse, que ces deuxièmes places sont dénaturées par les blessures et les contre-performances qui ont miné les performances de plusieurs de ses coéquipiers jusqu’ici cette année.

 

Mais je tiens ici bien davantage à mettre en évidence les qualités de Lehkonen que les ennuis de ses coéquipiers. De mettre en relief le fait que les efforts du Finlandais sont récompensés.

 

C’était le premier match deux buts d’Artturi Lehkonen cette saison. Son premier depuis le 4 janvier 2020 alors qu’il avait enfilé les deux buts du Tricolore dans un revers de 3-2 encaissé en prolongation aux mains des Penguins de Pittsburgh. En passant, Lehkonen est toujours en quête d’un premier tour du chapeau en carrière.

 

Avec une touche un brin plus précise et deux brins plus d’opportunisme, Lehkonen aurait quelques tours du chapeau à son actif considérant le très grand nombre d’occasions qu’il crée en fonçant au filet comme il le fait, en travaillait comme il le fait.

 

Comme tout entraîneur, Martin St-Louis profite pleinement de la présence d’un joueur aussi déterminé que Lehkonen. D’où le fait qu’il ait souligné à quel point il était heureux de voir ses efforts être récompensés samedi.

 

Quand Martin St-Louis a souligné que Lehkonen était prêt à n’importe quoi pour aider la cause de son équipe, le nouveau coach a lancé une profession de foi à l’endroit d’un de ses soldats les plus utiles. Le genre de soldat que St-Louis tient à garder au sein de sa brigade.

 

Et c’est normal.

 

Ce qui est plus normal encore, c’est que Kent Hughes et Jeff Gorton, en bons hommes de hockey qu’ils sont et avec le mandat de bâtir, ou rebâtir, un vrai club gagnant à Montréal doivent de leur côté se demander de quelle façon Artturi Lehkonen pourra être le plus utile au Tricolore au cours des prochaines saisons.

 

Lehkonen est une valeur sûre. Il est le genre de gars sur qui tu peux compter sur la patinoire, dans le gymnase et dans le quotidien afin de donner l’exemple aux jeunes qui se grefferont à l’organisation au fil des prochaines années.

 

Le garder à Montréal, surtout au salaire qu’il commande, est certainement une bonne idée.

 

Mais voilà : des joueurs comme Artturi Lehkonen sont tellement en demande de la part des entraîneurs-chefs de la LNH qu’il y a peut-être un coach, quelque part, qui convaincra un directeur général à présenter une offre plus qu’intéressante au Tricolore pour obtenir ses services.

 

Si cette offre tombe sur son bureau, Kent Hughes aura l’obligation de lui accorder toute l’attention et tout le sérieux nécessaire. Ça ne veut pas dire de sauter sur la première offre venue. Ça non ! Mais le ou les choix au repêchage qu’il pourrait obtenir, l’espoir qu’il pourrait obtenir s’il décidait que c’est un espoir qu’il tient à recevoir, pourraient rendre de plus grands services dans deux, trois ou quatre ans alors que ça comptera vraiment que les services que Lehkonen rend présentement.

 

Est-ce qu’un choix de première ronde serait suffisant ? S’il s’agit d’un choix non protégé en 2023 certainement.

 

Est-ce trop demandé pour Lehkonen ?

 

Peut-être. Mais dans le cas de Lehkonen, contrairement au cas de Ben Chiarot, de Jeff Petry ou d’un joueur au contrat un brin ou deux trop lourd, le Canadien peut se permettre d’être exigent, car ce ne serait pas une erreur de garder le valeureux soldat finlandais à long terme à Montréal.

 

La réponse tombera au plus tard le 21 mars.

 

Deuxième en lice : Laurent Dauphin

 

Laurent Dauphin est passé à un cheveu de marquer dans un filet désert en fin de match samedi.

 

« J’aurais aimé qu’il marque, car cela aurait représenté une belle récompense », que Martin St-Louis a tenu à préciser après la victoire acquise même si le dégagement effectué par le centre québécois est passé à quelques pouces à droite du filet.

 

Au-delà la récompense qu’aurait représentée ce troisième but dans l’uniforme du Canadien, le simple fait que Dauphin était sur la patinoire en fin de match pour protéger l’avance ou pour l’accentuer s’inscrit à mes yeux comme une très grande récompense offerte par un coach à un joueur. Surtout un joueur étiqueté Ligue américaine comme l’est Dauphin.

 

Et vous savez quoi? S’il a dû se contenter de passer près d’accentuer l’avance de son équipe, Dauphin s’est illustré dans le volet « protection de l’avance » en étirant sa jambe gauche, plus tôt en troisième, pour rendre un fier service à Andrew Hammond afin qu’il signe son deuxième gain en deux sorties depuis son acquisition par le Canadien.

 

Autre récompense pour Dauphin : le fait d’avoir été inséré et surtout gardé au centre de Mike Hoffman et Brendan Gallagher au sein du deuxième trio.

 

Encore là : plusieurs souligneront avec raison que l’absence de Christian Dvorak mousse beaucoup la présence du Québécois au centre de ce trio. Je veux bien. Mais ce mandat aurait facilement pu être accordé à Ryan Poehling qui joue du bon hockey depuis quelques semaines et qui représente – surtout en raison de son statut d’ancien choix de première ronde – un plus bel espoir que Dauphin.

 

En raison de la qualité et de la quantité des efforts qu’il déploie, en raison de la qualité du travail qu’il abat, Dauphin mérite pleinement les récompenses associées à l’utilisation dont il fait l’objet.

 

Si les Dieux du hockey sont justes, un but, même marqué dans un filet désert, s’ajoutera à la liste des récompenses.

 

Troisième en lice : Andrew Hammond

 

Parce que Samuel Montembeault avait signé, jeudi, son premier jeu blanc en carrière en bloquant les 32 tirs des Sabres de Buffalo, il aurait été facile de lui redonner le filet samedi.

 

ContentId(3.1402256):Canadiens : Retour victorieux à Ottawa pour Andrew Hammond (L'Antichambre)
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Certains diront qu’il aurait même été normal de le faire.

 

Mais Martin St-Louis a préféré y aller avec Andrew Hammond. Et le coach a qualifié, eh oui, de récompense la victoire qu’il a signée en bloquant 26 des 27 tirs des Sénateurs.

 

Après avoir surmonté tout ce qu’il a eu à surmonter comme épreuves au cours des trois dernières saisons passées dans les mineures, Hammond méritait la récompense d’affronter les Sénateurs, à Ottawa, où il a connu ses brefs moments de gloire dans la LNH.

 

Il méritait de recevoir l’accueil que ses anciens fans des Sens lui ont offert et la douzaine de hamburgers tirés sur la patinoire pour saluer le retour du « Hamburglar » au Centre Canadian Tire.

 

Hammond a saisi l’occasion à deux mains. Et surtout, il ne l’a pas échappée.

 

Qu’est-ce que St-Louis a fait après le match? Il a distribué une autre récompense : « Andrew méritait cette victoire en guise de récompense. »

 

Je ne sais pas combien de matchs disputera Hammond d’ici la fin de la saison. Encore moins le nombre de victoires qu’il signera. Je ne sais même pas s’il aura le temps de recevoir des jambières aux couleurs du Canadien pour remplacer celles qu’il porte et qui sont aux couleurs du Wild son ancienne organisation.

 

Mais ce que je sais, c’est que le coach lui donne la chance de se faire valoir, de se mettre en valeur, d’être un actif pour sa nouvelle équipe.

 

Quatrième en lice : Jake Evans

 

Il n’y a pas que la présence de Laurent Dauphin en fin de rencontre qui m’a surpris. Celle de Jake Evans m’a fait sourciller aussi.

 

Pourquoi?

 

Parce que jusque-là dans le match, Evans, malgré une rencontre de qualité disputée entre Rem Pitlick et Artturi Lehkonen, avait connu plus que sa part de difficulté aux cercles des mises en jeu. Evans n’avait gagné que six des 16 mises en jeu qu’il avait disputées jusque-là. Laurent Dauphin qui l’accompagnait alors sur la patinoire affichait 42 % d’efficacité (5 en 12).

 

Avec Matt Murray rappelé au banc à la faveur d’un sixième patineur, il me semblait que le choix logique aurait été d’avoir Nick Suzuki flanqué d’Evans ou Dauphin.

 

Même s’il n’avait pas marqué et n’avait pas récolté de point dans le match, Suzuki disputait une solide rencontre. Il avait été plus solide encore aux cercles des mises en jeu avec ses 14 batailles gagnées en 20 disputées.

 

Mais non! Martin St-Louis a fait confiance aux deux autres. Il a offert la chance à Evans de faire oublier des statistiques défavorables en gagnant la mise en jeu la plus importante de sa soirée.

 

Il l’a gagnée!

 

Est-ce que c’est St-Louis qui a récompensé Evans en lui offrant cette chance ou plutôt Evans qui a récompensé son coach en gagnant cette mise en jeu?

 

Je vous laisse choisir.

 

Comme je vous laisse déterminer si c’est Hammond qui a davantage récompensé St-Louis d’une victoire que le contraire ; que c’est plus Dauphin qui a récompensé St-Louis pour la confiance qu’il affiche en lui que

 

Je vous laisse le soin d’établir si ce sont les Dieux du hockey qui ont récompensé Lehkonen, ou plutôt le bon Artturi qui a trouvé une façon de transformer des occasions de marquer qu’il ratait souvent en buts simplement pour confirmer que St-Louis a transformé le Canadien en insufflant un vent de confiance pour remplacer la lourde dépression de méfiance qui étouffait le club avant son arrivée.

 

Je sais toutefois une chose : c’est avec ce genre d’échanges de confiance et de récompenses que viennent les performances solides et les victoires qui en découlent souvent. Je sais aussi que c’est de ce genre d’échanges de confiance et de récompenses que naît le respect qui lie un coach à ses joueurs.

 

Le genre de respect sans lequel un coach et son équipe ne peuvent connaître du succès.

 

Le genre de respect que St-Louis a instauré dès l’instant où il est débarqué dans le vestiaire.

 

Avec les résultats qu’on connaît.

 

Et non, je ne parle pas des cinq victoires de suite. Du moins, pas seulement de ces cinq gains. Je parle surtout de la nouvelle dynamique, de la nouvelle atmosphère, de la nouvelle manière de jouer qui a mené à ces victoires.

 

C’est là que St-Louis a réalisé son meilleur coup depuis son arrivée. Son meilleur coup jusqu’ici. Car j’ai l’impression qu’il en réalisera bien d’autres au fil des prochaines années.

 

Car en dépit du qualificatif « intérim » associé à son titre, St-Louis est ici pour rester! S’il décide qu’il veut y rester bien sûr...